Certificat de projet dédié aux friches : un décret ouvre enfin la voie à l’expérimentation
Un décret, paru ce 22 mai, instaure, par le biais d’une expérimentation triennale, jusqu’au 31 mai 2027, un certificat de projet sur les friches. Ce dispositif présente la particularité de pouvoir être couplé à un certificat d’urbanisme "opérationnel" se prononçant sur la faisabilité du projet.
Plus de dix-huit mois après sa mise en consultation publique, le décret relatif à l'expérimentation d'un certificat de projet dans les friches est paru au Journal officiel ce 22 mai - avec entrée en vigueur au 1er juin 2024 -, au lendemain de sa présentation en conseil des ministres par le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires et son ministre délégué au Logement. Dans cet intervalle de temps, un autre décret est venu préciser les deux critères cumulatifs introduits à l’article L.111-6 du code de l’urbanisme pour définir la notion de friche (lire notre article du 8 janvier 2024). Un préalable nécessaire, certainement à l’origine du retard pris (l’objectif de publication était fixé à décembre 2022), pour finaliser ce nouvel outil visant à faciliter et sécuriser les projets de reconversion de friches.
Ce dispositif expérimental mis en place sur trois ans (soit jusqu’au 31 mai 2027) par la loi Climat et Résilience (art. 212) au bénéfice des opérations de réhabilitation menées sur les friches s'inscrit dans la poursuite de l'objectif du "zéro artificialisation nette" (ZAN). Il est présenté comme un outil "facilitateur" permettant de "mieux accompagner les porteurs de projet dans l’application des différentes procédures réglementaires par le concours des services de l’Etat". Le décret précise les modalités de dépôt de la demande de certificat de projet dans les friches, adressée au préfet de département, et le contenu de celle-ci. Il définit également les modalités d'instruction et de délivrance du certificat via un guichet unique auprès des préfectures de département pour les porteurs de projet (collectivités, aménageurs, opérateurs privés…).
Effet de cristallisation du droit applicable
L’objectif est donc de leur éviter d’avoir à solliciter en parallèle auprès d’autorités différentes un certificat de projet et un certificat d’urbanisme. "Cet outil permet de faire un état des lieux des normes concernées (urbanisme, environnement, patrimoine)", relève le ministère dans le compte rendu du conseil des ministres. Il emporte également des effets de cristallisation du droit applicable en matière d’urbanisme - à l’instar d’un certificat d’urbanisme - permettant de "donner de la visibilité au porteur de projet". Ces différents aspects distinguent d'ailleurs ce certificat de projet de celui qui existe déjà (introduit dans le cadre de la réforme de l’autorisation environnementale par l’ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017- lire notre article).
Possibilité de solliciter conjointement un certificat d’urbanisme
C’est une autre particularité du dispositif. S’il le souhaite, le porteur de projet peut présenter, en complément de sa demande de certificat de projet "friches", une demande d’examen au "cas par cas" et/ou de cadrage préalable (au titre de l’évaluation environnementale) ou solliciter un certificat d’urbanisme "opérationnel" se prononçant sur la faisabilité de l’opération. Ces demandes conjointes sont alors, s’il y a lieu, transmises à l’autorité administrative compétente pour statuer et les décisions prises avant l'intervention du certificat de projet sont annexées à celui-ci.
Concernant ce certificat d’urbanisme, il est introduit un délai d’échange minimal de trois mois entre le préfet et la collectivité territoriale compétente en matière de délivrance des autorisations d’urbanisme. Le préfet transmet sans délai la demande du certificat d’urbanisme au maire afin qu’il lui affecte un numéro d’enregistrement, précise le décret. La procédure d'instruction des certificats d'urbanisme délivrés au nom de l'Etat prévoit que les observations du maire sont recueillies par le service instructeur. Lorsque la décision est prise au nom de la commune ou de l'EPCI, l'instruction est effectuée au nom et sous l'autorité du maire ou du président de l'établissement public.
Eclairer sur le contexte administratif
Sur demande du pétitionnaire, les services instructeurs identifieront et listeront les procédures, régimes et décisions, applicables au projet (notamment en matière de participation du public et de compétence). Le certificat de projet rappellera les délais réglementairement prévus pour l’intervention des décisions et prévoira le cas échéant "un calendrier d’instruction global, articulant l’ensemble des procédures et pouvant ainsi être optimisé", souligne le ministère. Il est rappelé qu’il "engage la responsabilité de l’administration" lorsque l'inexactitude ou la méconnaissance des engagements du calendrier a pu porter préjudice au bénéficiaire du certificat.
Pour les délais d’intervention des décisions d’urbanisme, le décret précise à cet égard qu’ils correspondent aux délais d’instruction de droit commun (prévu par l'article R.423-18 du code de l’urbanisme).
Le préfet, lorsqu'il n'est pas compétent, recueille l'accord des autorités compétentes pour prendre ces décisions préalablement à la délivrance du certificat de projet. L’absence de réponse dans le délai de deux mois vaut accord, relève le décret. En cas de désaccord, la réponse de l’autorité compétente "est motivée et indique les délais à mentionner dans le certificat de projet", ajoute-t-il.
Le certificat de projet est établi et notifié au demandeur dans un délai de quatre mois suivant la date à laquelle il a été accusé réception du dossier complet de la demande. Ce délai peut toutefois être prolongé d'un mois par le préfet, qui en informe le demandeur "en motivant cette prolongation". Le défaut de notification du certificat de projet dans le délai prévu vaut "décision implicite de rejet".
Enfin, le certificat de projet peut utilement indiquer "des difficultés de nature technique ou juridique identifiées qui seraient susceptibles de faire obstacle à la réalisation du projet".
Un rapport d’évaluation est prévu au terme de la période d’expérimentation. Sa réalisation sera confiée à un comité d’évaluation comprenant "des représentants de l'administration et des représentants des maîtres d'ouvrage ayant participé à l'expérimentation, désignés par arrêté du ministre chargé de l’urbanisme", précise le décret.
Référence : décret n° 2024-452 du 21 mai 2024 relatif à l'expérimentation d'un certificat de projet dans les friches, JO du 22 mai 2024, texte n°34. |