Caisse des Dépôts : "Une année de transformation"
Présentant ce 11 avril les résultats 2018 de la Caisse des Dépôts, Eric Lombard, son directeur général, a insisté sur la mission de "lutte contre les fractures territoriales et les inégalités sociales" qu'une structuration en cinq "métiers", dont la Banque des Territoires, est venue réaffirmer. Il a en outre évoqué les multiples plans et programmes dans lesquels la Banque des Territoires est aujourd'hui engagée (plan logement, Action Coeur de Ville, Territoires d'industrie...) et a apporté des éléments de contexte sur les prêts en faveur du logement social et des collectivités. Pour les collectivités, des offres nouvelles répondant à des besoins spécifiques de financement seront annoncées le 6 juin prochain.
"2018 a été une année de transformation pour la Caisse des Dépôts", a d'emblée indiqué son directeur général, Eric Lombard, qui présentait ce 11 avril à la presse les résultats du groupe. Et une année au cours de laquelle la principale "mission" de la Caisse des Dépôts, celle de "lutter contre les fractures territoriales et les inégalités sociales", a plus que jamais été d'actualité. Le groupe a montré sa capacité à "apporter des éléments de réponse concrets" aux maux et inquiétudes qui traversent le pays, a estimé Eric Lombard. Et ce, tout en continuant à afficher de "très bons résultats" - un résultat net courant des Fonds d’épargne de 1,54 milliard d'euros et un résultat net part du groupe d’1,76 milliard sur la section générale.
Parce qu'il est important que le "modèle" de la Caisse des Dépôts "soit mieux compris", que "les Français sachent ce que nous faisons de leur argent", cette présentation des résultats a innové en agrégeant deux bilans : celui des fonds d'épargne et celui de la section générale. De quoi donner une vision d'ensemble simple des ressources de la Caisse : l'épargne centralisée (livret A etc.) pour 59%, les dépôts réglementés (professions juridiques notamment) pour 15%, les fonds propres pour 11%, auxquels s'ajoutent d'autres passifs pour 11%.
Quant à l'affectation des ressources, les grandes masses sont là encore clairement identifiables : celles-ci sont à 45% dirigées vers les prêts et investissement en faveur du logement social, des collectivités locales, de la politique de la ville et de l'économie mixte ; suivent les placements financiers (34%), les participations stratégiques (5%) et d'autres actifs (16%). En notant que l'activité de la Direction des retraites et de la solidarité est réalisée pour compte de tiers et ne figure donc pas dans ce découpage.
Cette "transformation" de la Caisse des Dépôts s'est traduite par sa structuration en cinq "métiers" et, notamment, par la création de la Banque des Territoires qui, lancée au printemps 2018, fédère désormais l'ensemble des activités et solutions de financement et d’accompagnement en faveur des territoires. Les autres "métiers" : retraites et solidarité, Bpifrance, gestion d'actifs, gestion des participations stratégiques.
Des plans et programmes ancrés dans les territoires
S'agissant de la Banque des Territoires, Eric Lombard a mis l'accent sur les programmes phares de l'année 2018 : le plan logement, le programme Action Cœur de ville, Territoires d'industrie, le programme Initiatives copropriétés… sans oublier le Grand plan d'investissement, avec un encours investi de 8 milliards d'euros à fin 2018 pour 1.520 projets engagés. "C'est considérable", commente le directeur général.
Les engagements en fonds propres dans les projets locaux ont représenté un investissement soutenu, à hauteur de 769 millions. A cela s'ajoute une forte hausse des crédits d'ingénierie (16,7 millions). Une hausse notamment portée par Action Cœur de Ville (6,9 millions) et ses 87 projets "en vivier" sur la base des 222 conventions signées avec "ces villes moyennes dans lesquelles vivent 25% des Français et sur lesquelles il n'y avait souvent pas eu d'investissement public d'envergure ces dernières années", selon les termes d'Eric Lombard.
Le nouveau programme en faveur des 136 "territoires d'industrie" représente quant à lui 100 millions d'investissements en fonds propres par an. Pour Eric Lombard, "il n'y a pas d'économie forte sans industrie forte" et sans emplois industriels ancrés dans les territoires.
En termes de prêts, le volume des prêts destinés au logement social s'est élevé l'an dernier à 11,7 milliards d'euros, correspondant à la production de 81.000 logements et à la réhabilitation de 122.000 autres. Une année marquée "par la réforme du secteur et le démarrage du plan logement", relève la Caisse des Dépôts, reconnaissant une baisse d'environ 23% du volume de ces prêts par rapport à 2017. "Deux facteurs" expliquent cette baisse, a rappelé Eric Lombard : principalement "le ralentissement de la production de logements sociaux", ainsi que certains "éléments de gestion" des organismes HLM. "L'accélération généralement constatée en fin d'année" sur la production de logements "ne s'est pas produite", confirme Marianne Laurent, directrice des prêts et de l'habitat. Concernant le nombre de réhabilitations, celle-ci relève que la baisse apparente entre 2017 et 2018 n'est en réalité pas significative dans la mesure où les bailleurs ont l'an dernier privilégié des "réhabilitations lourdes".
