"Bon débit" pour tous : les collectivités face au choix de la technologie
Si les investissements dans la fibre s’accélèrent, quelque deux millions de Français devraient continuer de pâtir de débits inférieurs à 8Mbps en 2020. Face à ce risque de fracture, Infranum plaide pour une relance des technologies radio.
Le gouvernement a fixé deux échéances à sa stratégie très haut débit. En 2020, le "bon débit pour tous" (8 Mbps) avant la généralisation du très haut débit (au moins 30 Mbps) promis à échéance 2022, quelques deux millions de foyers devant compter sur des technologies alternatives pour accéder au "bon débit". L’Idate, mandatée par la fédération des industriels des télécoms Infranum, s’est intéressée aux départements les moins bien lotis compte tenu des programmes d’investissement connus. Résultat :
- deux départements auraient 20 à 24% de leur population dépendante de technologies alternatives pour bénéficier du "bon débit" ;
- quatre départements 15 à 20% de leur population dépendante de technologies alternatives pour bénéficier du "bon débit" ;
- quatorze départements 10 à 15% de leur population dépendante de technologies alternatives pour bénéficier du "bon débit".
Infranum privilégie le THD radio sur la 4G fixe
Pour résorber cette fracture, plusieurs options technologiques sont possibles. Infranum invite à se méfier de l’option 4G fixe - une box connectée à une antenne 4G située à proximité - qui semble avoir aujourd’hui la préférence du gouvernement. "La 4G ne pourra combler les besoins en internet fixe que de manière ponctuelle, sous peine d’écrouler les réseaux mobiles", prévient Infranum qui estime, en outre, qu’elle n’est pas adaptée à des usages professionnels. Pour répondre aux besoins en débits des habitants comme des entreprises, Infranum estime que les technologies radio du type LTE sont aujourd’hui les plus adaptées car elles reposent sur "un réseau dédié aux clients fixes, un contrôle du débit de chaque utilisateur, une consommation illimitée et des engagements forts de qualité de service imposés par l’Arcep". À ce jour, une quarantaine de départements ont engagé des études pour utiliser cette technologie mais peu de fréquences ont été effectivement attribuées (deux attribuées, six en cours). Infranum demande que le guichet THD radio ouvert par l’Arcep en janvier 2018 soit prolongé d’un an, la date de fin 2019 s’avérant comme trop juste pour permettre aux collectivités de déposer un dossier.
Et le satellite ?
Le communiqué Infranum omet de mentionner le satellite dans les technologies alternatives. Or leur première qualité est d’être disponible partout en France sans nécessiter l’installation d’équipements par les collectivités locales. Près d’une dizaine d’offres sont aujourd’hui disponibles avec des débits pouvant atteindre 30Mbps pour des tarifs pivot semblables à l’ADSL, soit une trentaine d’euros par mois. Malgré l’amélioration constante du service apporté par les dernières générations de satellites, ces offres butent cependant sur des limites technologiques : faiblesse des débits montants, temps de latence élevé et, surtout, facturation des consommations de données au-delà du forfait prépayé. Or celles-ci peuvent sérieusement alourdir la facture. Par ailleurs, comme pour la 4G, le débit disponible est partagé : il faut donc que le nombre d’utilisateurs ne soit pas trop important pour assurer une qualité de service satisfaisante à l’ensemble des abonnés.
100 millions d’aides de l’État
La particularité de l’ensemble de ces technologies "alternatives" est ensuite d’exiger l’installation d’équipements de réception chez l’abonné dont le montant peut dépasser plusieurs centaines d’euros. Pour aider les foyers des zones blanches du THD à s’équiper, le gouvernement a ouvert en janvier 2019 un guichet "Cohésion numérique des territoires" doté de 100 millions d’euros. Pour tout équipement satellitaire ou hertzien, chaque foyer peut bénéficier d’une aide allant jusqu’à 150 euros, parfois cumulable avec celle versée par les collectivités locales.
Face à cet éventail technologique, force est de reconnaître que les choix des collectivités ne sont pas évidents. Certaines ont opté pour un cap 100% du territoire connecté en fibre - le satellite servant de pansement temporaire dans les zones critiques - quitte à étaler leurs investissements au-delà de 2022. D’autres privilégient une approche progressive de montée en débit via le financement d'un mix technologique. Mais avec le risque de mener des investissements devenus inutiles dans une approche de fibre jusqu’à l’abonné et de rendre moins attractive le FTTH lorsque le service sera disponible.