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Projet de loi Elan - Centres-villes et commerce : le Sénat reste fidèle à la proposition de loi Bourquin-Pointereau

Lors de l'examen du projet de loi Elan en séance publique mardi 24 juillet, les sénateurs ont à nouveau examiné le volet commerce et centres-villes, adoptant plusieurs amendements contre l'avis du gouvernement. Des amendements qui reprennent souvent les principes de la proposition de loi Bourquin-Pointereau portant Pacte national pour la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs.

La séance publique sur le projet de loi Elan mardi 24 juillet après-midi a vu le gouvernement s'opposer aux sénateurs LR - majoritaires à la Haute Assemblée - sur plusieurs dispositions issues de la proposition de loi portant "Pacte national de revitalisation des centres-bourgs" des sénateurs Martial Bourquin (PS, Doubs) et Rémy Pointereau (LR, Cher), qui avaient été introduites lors de l'examen du projet de loi en commission. Le ministre de la Cohésion des territoires, Jacques Mézard, a regretté que les sénateurs se réfugient souvent derrière cette PPL pour rejeter la plupart des amendements du gouvernement.
Martial Bourquin, Rémy Pointereau et Jacques Mézard se sont notamment opposés sur le sujet des CDAC et des CNAC. Les membres de la Haute Assemblée considèrent en effet ces commissions comme des garde-fous dont disposeraient les territoires pour maintenir leur vitalité. Le poids des commissions départementales d'aménagement commercial permettant selon eux d'éviter que de nouvelles implantations ne viennent détruire le commerce indépendant dans les centres-bourgs. "Si on ne régule pas un minimum, on aura beau mettre des millions d'euros dans les centres-villes et les centres-bourgs, on ne changera rien à la dévitalisation de ces territoires", a affirmé Martial Bourquin.
"Si ces commissions avaient amené un supplément de vitalité dans ces centres-villes et avaient permis d'améliorer l'équilibre avec les périphéries, ça se saurait !", a rétorqué Jacques Mézard. Les sénateurs ont argué qu'ils souhaitaient changer le fonctionnement et la composition de ces commissions. Un amendement adopté à leur initiative en commission des affaires économiques renforce notamment la prise en considération du tissu local dans les CDAC par la présence d'acteurs socio-économiques. Il donne aussi la possibilité de recourir à l'expertise des chambres consulaires pour la réalisation d'études relatives à l'organisation du tissu économique, commercial et artisanal ou de consommation des terres agricoles.
"Considérer qu'une recomposition des CDAC serait l'alpha et l'oméga de la revitalisation des centres-villes me paraît complètement déconnecté de la réalité. Pour moi ce n'est absolument pas le cœur du sujet ", a toutefois considéré le ministre.
Au final, les amendements du gouvernement visant à supprimer les articles 54 bis B, 54 bis C, 54 bis G et 54 Ter A qui transposent des propositions de la PPL Bourquin-Pointereau dans Elan ont tous été rejetés par les sénateurs.

 

Les principaux amendements adoptés entre l'article additionnel après l'article 53 quater C et l'article 55 du projet de loi Elan. Sauf mention contraire, ils ont été déposés par la rapporteure Dominique Estrosi Sassone (LR, Alpes-Maritimes).

CONSTRUCTION DE LOGEMENTS DANS LES ORT FACILITÉE (art. 54). L'amendement n°1145 rectifié en cours de séance vise à favoriser la construction de logements locatifs ou de location-accession financés avec un prêt aidé par l'État dans les centres-villes faisant l'objet d'une ORT. Il donne la possibilité à l'autorité compétente pour délivrer les autorisations d'urbanisme de déroger aux règles de densité, d'aires de stationnement et de gabarit prévues par le document d'urbanisme existant, "sous réserve que le projet s'intègre harmonieusement dans le milieu urbain environnant et, lorsqu'il est contigu à une construction existante, qu'il ne dépasse pas la hauteur de celle-ci calculée à son faîtage".

DROIT DE PRÉEMPTION URBAIN AUTOMATIQUE DANS LES ORT (art. 54). L'amendement n° 253 rect bis porté par Martial Bourquin et Rémy Pointereau complète la définition du dispositif ORT, la rapprochant de "l'opération de sauvegarde économique et de redynamisation" votée à l'unanimité par le Sénat dans le cadre de l'adoption de leur proposition de loi. Il précise le dispositif de l'ORT en prévoyant que son périmètre est automatiquement un périmètre de sauvegarde du commerce et de l'artisanat de proximité, et un périmètre de mise en œuvre du droit de préemption urbain. "Il évite ainsi aux collectivités d'avoir à prendre de nouvelles délibérations", justifient les deux sénateurs.

ÉVALUATION PERIODIQUE DES ORT (art. 54). L'amendement n°1146 propose un bilan annuel et une évaluation tous les cinq ans des actions entreprises dans le cadre d'ORT, ainsi que de leurs incidences financières. "Ces évaluations sont présentées aux conseils municipaux des communes et à l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre signataires de la convention".