Olivier Mareuse, directeur des Fonds d'épargne, souligne pour sa part que les prêts de la Caisse des Dépôts sont "très longs", pouvant aller jusqu'à trente ou quarante ans – vingt-cinq ans pour les prêts à taux fixe –, et que sur "de telles durées", les taux liés à ceux du livret A restent "très compétitifs". "La question de la maturité est très importante, en réalité le prix n'est pas un vrai sujet". "L'encours a encore progressé, le stock est stable", ajoute-t-il.
En outre, le plan logement de 10 milliards d'euros annoncé en avril dernier pour accompagner les bailleurs sociaux est pleinement engagé avec, notamment, deux bailleurs sur trois concernés par le dispositif d'allongement de dette, pour un encours de 16 milliards d'euros. Concernant les prêts de haut de bilan, la totalité de l'enveloppe a été attribuée. Reste que le conventionnement avec Action Logement devant bonifier ces prêts en échange de droits de réservation de logements tarde dans certains cas à se concrétiser.
Collectivités : de nouveaux prêts "thématiques" bientôt dévoilés
Les prêts aux collectivités locales affichent pour leur part un volume de 1,1 milliard d'euros, dans un contexte marqué par la fin des prêts "croissance verte" et par un environnement concurrentiel accru. "Les banques commerciales sont revenues sur le marché des collectivités locales", "il n'y a plus de failles de marché", d'où un retour à "une activité plus modeste" pour la Caisse des Dépôts sur ce terrain-là, commente Eric Lombard. "Nous n'avons pas vocation à concurrencer les banques commerciales", souligne-t-il, ajoutant que la Caisse des Dépôts sera naturellement prête à "revenir" à l'avenir si un "besoin" en termes d'accès des collectivités au crédit devait à nouveau se faire sentir.
En outre, la Banque des Territoires est présente aux côtés des collectivités par "des enveloppes de prêts spécifiques, qui évoluent dans le temps, venant en appui des politiques publiques", rappelle Olivier Mareuse. On songe ainsi aujourd'hui à l'Aqua Prêt, offre de très long terme destinée aux réseaux d'eau et d’assainissement dont la rénovation est devenue une priorité. Et Olivier Sichel, directeur de la Banque des Territoires, d'annoncer que dans le même esprit que l'Aqua Prêt, de nouveaux prêts seront dévoilés le 6 juin prochain à l'occasion du "Printemps des Territoires", événement qui viendra marquer le premier anniversaire de la Banque des Territoires : des prêts en faveur des infrastructures de mobilité (telles que les ouvrages d'art) ainsi que "sur d'autres thématiques". Ces offres, "en train d'être finalisées" avec Bercy, porteront elles aussi "sur des durées très longues" pouvant aller jusqu'à quarante voire cinquante ans.
Interrogé sur le rapprochement avec La Poste en vue de la constitution d'un vaste "pôle financier public" – l'adoption définitive de la loi Pacte ce 11 avril marque une étape en ce sens –, Eric Lombard a souligné que chaque acteur restera "dans son mandat" et conservera la spécificité de sa vocation et de son réseau. De même, Olivier Sichel a relevé que la Banque des Territoires et la Banque Postale évoluent dans des logiques de financement différentes et complémentaires, la Banque Postale intervenant essentiellement sur des "financements courts" et n'étant pas présente sur le terrain de l'investissement dans les projets portés par les collectivités.
Retraites, solidarité et formation
L'un des "métiers" de la Caisse des Dépôts connaissant des évolutions importantes dans son activité est le pôle Retraites et solidarité. Ceci, d'une part, sur le volet formation professionnelle, avec la mise en place du portail unifié Compte personnel formation et Compte personnel d’activité. "33 millions de comptes ont été ouverts et vont être alimentés à travers une application sur laquelle nous travaillons", a indiqué Eric Lombard.
En outre, la future réforme des retraites implique d'ores et déjà un dialogue renforcé avec de nouveaux régimes de retraites, au-delà de ceux dont la Direction des retraites et de la solidarité assure déjà la gestion (CNRACL, Ircantec, RAFP…). "La réforme va susciter une convergence des régimes ; nous pouvons accompagner ces transitions pour les régimes que nous gérons, mais aussi pour d'autres", explique le directeur général.
Enfin, de nouveaux projets sont en cours dans les domaines du vieillissement et du handicap, la Caisse des Dépôts travaillant par exemple avec la CNSA "pour développer un meilleur accès aux droits".