Congrès des maires – Inflation, démocratie, violences… des élus inquiets
À la veille du Congrès des maires, le Cevipof et l'AMF publient les résultats d'un sondage auprès des maires sur quatre grandes thématiques : leur environnement de travail, les relations État-communes, la crise énergétique et les "crispations démocratiques".
"Une crise succède à l'autre", écrit Martial Foucault, le directeur du Cevipof, le centre de recherche de Sciences Po, en introduction de la présentation des résultats d'un sondage réalisé avec l'Association des maires de France (AMF) auprès de quelque 3.700 maires. Crise énergétique, mais aussi crise démocratique, témoigne cette étude transverse (62 questions autour de quatre thématiques : "l’environnement de travail du maire, les relations entre l’État et les communes, la gestion de la crise énergétique et les crispations démocratiques") publiée à la veille du Congrès des maires.
S'agissant de la crise énergétique, l'inquiétude est nette. 35% des sondés se disent "très préoccupés", 42% sont "préoccupés". Les actions prévues sont nombreuses, à commencer, comme l'ont déjà montré d'autres études, par la réduction de l'intensité ou l'amplitude de l'éclairage public (90%). Mais aussi : réduction du chauffage dans les installations sportives (86%) ou les bâtiments municipaux (81%), réduction de l'usage des véhicules de services (34%), restriction des horaires (30%) voir fermeture provisoire (13%) d'équipements sportifs…
Le sujet a évidemment aussi des répercussions sur d'autres postes de dépenses : "Plus d’un maire sur deux (54%) prévoit de réduire les dépenses d’achat de fourniture et de prestations extérieures. Pour 40% d’entre eux, ils envisagent de renoncer ou reporter les projets de recrutement de personnels et enfin ils sont 33% à couper dans les dépenses consacrées à la voirie", résume l'enquête.
Deuxième volet : la "gouvernance territoriale". 45% des élus souhaiteraient que l'on aille "beaucoup plus loin" en termes de "libertés ou compétences locales". Et ils sont 78% à considérer que "les décisions politiques locales doivent être différentes au niveau de chaque territoire". En outre, 60% regrettent le trop grand nombre de doublons entre État et collectivités et 55% sont plus ou moins prêts à affirmer que "l'État doit complètement renoncer aux compétences qu'il a décentralisées".
Au chapitre démocratie, c'est tout d'abord l'abstention électorale qui interroge : 83% des maires disent aujourd'hui leur inquiétude face au faible taux de participation dans leur commune lors des dernières législatives. S'agissant, en revanche, de l'abstention lors des municipales de 2020, ils ne sont plus que 40% à se dire inquiets.
Parallèlement à cela, les maires sont nombreux à évoquer "une polarisation politique de plus en plus marquée" et "un durcissement des opinions" parmi les administrés. Principalement en cause selon eux, les "fractures territoriales" (55%), les inégalités économiques et sociales (53%), l'insécurité (37%), l'immigration (34%), les questions environnementales (29%)…
Vient, enfin, la question des tensions vis-à-vis des élus eux-mêmes. Plus d'un maire sur trois dit avoir déjà été victime de menaces ou d'injures, un chiffre en nette augmentation : 39% déclarent avoir reçu des menaces, verbales ou écrites, soit 11 points de plus qu'en 2020. Ils sont aussi 37% à mentionner des injures ou insultes, en progression de 8 points. Et 63,1% disent avoir été victimes "d'incivilités", terme regroupant des réalités allant de l'impolitesse à l'agression, 10 points de plus qu'en 2020. "Ces chiffres, certes déclaratifs et donc différents des plaintes déposées, confirment la difficulté croissante des maires à faire respecter le droit mais plus encore à trouver des parades au non-respect de l'autorité", écrit Martial Foucault. Car face aux incivilités, "beaucoup de maires n’ont pas les moyens d’agir", témoignait récemment Murielle Fabre, secrétaire générale de l’AMF (voir notre interview).