Ecologie et entrées de villes : deux axes majeurs du programme Action Cœur de Ville jusqu’en 2026
On ne change pas une formule qui gagne. On l’étend. Telle pourrait être la devise de la seconde phase de dynamisation de 234 villes moyennes en France. Durant les trois prochaines années, 5 milliards d’euros seront de nouveau alloués par les partenaires du programme Action Cœur de Ville, élargi aux pourtours des villes et conforté dans la transformation écologique.
Longtemps éclipsées par l’essor des métropoles régionales, les villes moyennes font montre d’un regain d’attractivité, encouragé par les politiques publiques d’aménagement et par les effets de la pandémie de Covid-19. Le sens de l’histoire (et de la loi) allant vers la fin de l’étalement urbain et de l’artificialisation des sols, ces centres-villes retrouvent un pouvoir d’attraction, et engagent la rénovation de logements, de locaux commerciaux et de friches.
Une première phase de redynamisation des centres-villes aboutie
Entre 2018 et 2022, aux côtés des sommes investies par les collectivités locales, Action Cœur de Ville aura mobilisé 5 milliards d’euros de crédits portés par l’État, l’ANAH, Action Logement et la Banque des Territoires - dont 1,5 milliard de prêts sur fonds d’épargne, 1,4 milliard d’investissement et 75 millions de subventions d’études d’ingénierie abondés par la Banque des Territoires.
Selon la formule employée par la Cour des comptes dans son rapport publié en septembre 2022, « Action Cœur de Ville est plus qu’un programme. C’est une plate-forme souple et ouverte rassemblant un ensemble de partenaires ». Avec une montée en puissance continue du nombre et du volume de projets financés sous le label ACV.
Fort de ce succès, le programme a été prolongé jusqu’en 2026, en réallouant au moins 5 milliards d’euros de crédits des partenaires. « Les villes moyennes jouent en effet un rôle d’équilibrage dans chaque région de France, affirme Frédéric Gibert, responsable du programme Action Cœur de Ville et du plan Commerces à la Banque des Territoires. Elles participent aussi d’une triple transformation : écologique, démographique et économique ».
La Banque des Territoires travaillera avec les villes labellisées ACV, qu’elles en soient au stade de la réflexion, de la programmation immobilière et urbaine, ou de la réalisation de leurs projets.
Extension du périmètre du programme Action Cœur de Ville
Or, qu’il s’agisse de sobriété foncière ou de restructuration commerciale, les projets d’aménagement dépassent souvent les centres-villes, et ne se cantonnent pas aux seuls enjeux d’habitat et de commerce.
Ainsi, l’activité commerciale dans les villes moyennes est générée pour 25 % dans les centres-villes, 65 % en périphérie et 10% par Internet. « La redynamisation serait insuffisante si n’étaient traités que les centres-villes. D’où la prise en compte désormais dans ACV des zones commerciales et artisanales, ainsi que du tissu urbain qui mélange commerces, habitat, industries parfois obsolètes », précise Frédéric Gibert. Dans l’optique d’une zéro artificialisation nette d’ici 2050, cela représente autant d’occasions de recomposer les pôles urbains.
Le raisonnement est analogue autour des gares, quartiers où se mêlent d’anciennes emprises ferroviaires (voies, entrepôts), des commerces et hôtels-restaurants souvent dégradés ou fermés, d’anciennes casernes, des friches...
« C’est tout un tissu hétérogène qui offre des opportunités d’évolution économique, en particulier dans des villes dotées de gares TGV », affirme Frédéric Gibert. Existe aussi le cas où des villes moyennes ne peuvent s’étendre du fait du coût du foncier agricole, à l’exemple de la Champagne, ou des contraintes géographiques comme en montagne.
La nouvelle phase 2023 – 2026 d’ACV élargira donc l’action de la Banque des Territoires et des parties-prenantes (collectivités, État, ANCT) à ces quartiers et aux entrées de ville, y compris en dehors des opérations de revitalisation de territoire actuelles (ORT) qui pourront être étendues à de nouveaux secteurs prioritaires. Avec la volonté d’amplifier et d’accélérer la réalisation des projets.
