Refondation de l'école - Collèges et lycées : des pistes pour réussir son contrat tripartite
"Il faut accepter qu'il y ait des différences entre territoires d'une même région (ou académie)", estime Catherine Bertin, chef du service Education à l'ADF. Le tout étant de tendre à "une mise en cohérence des politiques éducatives des collectivités et de l'Etat", selon les termes de Jean-Charles Ringard, inspecteur général de l'administration de l'Education nationale et de la recherche (IGAENR). Les deux s'exprimaient, avec une dizaine d'autres intervenants, dans le cadre d'une conférence-débat intitulée "Vers un contrat tripartite Eple, académie, collectivité territoriale", organisée par Education et territoires le 26 novembre 2013, en partenariat avec AEF et le SNPDEN-Unsa (Syndicat national des personnels de direction de l'Education nationale).
Petit rappel. La loi pour la refondation de l'école du 8 juillet 2013 donne la possibilité à la collectivité territoriale "si elle le souhaite" d'être partie prenante du contrat d'objectifs conclu entre l'établissement public local d'enseignement (Eple) et l'autorité académique. Dans l'annexe de cette loi, le gouvernement indique que les contrats d'objectifs des Eple "doivent devenir tripartites". Dès lors, que mettre dedans et comment s'y prendre ?
Des objectifs, rien que des objectifs ?
Les contrats d'objectifs tripartites doivent rappeler les compétences et les "responsabilités" de chaque partie, établir un "diagnostic partagé" et définir trois à cinq objectifs jugés "prioritaires" et "clairs", sur une durée "raisonnable" de trois ans, selon l'inspecteur général Jean-Charles Ringard. Des objectifs en commun et "suffisamment clairs pour être opérationnels", insiste cet ancien directeur général délégué en charge de l'éducation, de l'offre de formation et de l'emploi de la région Pays de la Loire.
Ils doivent intégrer "des contenus qui impliquent directement les collectivités" sur des "compétences partagées", "là où il y a des chevauchements", complète Martine Pavot, directrice générale adjointe en charge de l'éducation et de la jeunesse de la région Nord-Pas-de-Calais.
Le SNPDEN souhaiterait bien aussi y trouver des engagements sur les moyens. "On ne demande pas de moyens supplémentaires, de toute façon il n'y en a pas !", précise son secrétaire général, Philippe Tournier. Ce qui n'empêche pas que "les moyens doivent être clairement inclus, en particulier les moyens dédiés aux actions prioritaires", et ce pour donner de la "visibilité". Une position que ne partage pas Jean-Charles Ringard, qui souhaite que le contrat se contente d'"énoncer les objectifs prioritaires partagés".
Conduite de changement
Associer collectivités et communauté éducative en amont de la signature apparaît naturellement comme une condition de réussite des contrats d'objectifs tripartites. Mais un "cadrage national" (un travail serait en cours avec l'ARF) ne suffit pas et Jean-Charles Ringard rappelle "qu'un contrat qui relève de l'injonction descendante n'est pas un contrat".
Jean-Louis Baglan, Dasen du Rhône, a beau dire que "ces contrats engagent les équipes, les enseignants", Philippe Tournier, secrétaire général du SNPDEN-Unsa prévient que "Si on convoque en urgence un CA [sur le contrat d'objectifs tripartite de l'établissement], on va vers l'échec prévisible", par manque d'adhésion de l'équipe enseignante. Selon lui, "la question concrète de la conduite du changement est une condition du changement".
Quant à la question des modalités d'évaluation et de la pertinence à les préciser dans le contrat, Jean-Charles Ringard défend une évaluation " interne et externe", tandis que Jean-Louis Baglan préfère la formule d'"une autoévaluation qui elle-même débouchera sur un nouveau contrat". Philippe Tournier plaide quant à lui pour "une approche d'audit", sur la base d'une démarche réussie menée par l'académie de Lille.
La fin de la convention Eple/collectivité ?
Pour Philippe Tournier, la convention actuelle liant l'établissement à la collectivité pourrait devenir "un chapitre du contrat tripartite". Ce qui permettrait de mentionner "l'apport des moyens de la collectivité y compris sur les transports".
Autres exemples d'objectifs prioritaires, avancés par Jean-Charles Ringard : "la réduction des inégalités scolaires", "l'articulation écoles-collège". Ou encore "des aspects très prosaïques" comme "le numérique", complète Martine Pavot, ainsi que la politique de restauration scolaire et de nutrition ou encore l'utilisation des locaux.
Dès lors, le contrat d'objectifs signerait-il la fin des projets d'établissement ? "À terme, estime Philippe Tournier, le contrat tripartite doit être le seul document". Selon lui, les contrats d'objectifs seraient bien trop "lourds" à construire s'ils s'ajoutent à d'autres documents (convention avec la collectivité, projet d'établissement "interne" à l'Eple), mais moins s'ils les fusionnent.
Jean-Charles Ringard semblent quant à lui considérer que contrats d'objectifs et projets d'établissements peuvent cohabiter dans la mesure où le contrat "tient compte d'objectifs en cohérence avec le projet d'établissement".