Dans le Cher, Edouard Philippe détaille sa politique de l'innovation
Au deuxième jour de la délocalisation de Matignon dans le Cher, le Premier ministre a dévoilé, jeudi 3 mai, les grandes lignes de sa stratégie pour l’innovation. Une innovation qui, a-t-il souligné, a tout à fait sa place dans les territoires. "Nous avons pris une mauvaise habitude en France d'opposer l'urbain et le rural et de considérer que l'un serait paré de toutes les vertus, du dynamisme et l'autre de tous les désavantages, de l'oubli et de la relégation. Ce n’est pas vrai", a déclaré Edouard Philippe, en visite à Henrichemont, dans les locaux des laboratoires de Genialis, une société spécialisée dans l’agroalimentaire, la santé, les cosmétiques. "Ici (…) on en a une preuve éclatante, éclatante de l'intelligence, de l'innovation, de la capacité de mobilisation des réseaux", a-t-il dit, accompagné des secrétaires d'Etat Olivier Dussopt, Delphine Gény-Stephann et Mounir Mahjoubi. Le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, principal artisan du projet de loi Pacte qui portera nombre de ces mesures, n’était en revanche pas présent.
Passer du labo à la démo
Le premier axe de la stratégie d’innovation du gouvernement consiste "à passer le plus vite possible du labo à la démo", a souligné le Premier ministre, en appelant aux acteurs publics "départementaux, régionaux, nationaux" qui "participent ou peuvent accompagner dans certains cas ce processus indispensable" : aides directes, aides à l’environnement, création de tiers-lieux, d’espaces de cotravail… Mais au-delà, le Premier ministre a indiqué que le projet de loi Pacte comprendrait la création de "demandes provisoires de brevets" : "Une première marche qui a le mérite de nécessiter peu de formalités, de ne pas coûter cher et de protéger pour une durée d'un an." Le gouvernement veut aussi améliorer le certificat d’utilité pour les inventions à cycles courts et instaurer une "procédure d’opposition" qui permettra à toute personne de demander à l’Inpi de révoquer un brevet. "Cette procédure protégera les start-up et les PME contre le parasitisme en leur offrant un moyen de défense souple, rapide et pas cher pour défendre leurs innovations", a précisé le chef du gouvernement. Il s’agira ensuite d’accélérer le transfert de technologies issues de la recherche fondamentale, en dotant les laboratoires publics d’un mandataire unique qui disposera de pouvoirs renforcés et en facilitant la vie des entrepreneurs-chercheurs, en proposant un "acte 2" de la loi Allègre de 1999. Par exemple, après avoir participé à la création d'une entreprise, le chercheur pourra revenir dans son établissement tout en conservant jusqu’à 49% des parts de capital dans la société.
De nouveaux appels à projets France expérimentation
Deuxième axe de la stratégie gouvernementale : favoriser l’expérimentation. Le Premier ministre a relancé l’initiative France expérimentation initiée en 2016 par Emmanuel Macron, lorsqu’il était ministre de l’Economie. L’objectif : permettre aux chefs d’entreprises de faire remonter leur besoins d'adaptation de normes ou de procédures. Jusqu’ici cantonnée aux aspects réglementaires, la démarche sera étendue aux mesures législatives. Un appel à projets a été lancé en ce sens le 3 mai, il sera clôturé le 31 mai, afin que les premières mesures de dérogations aux normes législatives puissent être intégrées dans la section "expérimentation" du projet de loi Pacte en cours de finalisation. Le portage en sera désormais assuré par le délégué interministériel à la transformation publique, Thomas Cazenave. Un second appel à projets sera lancé courant juin sur le thème de la mobilité. Le demandes de dérogations réglementaires continueront, elles, d’être instruites au fil de l’eau.
Enfin, le Premier ministre a mis l’accent sur le financement de l’innovation et a apporté de nouvelles précisions sur le fonds d’innovation de rupture lancé en début d’année avec une dotation de 10 milliards d’euros mais dont les contours restent flous. Un tiers de l’enveloppe servira à soutenir des start-up "deep tech", "c’est-à-dire très profondément connectées à la technologie". Le reste soutiendra les projets d'innovations de rupture, tels que l'intelligence artificielle qui bénéficiera de 100 millions d'euros sur une durée de trois ans ou le plan Nano 2022. En termes de gouvernance, un "Conseil de l'innovation" coprésidé par les ministres compétents et dont le secrétariat sera assuré par le Secrétariat général pour l'investissement "aura pour mission de poursuivre le travail de simplification et d'articulation entre les différents dispositifs d'aides".