Commande publique - CJCE : le critère de l'intérêt transfrontalier certain impose un contrôle des offres anormalement basses

Dans un arrêt du 15 mai 2008, la Cour de justice des Communautés européennes précise que pour les marchés de travaux inférieurs au seuil communautaire et revêtant un intérêt transfrontalier certain, le pouvoir adjudicateur doit contrôler le contenu des offres anormalement basses.

L'affaire est relative à la disposition d'une loi italienne sur les offres anormalement basses. Pour les marchés de travaux en dessous des seuils communautaires, les pouvoirs adjudicateurs italiens ont l'obligation de procéder à l'exclusion automatique des offres anormalement basses si le nombre d'offres valides est supérieur à cinq. Dans ce cas, ils n'ont pas à demander de précisions sur ces offres auprès des soumissionnaires.

La directive 2004/18 CE ne s'appliquait pas puisque les seuils n'étaient pas franchis. Par contre, les pouvoirs adjudicateurs devaient respecter les règles et principes fondamentaux du traité CE lorsque le marché présentait un intérêt transfrontalier certain.

 

L'intérêt transfrontalier

Il appartient alors au pouvoir adjudicateur d'apprécier l'existence ou non d'un intérêt transfrontalier certain avant la définition des termes de l'avis de marché. Un marché de travaux pourrait, par exemple, présenter un intérêt transfrontalier en raison de sa valeur estimée en lien avec sa technicité ou sa localisation. La Cour évoque également la situation où un marché de faible valeur présenterait quand même un intérêt transfrontalier certain parce que les frontières traversent des agglomérations situées sur le territoire d'Etats membres différents. Selon la Cour de justice, la définition de critères objectifs indiquant l'existence d'un intérêt transfrontalier certain pourrait relever d'une réglementation au niveau national ou local. Pour les marchés de travaux inférieurs au seuil communautaire et revêtant un intérêt transfrontalier certain, la disposition italienne est contraire au principe de non-discrimination des opérateurs économiques. Le pouvoir adjudicateur doit contrôler le contenu des offres anormalement basses. Des entreprises pourraient sinon être écartées alors qu'elles sont en mesure de formuler une offre compétitive, sérieuse et fiable. La Cour donne l'exemple d'entreprises soucieuses de comprimer leurs marges bénéficiaires afin de pénétrer le marché ou encore d'entreprises bénéficiant d'économies d'échelle importantes.

Cependant, même en présence d'un intérêt transfrontalier certain, la vérification de la composition d'un trop grand nombre d'offres anormalement basses ne doit pas mettre en danger la réalisation du projet. Un seuil raisonnable pour l'exclusion automatique pourrait alors être fixé par une réglementation nationale ou locale, ou par le pouvoir adjudicateur lui-même.

Pour rappel, le code des marchés publics de 2006 impose aux pouvoirs adjudicateurs de respecter une "procédure adaptée" pour les marchés en dessous des seuils. Les pouvoirs adjudicateurs doivent ainsi déterminer les modalités de publicité et de mise en concurrence qui leur paraissent de nature à garantir le respect des principes fondamentaux. Les pouvoirs adjudicateurs tiennent compte de la nature et des caractéristiques du besoin à satisfaire, du nombre ou de la localisation des opérateurs économiques susceptibles d'y répondre ainsi que des circonstances de l'achat.

 

L'APASP

 

Référence: CJCE, 15 mai 2008, SECAP SpA c/Comune di Torino, C-147/06.

 

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