Difficultés de recrutement : les sénateurs formulent 24 recommandations
Le Sénat a rendu le 18 juin un rapport de 24 propositions afin de pallier les difficultés de recrutement des entreprises. L’accent a notamment été placé sur la montée en compétence, l’anticipation de l’évolution des métiers, la formation et la jeunesse. Les sénateurs ont également estimé que les régions devraient piloter les politiques de l’emploi.
La délégation aux entreprises du Sénat a présenté le 18 juin 2020 les 24 recommandations de son rapport "Des compétences de toute urgence pour l’emploi et les entreprises". Un travail débuté à l’automne dernier et qui devait initialement être publié en avril, mais qui au regard de la crise sanitaire, a dû être poursuivi et modifié. "Depuis deux ans, les chefs d’entreprise font part des difficultés qu’ils éprouvent à recruter pour des métiers basiques et des métiers aux compétences plus poussées, ce qui nous a paru incongru au regard des 5,6 millions de personnes inscrites à Pôle emploi", a expliqué Michel Canévet, sénateur centriste du Finistère.
Une situation qui inquiète les entreprises comme les élus et qui risque de s’aggraver étant donné les 800.000 demandeurs d’emploi supplémentaires et la récession qui s’annonce. Pour limiter les risques, les sénateurs recommandent de "favoriser l’adéquation entre les besoins des entreprises et les demandes des concitoyens de pouvoir travailler". "Il apparaît que l’évolution des compétences est une nécessité dans notre pays", a souligné Michel Canévet. "Cela passe notamment par l’anticipation de l’évolution des métiers et par conséquent des compétences professionnelles."
Afin de réagir à cette crise, trois logiques "doivent guider" l’action publique :
- Accompagner les individus tout au long de la vie et dès la formation initiale, avec pour objectif constant d’améliorer leur insertion professionnelle ou leur employabilité.
- Permettre aux entreprises de trouver rapidement les compétences dont elles ont besoin.
- Définir les modalités d’un pilotage efficient des acteurs de l’emploi sur chaque territoire.
Accélérer la certification des formations
Plus précisément, les rapporteurs proposent par exemple de mettre en place des formations plus courtes et de les certifier plus rapidement. "Le temps de la certification n’est plus adapté aux nécessités de l’évolution technologique. La reconnaissance officielle des formations doit être actée de façon plus rapide pour faciliter le besoin de reconversion d’actif qui souhaite trouver un emploi", indique le sénateur breton. Les élus pointent également la multitude d’initiatives et d’acteurs sur le terrain financés par des fonds publics qui donnent l’impression d’une dispersion de ces fonds. "Or, il est nécessaire d’avoir une parfaite cohérence et nous avons estimé qu’il était nécessaire que les régions, ayant la compétence économique, pilotent les politiques d’emploi sur le pays, ce qui permettrait notamment de satisfaire des besoins différents en fonction des territoires", arguent les sénateurs.
Ces derniers souhaitent aussi élargir et pérenniser le sur-amortissement fiscal prévu pour les investissements des PME industrielles dans le domaine de la robotique et de la transformation numérique. Une manière de valoriser l’investissement immatériel contribuant à améliorer les compétences, "il faut encourager les entreprises à se tourner vers la formation initiale d’une part et surtout la formation de tous leurs salariés, c’est très important", a martelé Guy-Dominique Kennel, sénateur LR du Bas-Rhin.
Décloisonner Education nationale et entreprises
"Globalement, notre public cible sont les jeunes. Aussi nous proposons un parcours qui optimise l’ensemble des systèmes et qui débouche sur un épanouissement personnel", a expliqué le sénateur alsacien. L’objectif est d’éviter le "gâchis de compétences", alors que près de 100.000 jeunes de 16 à 25 ans se retrouvent chaque année sans études, ni emploi, ni formation. "Les jeunes actifs quant à eux sont souvent recrutés pour des emplois temporaires. Ces deux phénomènes accentuent la probabilité d’obsolescence et de dépréciation des compétences", peut-on lire dans le rapport. La réduction de ces phénomènes passe notamment par le décloisonnement de l’Education nationale et du monde de l’entreprise.
"Au total, en 2019, seulement 4.300 personnels de l’Education nationale ont fait un passage d’un à trois jours en entreprise, c’est très peu", estime Guy-Dominique Kennel. C’est pourquoi il propose de rendre obligatoire une immersion en entreprise pour l’ensemble des personnels et pas seulement les professeurs de l’Education nationale afin de "casser le cloisonnement". De même, le rapport propose de rendre obligatoire une journée de visite en entreprise lorsque les jeunes ont déterminé le type de métiers qu’ils veulent faire afin d’améliorer la connaissance du secteur. Quatre recommandations sont également faites en faveur de l’apprentissage, "très touché par la crise" comme le maintien des contrats d’apprentissage malgré la crise ou encore la mise en place d’aides financières pour que les apprentis puissent faire face aux frais de transport et de restauration sur le lieu de travail comme de formation.