Convention citoyenne sur le climat : Barbara Pompili défend le projet de loi avant une série de réunions
Près de 40% des propositions de la Convention citoyenne sur le climat (CCC), figureront dans le futur projet de loi Climat, a affirmé ce 7 décembre la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili. Sur Europe 1 et dans une tribune publiée par le journal Le Monde, elle a une nouvelle fois défendu la démarche du gouvernement avant une série de réunions sur le sujet, alors que se multiplient les critiques sur la méthode comme sur le fond.
Interviewée dans la matinale d'Europe 1 ce 7 décembre, la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, a indiqué que sur les 146 propositions (sur 149) de la Convention citoyenne sur le climat (CCC) retenues par Emmanuel Macron, "à peu près 40%" vont être retranscrites dans le futur projet de loi. "C'est une loi qui va mettre l'écologie dans le modèle français, a déclaré la ministre. Ce qu'on veut, c'est que ce ne soit pas juste une loi d'incantation (…). On a vu qu'il fallait se donner les moyens, poser les jalons et taper à la porte de la vie quotidienne pour que l'écologie rentre dans nos vies."
"Le 'dernier kilomètre' de la transition"
"J’ai suffisamment de recul sur l’histoire du combat écologique pour mesurer combien il est difficile de franchir le 'dernier kilomètre' de la transition, le plus crucial : celui qui conduit à changer réellement nos modes de vie, écrit la ministre dans une tribune parue ce même jour dans le journal Le Monde. Cette loi vise précisément cela, en faisant pénétrer l’écologie au cœur du modèle français et en irriguant concrètement la société française dans ce qu’elle a de plus fondamental : l’école, les services publics, la justice, mais aussi le logement et l’urbanisme, la publicité, les trajets pour se rendre au travail ou en vacances. Cette loi n’agira pas seulement sur les structures de l’économie pour en accélérer la décarbonation, elle innervera notre culture, en favorisant l’éducation à l’environnement, une publicité responsable, une consommation plus sobre."
Cinq réunions programmées
Le texte en cours d'élaboration compte "aux alentours de 80 articles, donc c'est un très gros projet de loi", a-t-elle insisté sur Europe 1. Cinq réunions sur les orientations du projet de loi ont été programmées ces 7 et 8 décembre entre des membres de la CCC, des ministres et des parlementaires. "Jamais une loi de la République n'a autant associé les citoyens dans son élaboration", a affirmé Barbara Pompili dans Le Monde. "Cette étape ne sera pas la dernière, a-t-elle souligné. C’est le point de départ d’une concertation qui va durer jusqu’à la fin du mois de janvier et qui permettra de compléter et d’enrichir le projet de loi du gouvernement. Le projet sera ensuite présenté en conseil des ministres fin janvier, puis soumis au Parlement à qui il appartiendra, comme le prévoient nos règles constitutionnelles, d’en valider le contenu au terme d’un processus de plusieurs mois, jusqu’à l’été 2021."
"Rassurer tout le monde"
Si le chef de l'État, Emmanuel Macron, s'était engagé à soumettre les propositions de la convention "sans filtre", soit aux votes du Parlement, soit par référendum ou par application réglementaire directe, la ministre a expliqué sur Europe 1 que la "traduction directe dans la loi" n'a pu être possible car de nombreuses propositions "ont dû être améliorées juridiquement". Des secteurs "disent 'Mon Dieu, il ne faut surtout rien bouger' mais notre rôle, c'est de rassurer tout le monde (...) et montrer qu'on ne laisse personne sur le bord du chemin et cette réforme, on va la faire", a ajouté Barbara Pompili. Outre les 40% de propositions de la CCC transcrites dans la loi, selon le gouvernement 20% figurent dans le budget 2021, 10% doivent être adoptées par voie réglementaire, 5% relèvent de négociations internationales et le reste d'"autres modalités". Une cinquantaine sont déjà mises en oeuvre ou sur le point de l'être, selon un "tableau de bord" du gouvernement.
Lors de son interview au média en ligne Brut ce 4 décembre, Emmanuel Macron jugeait normal d'évaluer toutes les conséquences des propositions de la CCC et de ne pas les adopter telles quelles. "Je ne veux pas dire que parce que les 150 citoyens ont écrit un truc, c'est la Bible ou le Coran", a taclé le président, se disant "très en colère contre des activistes qui m'ont aidé au début et qui disent maintenant, il faudrait tout prendre".
"Détricotages"
Une pique envers le réalisateur Cyril Dion, un des "garants" de la CCC, qui a lancé une pétition pour "sauver la Convention" avec 335.000 signataires en deux semaines. "Les détricotages se multiplient", a répliqué Cyril Dion dans Le Monde. "Ce que nous - signataires de cette pétition - vous demandons n'est ni un 'sketch', ni une trahison, ni une 'solution de fainéant', mais simplement de tenir parole", a-t-il dit, reprenant des termes utilisés par le chef de l'État. Car "c'est le socle de nos démocraties", a-t-il ajouté. Le député Matthieu Orphelin a déploré sur Twitter l'absence du "processus de co-construction qui avait été promis".
Les membres de la CCC sont partagés. Pour Grégoire Fraty, "ce projet de loi ne sera pas une fin en soi, mais un socle, permettant aux parlementaires de continuer le débat". Il dit attendre de "pouvoir juger 'sur pièces' ce projet de loi". Isabelle Robichon est beaucoup plus critique. Elle voit ces réunions comme de "simples chambres d'enregistrement" des choix du gouvernement. Selon elles, certains citoyens ont décidé de les boycotter. Concernant un échange prévu en fin de semaine avec Emmanuel Macron, "nous ne sommes même pas au courant", déplore-t-elle auprès de l'AFP, rappelant que les membres de la CCC sont volontaires et ont à côté leur travail et leur vie de famille à gérer.
15 mesures structurantes listées par le Réseau action climat
Les ONG du Réseau action climat (RAC) ont listé 15 mesures de la CCC "parmi les plus structurantes" et qui doivent selon elles absolument figurer dans le projet de loi. Parmi elles, l'interdiction de publicité pour les produits les plus émetteurs de gaz à effet de serre, "réduire durablement le trafic aérien", interdire la vente de véhicules neufs très émetteurs tout en soutenant l'achat de véhicules propres, instaurer "une obligation de rénovation énergétique globale des logements", proposer "un choix végétarien quotidien dans la restauration collective publique", "taxer les engrais chimiques" ou encore "accompagner la reconversion des entreprises".