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Fonds européens - Budget européen : la France espère aussi un chèque

Une rallonge d'un milliard d'euros serait nécessaire pour une dizaine de régions françaises, victimes collatérales du budget 2014-2020, plus que jamais disloqué par les revendications contradictoires des 27.

Les négociations budgétaires pour 2014-2020 entrent dans leur dernière ligne droite, phase critique où les Etats rangent l'esprit européen au placard pour s'adonner à ce qu'ils maîtrisent le mieux : la défense des intérêts nationaux.
Paris n'échappe pas à cette règle. Première à dénoncer les effets pervers du chèque britannique (entre 3 et 4 milliards d'euros annuels) et les multiples rabais parallèles dont bénéficient l'Allemagne, la Suède, les Pays-Bas ou encore l'Autriche, la France pourrait se résigner à recourir au même type de procédé.
Mis bout à bout, le scénario budgétaire brossé par Herman Van Rompuy fait ombrage aux régions françaises, qui craignent d'être les dindons de la farce. Après avoir encouragé une baisse globale des fonds régionaux européens, la France milite désormais pour une répartition plus favorable.

Discorde entre la France et l'Allemagne

Un problème majeur a été repéré pour les régions en transition, ces territoires dont le PIB par habitant oscille entre 75% et 90% de la moyenne européenne. Pour tenir compte de leur particularité, la Commission européenne offrait une manne de 39 milliards d'euros, particulièrement attendue par les régions françaises. Elles seraient une dizaine à pouvoir en bénéficier : Picardie, Basse-Normandie, Nord-Pas-de-Calais, Lorraine, Franche-Comté, Poitou-Charentes, Limousin, Auvergne, Languedoc-Roussillon, Corse.
Problème, ce montant a été revu à la baisse (31 milliards d'euros) et la répartition globale des fonds structurels continue de susciter des tensions. Du fait de leur progression économique, certaines régions ont vu leur PIB par habitant passer au-delà du seuil de 75% de la moyenne communautaire.
Plus riches qu'avant, ces territoires veulent pourtant continuer à se tailler la part du lion en réclamant le versement des deux tiers de la somme des fonds structurels qu'ils perçoivent sur la période allant de 2007 à 2013.
Un sujet de discorde entre l'Allemagne - fervente partisane de ce "filet de sécurité" profitable à ses Länder de l'Est -, et la France, qui voudrait supprimer ce bonus pour seulement faire varier les montants des subventions européennes en fonction du PIB réel des régions.
Dans le cas contraire, certains territoires (Länder allemands, région de Varsovie ou encore de Bucarest, etc.) risquent de percevoir proportionnellement plus de fonds européens que les régions françaises même si leur PIB est bien supérieur à ces dernières...

Coup de pouce ou coup de frein ?

Ces comptes d'apothicaire débouchent sur un scénario surréaliste pour les régions en transition de l'Hexagone : l'obtention de ce statut spécial, objet de démarches de lobbying intense des présidents de région, pourrait se retourner contre ses propres instigateurs.
Quatre milliards d'euros sont susceptibles d'être affectés aux dix régions françaises concernées, ce qui ne représente pas de progression par rapport à ce qu'elles auraient pu percevoir en étant placées dans la catégorie des régions riches...
Pis, les murs étanches dressés entre les différentes catégories empêcheront l'Etat de redéployer les fonds selon le principe de la péréquation. Une stratégie possible en 2006, lorsque les régions en transition n'existaient pas. Au final, le coup de pouce financier auquel elles s'attendaient pourrait se muter en coup de frein.
François Hollande devrait bientôt être alerté par les présidents de région de cet écueil difficilement vendable sur le terrain. En coulisses, les conseillers planchent sur des scénarios plus alléchants pour les régions intermédiaires. "S'il est impossible d'augmenter l'intensité de l'aide pour la catégorie des régions en transition, nous n'excluons pas l'idée d'un chèque", relève une source française.
Une rallonge d'un milliard d'euros serait nécessaire pour les dix régions concernées. Déjà prise en tenaille par le budget incompressible de la politique agricole et les demandes de crédits supplémentaires pour les régions d'outre-mer, l'équation française se corse un peu plus. "Jusqu'ici, on a défendu tous ces sujets au même niveau. Mais on ne sait pas quelle sera la hiérarchie finale", poursuit la même source. Réponse probable au Conseil européen des 7 et 8 février.