Économie sociale et solidaire : Marlène Schiappa esquisse sa feuille de route

La sobriété a été au cœur de la quatrième édition des Universités d’été de l’économie de demain, organisées le 30 août 2022 par le Mouvement Impact France. Ce réseau d’"entreprises engagées" – rassemblant des acteurs de l’économie sociale et solidaire comme des entreprises qui portent une démarche RSE – adresse des propositions au gouvernement et à l’ensemble des entreprises françaises. Pour Marlène Schiappa, désormais secrétaire d’État chargée de l’ESS et de la vie associative, les entreprises les plus engagées doivent inspirer la société et le reste de l’économie, notamment en communiquant davantage sur leurs pratiques et leurs impacts sociaux et environnementaux.

Organisées par le Mouvement Impact France le 30 août 2022 à Paris, les Universités d’été de l’économie de demain, organisées cette année sur le thème de la sobriété (voir notre encadré ci-dessous), ont donné à Marlène Schiappa l’occasion de s’adresser pour la première fois à une assemblée d'acteurs de l'économie sociale et solidaire (ESS) et, plus généralement, de responsables d’entreprises dites "à impact".

L’ESS et la vie associative rassemblées sous la houlette de Matignon 

Placée auprès de la Première ministre et chargée à la fois de l’ESS et de la vie associative, la secrétaire d’État s’est vu préciser ses missions dans un décret publié au Journal officiel du 29 juillet 2022. Son rôle est de définir et mettre en œuvre la politique du gouvernement pour ces deux volets : le développement de l’ESS – notamment en promouvant "les activités d'intérêt général ou d'utilité sociale qui y concourent" - et le développement de la vie associative – et cela en lien avec le ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse et, pour l’animation des réseaux, avec l’ensemble des ministres compétents.

Si la notion d’économie "responsable" ne figure plus dans l’intitulé, Marlène Schiappa reprend bien les missions d’Olivia Grégoire en la matière puisque le décret mentionne qu’elle "participe" à la politique du ministre de l’Économie de "développement de l'économie responsable, notamment des fondations d'entreprises et du mécénat" et qu’elle "incite à la consommation sociale, solidaire, et durable". La secrétaire d’État travaillera avec les services concernés des différents ministères, dont la direction générale du Trésor (Bercy) pour l’ESS et direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative (Djepva, ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse) pour la vie associative.

Après avoir été "un peu baladée" entre les ministères lors du premier quinquennat d’Emmanuel Macron, entre l’Environnement avec Christophe Itier et Bercy avec Olivia Grégoire, l’ESS est-elle désormais au "bon endroit" à Matignon ? A cette question de Jean Moreau, co-fondateur de Phenix et co-président du Mouvement Impact France, Marlène Schiappa a expliqué que le choix avait été fait de rassembler dans un même ministère "toutes les personnes qui veulent aller au-delà du profit et faire ensemble". C’est selon elle "l’économie de la coopération par rapport à l’économie de la concurrence", soulignant que le rattachement à Matignon était "un beau signal". Après avoir posé "les fondations", dont la loi Pacte – citée alors que cette loi a pourtant été portée par le ministère de l’Economie avant que l’ESS n’y soit rattachée -, l’enjeu est désormais d’"irriguer" et d’"y mettre beaucoup d’interministériel", met en avant Marlène Schiappa.     

Communication et valorisation de l’impact : "un combat culturel" à mener

De même, interrogée sur l’évolution de l’agrément Entreprises solidaires d’utilité sociale (Esus) et sur la mise en place d’éventuelles "contreparties", notamment fiscales pour les entreprises qui s’engagent à des pratiques de lucrativité limitée, la secrétaire d’État promet des changements sur la forme – "simplification et dématérialisation" de la procédure d’obtention de l’agrément - mais pas sur le fond. La démarche Esus "est un engagement et peut-être que cela peut aussi être envisagé comme un premier pas et comme une réflexion pour aller vers les autres outils qui sont proposés, notamment la raison d’être et l’entreprise à mission", suggère-t-elle, alors que les critères de l’agrément Esus sont plus contraignants que les outils cités qui ont été introduits par la loi Pacte.