PERMIS D'AMÉNAGER "MULTI-SITES" (art. 54). L'amendement n°1144 propose, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la loi Elan, d'autoriser dans le cadre des ORT, la délivrance de permis d'aménager "multi-sites", qui constitueraient une alternative aux ZAC. Dans ce cadre, "la totalité des voies et espaces communs inclus dans le permis d'aménager pourrait faire l'objet d'une convention de transfert au profit de la commune ou de l'EPCI compétent, l'enjeu étant d'éviter les problèmes de gestion et d'entretien des voies, espaces et équipements communs liés à une opération d'aménagement multi-sites, et les situations de blocage susceptibles d'en résulter".

AUTORISATION DES CDAC POUR LES COMMERCES ALIMENTAIRES (art. 54). L'amendement n° 950 rect. porté par Élisabeth Lamure (LR, Rhône) vise à maintenir, pour les commerces alimentaires de plus de 1.000 m², le passage en CDAC afin d'obtenir une autorisation pour s'implanter en centre-ville. S'il importe autant de maintenir le passage en CDAC pour ce type de commerce, c'est que la boulangerie ou la boucherie ou le primeur "constituent les premiers commerces implantés en centre-ville ou en centre-bourg et sont aussi le plus souvent les derniers commerces à se maintenir dans un centre-ville fragilisé", fait valoir l'exposé sommaire. Pour la sénatrice LR, "il ne faudrait pas qu'une grande surface alimentaire, qui plus est d'une taille qui lui permette de regrouper des produits similaires, vienne détruire le tissu commercial existant". Le gouvernement avait également déposé un amendement, prenant acte de la nécessité d'instaurer un seuil, qu'il proposait à 5.000 m², qui a été rejeté.

LE PRÉFET POURRA PRENDRE L'INITIATIVE DE SUSPENDRE UNE DEMANDE D'AEC (art. 54). L'amendement n° 255 rect ter porté par Martial Bourquin et Rémy Pointereau vise à permettre au préfet de suspendre l'enregistrement et l'examen d'une demande d'autorisation d'exploitation commerciale à sa propre initiative. La rédaction proposée par le texte gouvernemental modifié par la commission ne permet pas au préfet de le faire sans être saisi d'une demande.

AIRE DE STATIONNEMENT (ap. art. 54). L'amendement n° 1148 entend favoriser la rénovation de l'habitat existant en zone tendue, notamment dans des centres-villes de villes moyennes, y compris pour celles qui ne sont pas incluses dans le périmètre d'une ORT. Il supprime à cet effet l'obligation de créer de nouvelles aires de stationnement pour des travaux effectués sur des logements existants qui n'emportent pas de création de surface de plancher supplémentaire.

SOUTIEN AUX LIBRAIRIES DANS LES CENTRES-VILLES (ap. art. 54). L'amendement n° 32 rect bis défendu par Christine Lavarde (LR, Hauts-de-Seine) propose un dispositif facultatif d'accompagnement des librairies disposant du label de librairie indépendante de référence.

MOBILISATION DES LOCAUX VACANTS (ap. art. 54 bis AC). L'amendement n° 257 rect bis porté par Martial Bourquin et Rémy Pointereau reprend une nouvelle fois un dispositif de leur PPL, à l'exclusion de son volet fiscal relatif à la taxe sur les logements vacants. Il propose des mesures visant à permettre le retour sur le marché du logement des milliers de locaux inhabités en étages de commerce dans de nombreux centres-villes, et notamment l'interdiction des baux "tout immeuble" et l'interdiction de condamner les issues aux étages.

CONTRÔLE DES EXPLOITATIONS COMMERCIALES ILLICITES (art. 54 bis H). L'amendement n° 254 rect bis porté là encore par Martial Bourquin et Rémy Pointereau adopté contre l'avis du gouvernement vise à compléter le dispositif de contrôle du respect de la législation sur l'aménagement commercial. Il clarifie en premier lieu la conséquence de l'absence de délivrance d'un certificat attestant du respect de cette législation. Par ailleurs, l'amendement propose de compléter la base de données Icode, tenue par le ministère de l'Économie et des Finances, qui recense de nombreuses données sur les établissements dont l'activité principale exercée relève du commerce de détail. Cette base intégrerait les différents actes liés à des exploitations illicites (rapports, mises en demeure, amendes…), et faciliterait grandement le travail de contrôle des autorités et d'instruction des CDAC, mais assurerait aussi une égalité de traitement dans tous les départements.

MAINTIEN DU SEUIL D'INTERVENTION DE LA CDAC (art. 54 ter A) L'amendement n° 1147 maintient le seuil d'intervention de la CDAC à 1.000 m² à l'égard des ensembles commerciaux constitués de plusieurs commerçants indépendants qui n'exploitent qu'un espace de vente d'une superficie réduite, bien inférieure au seuil de 500 m2. "Certains sont parfois des producteurs qui trouvent dans ce type de surface commerciale un lieu de vente pour leur propre production", justifie la rapporteure Dominique Estrosi Sassone. 
 

 

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