Congrès des maires – L'AMF réclame "l'annulation" de toutes les économies sur les collectivités

Dès l'ouverture, ce 19 novembre, du 106e congrès des maires qui se tient durant trois jours porte de Versailles à Paris, les responsables de l'Association des maires de France (AMF) ont fait monter la pression pour tenter d'obtenir de la part du gouvernement le maximum de clémence sur les économies exigées des collectivités locales en 2025, et singulièrement du bloc communal.

Aujourd'hui, avec une "ponction" sur les budgets locaux fixée "entre 10 et 11 milliards d'euros" au total, "le budget qui nous est proposé pour 2025 est le pire des budgets qu'on connaisse depuis que les budgets des collectivités existent", s'est alarmé André Laignel, premier vice-président délégué de l'association, lors d'une conférence de presse. Il a déclaré "tirer la sonnette d'alarme". Avec le budget en préparation, "nous sommes au-delà des contrats de Cahors" qui s'étaient appliqués en 2018 et 2019 pour limiter les dépenses des plus grandes collectivités, a abondé Murielle Fabre, maire de Lampertheim et secrétaire générale de l'AMF.   

"Ça ne peut pas servir le pays"

"C'est une erreur de stratégie économique que de pénaliser les acteurs qui sont les plus efficaces sur le plan de la gestion publique. (…) Ça ne peut pas servir le pays", a déploré Philippe Laurent, maire de Sceaux et vice-président de l'AMF. Un "effondrement de leur investissement" guette les collectivités locales en 2025, a redouté pour sa part Emmanuel Sallaberry, maire de Talence et co-président de la commission Finances de l’AMF. Face à la baisse brutale des dotations à partir de 2014, les élus locaux avaient fortement freiné les dépenses d'équipement de leurs collectivités, a-t-il été rappelé. 

Depuis, l'investissement du bloc communal a connu une reprise certaine. Sur les quatre premières années du mandat actuel, il dépasse de 6% - en euros constants, c'est-à-dire en éliminant les effets de l'inflation - les dépenses engagées dans ce domaine sur les quatre premières années du mandat précédent, comme le révèle une étude de l'Observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGL) présentée ce 19 novembre.

Mais l'essoufflement de l'investissement public local pourrait mener la France "vers la récession" en fin d'année prochaine et aggraver les difficultés de secteurs économiques comme le bâtiment et les travaux publics, a souligné André Laignel, citant des prévisions de l'OFCE. 

Situation déjà dégradée

Les mesures d'économies envisagées par le gouvernement pourraient aggraver une situation qui est déjà dégradée pour ce qui concerne les communes. Au 30 septembre, l'épargne brute de ces dernières – c'est-à-dire la différence entre leurs recettes et leurs dépenses de fonctionnement – a plongé de 20% par rapport à la même période de l'an dernier, indique l'AMF dans une étude présentée à la presse. Mais l'épargne brute des intercommunalités est, elle, en augmentation de plus de 10%, complète-t-elle. 

L'insécurité financière liée au remplacement ces dernières années de recettes locales par des fractions d'impôts nationaux n'arrange rien, a regretté le maire d'Issoudun. Annoncée à + 4,8% par la direction générale des finances publiques en début d'année, l'évolution de la TVA en 2024 ne sera finalement que de + 0,8%. Les intercommunalités n'ont reçu que tout récemment les "avis" les informant de cette modification. Par exemple, la communauté de communes du Pays d'Issoudun (20.000 habitants) enregistrera une baisse de produit de 175.000 euros. "Nous sommes censés ajuster [notre budget] d'ici le 31 décembre", s'insurge André Laignel. L'AMF pointe aussi "les injonctions contradictoires de l'État" sur la transition écologique : les collectivités sont encouragées à investir dans ce domaine, mais en même temps le projet de budget pour 2025 prévoit un fort recul des subventions de l'État qui leur sont allouées (1,5 milliard d'euros de moins sur le fonds vert, baisse de 130 millions d'euros des crédits des agences de l'eau et recul de 500 millions d'euros du budget de l'Ademe).

"Pas de faux cadeaux !"

Alors que la discussion sur le projet de loi de finances pour 2025 débutera le 25 novembre dans l'hémicycle du Sénat, le président de cette assemblée, Gérard Larcher, a estimé dans une interview au Journal du dimanche que l’effort budgétaire demandé aux collectivités locales doit être réduit à 2 milliards d’euros, au lieu des 5 milliards prévus par le gouvernement. Les responsables de l'AMF ont plaidé pour leur part ce 19 novembre pour "une annulation totale" des mesures d'économies ciblant les collectivités. 

Les élus s'attendent à ce que le Premier ministre, Michel Barnier, annonce le 21 novembre dans son allocution de clôture du congrès un certain nombre de mesures destinées à alléger la facture pour les communes et leurs intercommunalités. Mais ils auront un regard critique, préviennent-ils. Un renoncement à la réduction de la part "rétroactive" du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) – c'est-à-dire celle qui est allouée pour les investissements réalisés en 2023 ou 2024 – serait "le type même du faux cadeau", selon André Laignel. "La rétroactivité dans ce domaine est anticonstitutionnelle et ils le savent [au gouvernement]", précise-t-il. En sachant que Michel Barnier a d'ores et déjà annoncé ce renoncement il y a quelques jours aux élus départementaux réunis pour leurs Assises (voir notre article du 15 novembre).

En milieu de journée, ce 19 novembre, les maires devaient ceindre leur écharpe tricolore pour figurer sur une même photo, en signe de leur unité (voir aussi notre autre article de ce jour). "Le congrès doit être un point de départ et non un point d'arrivée", déclarait André Laignel, en affichant sa détermination.

 

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