L’enjeu sera aussi – et surtout ? – d’"aider les entreprises de l’économie traditionnelle à faire leur transition", poursuit Marlène Schiappa, considérant notamment que tout le "travail intellectuel" sur la mesure d’impact réalisée par les acteurs de l’ESS doit "profiter aussi aux grandes entreprises". Si elle se dit vigilante face au risque de greenwashing et favorable à la diffusion de l’"impact score" sur les biens et services - créé par le Mouvement Impact France sur le modèle du "Nutriscore" -, la secrétaire d’État enjoint les entreprises vertueuses à ne pas verser dans "l’inverse du greenwashing", c’est-à-dire à ne pas avoir peur de communiquer et de valoriser leur impact. C’est "un combat culturel" que cette membre du gouvernement particulièrement médiatisée entend mener.

Face aux acteurs de l’ESS, Marlène Schiappa s’engage à "simplifier" pour leur permettre d’accéder plus aux financements de droit commun, notamment ceux du plan France 2030. La commande publique sera aussi "une des priorités de [sa] feuille de route", avec un agenda commun sur ce point avec Stanislas Guerini, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques. Première étape : la création d’un "catalogue des entreprises de l’ESS par lesquelles on peut passer".

  • Sobriété : les entreprises engagées adressent des propositions à la Première ministre   

Sept membres du gouvernement – Roland Lescure, Olivia Grégoire, Clément Beaune, Marlène Schiappa, Jean-Noël Barrot, Agnès Pannier-Runacher, et Marc Fesneau à distance – étaient présents ce 30 août 2022 aux Universités d’été de l’économie de demain, organisées pour la quatrième année par le Mouvement Impact France sur le thème de la sobriété. La veille, à la Rencontre des entrepreneurs de France du Medef, la Première ministre Elisabeth Borne avait appelé les entreprises à prendre leurs "responsabilités" et à établir dès septembre des "plans de sobriété" en vue d’une baisse de la consommation d’énergie "face aux menaces de pénurie de cet hiver".

Déclarant porter "la voix de 15.000 entreprises et organisations engagées de longue date dans la transition écologique et sociale", le Mouvement Impact France répond à cet appel en adressant à la Première ministre 20 propositions pour "passer d’une ‘sobriété d’urgence’ à une sobriété organisée". Dix de ces propositions sont intitulées "les 10 commandements d’une entreprise sobre" ; les entreprises sont invitées à baisser leur consommation d’énergie, de matières premières et leurs émissions de gaz à effet de serre, à recourir à l’économie circulaire, à "répondre aux besoins essentiels plutôt que d’en créer en intégrant l’ensemble de [leurs] parties prenantes dans [leur] stratégie" ou encore à "mettre en place des pratiques de sobriété salariale et de partage de la valeur".

Les dix autres propositions s’adressent aux décideurs publics, qui sont invités à rendre obligatoire le bilan carbone pour toute entreprise de plus de 50 salariés, à réguler la publicité pour encourager à "consommer moins mais mieux", à "rendre la sobriété compétitive" par exemple avec une TVA réduite pour les produits sobres, à adopter des pratiques exemplaires notamment par "un seuil environnemental minimal dans la notation des marchés publics", à "soutenir la transformation de tous les systèmes de production", ou encore à définir "des incitations claires à l’économie circulaire et l’économie de la fonctionnalité"

Sous l’impulsion du Mouvement Impact France – qui était auparavant le Mouvement des entrepreneurs sociaux -, cet appel est également porté par l’Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire (Udes), l’Avise, le Labo de l’ESS, le réseau Initiative France, le Coorace, le 1% for the planet ou encore la Communauté des entreprises à mission.

C. Megglé

 

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