Développement de l’agrivoltaïsme : le décret cadre en consultation
Pas à pas le cadre juridique de l’agrivoltaïsme sort de terre. Dernier élément en date, un projet de décret, soumis à consultation jusqu’au 16 janvier, précise les critères introduits par la loi d’accélération de la production d’énergies renouvelables pour concilier développement de la filière et priorité de la production agricole, et fixe des "garde-fous" pour les projets photovoltaïques sur terrains agricoles, naturels ou forestiers.
Pris en application de la loi du 10 mars 2023 d’accélération de la production d’énergies renouvelables, dite Aper, (art. 54), un projet de décret, mis en consultation publique jusqu’au 16 janvier prochain, définit les conditions de développement de l’agrivoltaïsme et d’implantation des installations photovoltaïques sur des terrains agricoles, naturels ou forestiers.
Cherchant un équilibre entre encouragement de la filière et préservation de la production agricole, l’article L. 314-36 du code de l’énergie introduit par la loi propose une définition juridique de l’agrivoltaïsme largement inspirée d’une proposition de loi adoptée par le Sénat en première lecture en octobre 2022. Est considérée comme une installation agrivoltaïque "une installation de production d’électricité utilisant l’énergie radiative du soleil et dont les modules sont situés sur une parcelle agricole où ils contribuent durablement à l'installation, au maintien ou au développement d'une production agricole". Et par la négative : ne peut pas être considérée comme agrivoltaïque une installation qui "ne permet pas à la production agricole d'être l'activité principale de la parcelle agricole" et/ou "n’est pas réversible".
Le texte soumis à consultation précise les termes et les critères de la définition légale, et en particulier s’agissant du contenu des services (au nombre de quatre) devant être apportés à l’activité agricole par les projets agrivoltaïques -amélioration du potentiel et de l’impact agronomique, adaptation au changement climatique, protection contre les aléas et amélioration du bien-être animal -, ou de la notion de production agricole significative et de revenu durable en étant issu.
Éviter les projets "alibis"
Y sont détaillées les modalités garantissant que l’activité agricole reste "l’activité principale de la parcelle". Différents indicateurs sont ainsi fixés, notamment une limite de perte de rendement (10% en moyenne pluriannuelle). Le texte distingue les technologies "éprouvées" au niveau national - listées dans un arrêté interministériel - des autres (non listées), qui devront comporter une zone témoin ou justifier d’une installation agrivoltaïque similaire à proximité. Pour les projets spécifiques de plus de 10 MW qui ne relèveront pas de cet arrêté, le taux de couverture (rapport entre la surface projetée des panneaux et la surface de la parcelle) pourra aller jusqu’à 40%, est-il indiqué.
Déjà fort complexe, le texte y superpose des éléments afférents à un autre régime juridique. Il s’intéresse en effet aux "installations compatibles avec l’exercice d’une activité agricole, pastorale ou forestière" et conformes au "document-cadre" décrit à l'article L.111-29 du code de l’urbanisme. Avec là encore un certain nombre de garde-fous…Les projets photovoltaïques au sol ne pourront se déployer que sur des terrains réputés incultes ou inexploités depuis au moins dix ans. Pour rappel, les surfaces agricoles et forestières ouvertes à un projet d’installation seront identifiés à l’échelle départementale dans un document-cadre pris sur proposition de la chambre d’agriculture et après consultation de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF), des organisations professionnelles et des collectivités concernées. Pour simplifier cette tâche, le texte propose l’inclusion d’office de certains terrains présumés incultes dans le document-cadre.
Le projet de décret précise les conditions de demande et d’octroi de l’autorisation d’urbanisme, et ce pour les deux régimes : installations agrivoltaïques au sens de l’article L.314-36 du code de l’énergie et installations photovoltaïques visées par le document cadre de l’article L.111-29 du CU. À noter, le délai à l'issue duquel la CDPENAF est réputée avoir émis un avis favorable (sur la demande de permis ou la déclaration préalable) est alors de deux mois. Le texte détermine en outre les conditions liées à la durée d’autorisation - au maximum 40 ans -, ainsi qu’à l’obligation de démantèlement et de remise en état après exploitation. Une réversibilité des installations est prévue ainsi que la constitution de garanties financières pour couvrir ces opérations. Le décret fixe, enfin, les modalités de suivi et de contrôle des installations ainsi que les sanctions en cas de manquement.