« La Banque des Territoires travaillera avec les villes labellisées ACV, qu’elles en soient au stade de la réflexion, de la programmation immobilière et urbaine, ou de la réalisation de leurs projets, souligne Frédéric Gibert. Cela se fera par un dialogue direct entre ces collectivités et les directions régionales de la Banque, sans appels à projets ni manifestation d’intérêt. Tout projet d’une ville ACV, même au stade embryonnaire, sera analysé par nos soins, afin de gagner en temps, en simplicité et en efficacité ».
Priorité à l’écologie
D’ici 2026, plus de 60 % des nouveaux crédits d’ACV seront destinés aux enjeux d’efficacité énergétique des bâtiments, de sobriété foncière, de renaturation, de décarbonation des mobilités (personnelles, des transports publics et des véhicules techniques des collectivités).
Seront aussi concernés les projets de transformation démographique, au travers des questions d’habitat, d’accès aux services de santé, de prise en charge du vieillissement ; ainsi que la transformation économique, par le biais de la redynamisation commerciale, de la réindustrialisation et de la reconstitution de l’appareil productif.
La Banque des Territoires et l’ensemble des partenaires d’ACV proposeront ainsi des financements et des outils pour assurer l’ingénierie des projets et leur mise en œuvre, la synergie entre ces villes et le partage d’expériences.
Les lignes de financement proposées par la Banque des Territoires seront a minima de 1,5 milliard d’euros, avec l’ambition d’aller jusqu’à 2,5 milliards d’euros. « Les prêts ACV sont contractés non seulement par les villes labellisées et les entreprises publiques locales (EPL), mais aussi par des bailleurs sociaux et des opérateurs privés. La Banque des Territoires a ainsi cofinancé la construction d’un cinéma à Dieppe et d’un hôtel à Dreux », illustre Frédéric Gibert.
Les projets ACV sur le terrain
Plusieurs projets illustrent les nouvelles possibilités offertes par ACV.
Reconversion de friches
La ville et l’agglomération d’Angoulême ont signé fin 2022 une convention d’étude sur la sobriété foncière. Une subvention pour l’étude ingénierie aidera à dessiner les perspectives de réemploi des friches déjà recensées par la collectivité, par le biais de renaturation, de densification urbaine, d’installation d’équipements publics.
Appelés à être réhabilités et remodelés, l’ancienne usine de la Poudrerie et le quartier des Trois Chênes occupent près de 10 % de la surface de la ville.
Restructuration commerciale et entrées de ville
La ville de Grasse réfléchit à mieux aménager ses entrées afin de pouvoir accueillir des entreprises de parfumerie. Enfin, à Cahors, la question porte sur la requalification d’un ensemble de zones artisanales et commerciales situées au sud de la ville, dans un défilé qui présente un risque de submersion – inondation.
Le programme ACV en chiffres
234 communes métropolitaines et ultramarines sont concernées par le programme « Action Cœur de Ville »
23 % de la population française vit dans les villes moyennes
26 % de l’emploi en France y est concentré
15 % moyenne de fréquentation des centres-villes ACV, contre +2 % dans les villes non labellisées (source : Cour des comptes)
L’analyse du Sénat et de la Cour des comptes
En septembre 2022, le Sénat et la Cour des comptes rendirent leurs observations sur Action Cœur de Ville. La Chambre haute déclare que ce programme « permet de lancer, accélérer ou structurer une dynamique locale de revitalisation du territoire qui part des besoins et des projets du terrain et intègre des problématiques nouvelles, comme celle de la transition environnementale ».
La Cour des comptes écrit que le programme « semble avoir créé une réelle dynamique en facilitant le développement de projets structurants portés par les maires […]. Il a conduit les différents partenaires du programme à adapter leurs moyens et leurs méthodes à ces priorités ».
La carte des villes bénéficiaires du programme
Frédéric Gibert
Responsable du programme Action Cœur de Ville et du plan Commerces à La Banque des Territoires
Diplômé d’un master II de l’Institut français d’urbanisme et d’un mastère de l’École spéciale des travaux publics, Frédéric Gibert a exercé durant sept ans comme chef de projet chez Logirep, puis pendant six ans en tant que chef de projet à la SEM 92. Avant de rejoindre la Caisse des dépôts en 2016, il fut deux ans consultant en aménagement et urbanisme à la SCET.