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Europe - Développement local : Leader France interpelle les régions

La réforme territoriale a fortement retardé la mise en oeuvre du programme de développement local Leader doté de 687 millions d'euros d'ici à 2020. A ce jour, seuls 10% des GAL (groupes d'action locale) ont passé une convention avec leur région, prévient Thibaut Guignard, président de Leader France, l'association nationale des GAL. Deux risques planent sur la programmation : celui de devoir restituer les fonds à Bruxelles s'ils ne sont pas dépensés dans les temps et celui de dénaturer l'originalité de ce programme, estime le président du GAL Leader de Saint-Brieuc et maire de Ploeuc-L'Hermitage.

Où en la mise en oeuvre du programme Leader ?

Deux ans après la signature de l'accord de partenariat et un an après la validation des programmes de développement rural, seulement 10% des GAL ont signé une convention avec leur région en France métropolitaine. Aucun ne l'a encore fait en Outre-Mer. Il y a une vraie difficulté au démarrage, ce qui implique un retard dans les projets, les stratégies de développement mises en place dans les territoires et dans la consommation des fonds. Aujourd'hui, aucun dossier n'est programmé et encore moins payé. L'Association des régions de France et l'Agence des services de paiement se rejettent la responsabilité. Mais 17 projets de convention régionale sur 24 ont été validés par l'ASP, ce qui veut dire que les régions sont bien en mesure de signer avec leurs GAL. A terme, on prévoit le conventionnement de 350 GAL [contre 222 lors de la précédente programmation, ndlr] mais certains GAL n'ont toujours pas été sélectionnés dans leur région…

A quoi tient ce retard ?

Il y a un certain nombre de sujets sur lesquels l'ASP et les régions ne se sont pas mises d'accord : la contrôlabilité des fiches actions, l'instrumentation des fichiers Osiris [le logiciel de saisie des dossiers, ndlr]… La décentralisation de la gestion au niveau régional est une bonne chose mais, concrètement, l'ASP a aujourd'hui en face d'elle 24 autorités de gestion qui ont leurs propres spécificités. C'est forcément plus long. Ce que l'on souhaite, c'est qu'il n'y ait pas des outils de gestion spécifiques dans chaque région mais un outil commun à tous les GAL.

Il y a quelques mois, Leader France pointait le risque que les régions, désormais autorités de gestion, imposent leurs priorités. Est-ce que ces craintes se sont confirmées ?

Je confirme ce risque. Et c'est la spécificité de Leader qui pourrait en pâtir. Leader repose sur un comité unique de programmation composé d'acteurs publics et privés. Ce comité statue sur les stratégies locales de développement et sur l'attribution des fonds. Si l'autorité de gestion instruit sur l'opportunité des projets, on perdra le sens de Leader qui est un outil spécifique et pas qu'un tiroir-caisse. Je rappelle que l'intérêt de Leader réside dans sa démarche ascendante, c'est-à-dire qui part de la base. Il repose sur des fondamentaux : la mise en réseau au niveau national et européen avec l'association Elard, l'équivalent de Leader France au niveau européen, la capitalisation et la diffusion des bonnes pratiques, et la coopération entre les GAL.

La situation est-elle identique dans l'ensemble des régions ?

Il y a en fait trois types de régions. Celles où cela se passe bien, où le nouveau découpage n'a rien bousculé et où les élus sont attentifs à Leader qui, rappelons-le, ne représente que 5% de l'enveloppe Feader [687 millions d'euros sur 11,4 milliards d'euros, ndlr], ce qui n'en fait pas forcément une priorité des élus.
Dans d'autres régions, cela avance doucement. Les conseils régionaux récupèrent  parfois 3 autorités de gestion, 3 PDR, 3 équipes situées à 200 km l'une de l'autre… ce n'est pas simple.
Mais dans d'autres encore, il y a de vraies inquiétudes sur une remise en cause du travail réalisé jusqu'ici. On va arriver à deux ans de retard et les crédits non-consommés risquent de devoir être renvoyés à Bruxelles en vertu du dégagement d'office. Des projets pourraient être abandonnés. Derrière, le danger est la perte de savoir-faire. Des agents se posent un certain nombre de questions sur leur avenir professionnel. On craint une démobilisation. La France est particulièrement en retard. La Commission européenne a récemment averti que c'est un des pays les plus en retard, du fait notamment de sa réorganisation territoriale.

La région Bretagne se situe plutôt dans quelle catégorie ?

La spécificité de la région Bretagne est d'avoir une enveloppe Leader pour chaque pays. Le comité unique de programmation a vocation à attribuer l'ensemble des crédits : Feader, Feamp mais aussi les crédits Feder et les crédits régionaux territorialisés… C'est un outil pertinent qui permet d'avoir une vision globale. Mais le risque, c'est de faire de Leader un outil de financement comme les autres. Vouloir attribuer une enveloppe à chaque pays est une démarche très égalitaire, mais justement, Leader se voulait jusque-là discriminant en donnant plus à certains territoires en fonction des besoins et de la qualité des candidatures. Pour autant, tout se met en œuvre et les signatures devraient prochainement commencer.

Et quelles sont les priorités de votre GAL de Saint-Brieuc ?

Il s'agit de tout ce qui touche au bien vivre en milieu rural, au bien grandir, aux services à la personne, aux transports… On a aussi une fiche coopération pour travailler avec d'autres pays européens sur la valorisation touristique, avec comme fil rouge la gastronomie. Saint-Brieuc est une destination touristique européenne.

Plus généralement, a-t-on une vision globale des projets qui se dessinent au niveau national ?

Non pas encore. Cela demande un travail de collation assez important qui n'a pas encore été effectué. Pour le moment, Leader France est le seul à pouvoir le faire : les ministères n'ont plus les moyens et l'ARF ne l'a pas fait.
 

 

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