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Contentieux des fonctionnaires : des collectivités vont expérimenter la médiation avant le recours au juge

Dans le cadre d'une expérimentation qui durera deux ans, des centres de gestion de la fonction publique territoriale vont assurer une médiation dans le but de résoudre les différends entre les fonctionnaires territoriaux et leur employeur. La démarche sera systématiquement engagée lors de toute saisine du juge.

En cas de litige avec l'administration, une médiation est parfois plus adaptée et rapide que le recours au juge. C'est cette idée qui, au moment de la discussion de la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle, promulguée en novembre 2016, a conduit le législateur à conforter la médiation dans le domaine de la justice administrative. Elle l'a aussi amené à prévoir, dans la loi, l'expérimentation d'une médiation, préalablement à la saisine du juge, pour les recours contentieux formés par les fonctionnaires à l'encontre des actes relatifs à leur situation personnelle. Cette médiation ayant un caractère obligatoire.
L'expérimentation concernera tous les agents du ministère des Affaires étrangères, des agents du ministère de l'Education nationale (dans un nombre limité d'académies), ainsi que certains fonctionnaires territoriaux, indique un décret du 16 février qui, en application de la loi, détermine les modalités de l'opération.

Des collectivités de 46 départements

Deux arrêtés ministériels qui paraîtront prochainement fourniront la liste des circonscriptions dans lesquelles les administrations de l'Education nationale et des collectivités territoriales pourront participer à la démarche. D'après des informations révélées en décembre par le vice-président du Conseil d'Etat, il s'agira de 3 académies pour les litiges concernant le personnel de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur et de 46 départements pour ceux qui sont relatifs à la fonction publique territoriale. Dans ces départements, les collectivités qui le souhaiteront, prendront une délibération, puis se rapprocheront du centre de gestion de la fonction publique territoriale, afin de conclure une convention avant le 1er septembre prochain.
Dans les départements retenus, cet établissement public spécialisé dans la gestion des ressources humaines assurera, en effet, la mission de médiation préalable obligatoire, et ce au titre de sa mission facultative de conseil juridique. Un ou des agents rémunérés et placés sous l'autorité hiérarchique du centre de gestion tenteront de favoriser la résolution amiable des différends opposant les fonctionnaires et leur employeur sur l'un des aspects suivants : certains éléments de la rémunération, les refus de détachement ou de placement en disponibilité, les réintégrations, le classement à l’issue d’un avancement de grade ou d’un changement de cadre d'emplois, la formation professionnelle et l’adaptation des postes de travail. Les missions exercées par les médiateurs et les qualités qui sont attendues d'eux seront précisées dans une charte dédiée que les centres de gestion ont préparée.
L'agent devra saisir le médiateur dans le délai de recours contentieux de deux mois. L'autorité administrative devra "informer l'intéressé de cette obligation et lui indiquer les coordonnées du médiateur compétent". A défaut, le délai de recours contentieux ne courra pas à l'encontre de la décision litigieuse. Pour la saisine, l'agent remettra au médiateur une lettre comportant, "lorsque la décision contestée est explicite, une copie de cette décision ou, lorsqu'elle est implicite, une copie de la demande ayant fait naître cette décision".

Réduction des délais

L'expérimentation sera limitée dans le temps : elle ne visera que les "recours contentieux susceptibles d'être présentés jusqu'au 18 novembre 2020" à l'encontre des décisions individuelles administratives intervenues "à compter du 1er avril 2018". Durant ce temps, les centres de gestion pourraient avoir à traiter, selon les territoires, "entre une dizaine et plus d'une centaine de dossiers de médiation par an", indique la Fédération nationale des centres de gestion.
Au plus tard en mai 2020, le ministre de la Justice élaborera un rapport d'évaluation sur l'expérimentation et le remettra au Parlement et au Conseil commun de la fonction publique. Au vu des résultats, le législateur aura alors, sans doute, à décider de la généralisation ou non de la médiation préalable obligatoire pour les contentieux des fonctionnaires, voire pour d'autres domaines de la justice administrative.
Sans attendre ce rapport, le Conseil national des barreaux et le Conseil d'Etat se réjouissaient, lors d'une conférence de presse commune le 13 décembre dernier, des résultats encourageants des médiations conduites depuis début 2017 pour les litiges administratifs. Sur les 353 médiations engagées à cette date, 104 étaient terminées : 65 avaient abouti à un accord (soit 63%) dans un délai de 3 à 4 mois. Un temps très court, puisque le délai de jugement moyen des affaires ordinaires devant les tribunaux administratifs est de 1 an et 10 mois.

Référence : décret n° 2018-101 du 16 février 2018 portant expérimentation d'une procédure de médiation préalable obligatoire en matière de litiges de la fonction publique et de litiges sociaux.

 

 

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