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Politique de la ville / Habitat - Bailleurs sociaux : une charte précise les contreparties à l'abattement de TFPB en quartier prioritaire

Comme l'avait annoncé la veille le ministre Patrick Kanner lors d'un déplacement à Toulouse, le gouvernement a signé ce mercredi 29 avril avec le monde HLM et quatre associations d'élus locaux une charte établissant un "cadre national d'utilisation de l'abattement de taxe foncière des propriétés bâties (TFPB) dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville pour la qualité de vie urbaine". Aux côtés du ministre de la Ville, de la secrétaire d'Etat Myriam El Khomri et du président de l'Union sociale pour l'habitat (USH), les élus signataires sont les représentants de l'Association des maires de grandes villes (AMGVF) et de l'Association des communautés urbaines (Acuf), de l'Assemblée des communautés de France (ADCF) et de Ville et Banlieue.
Concrètement, il s'agit d'engager les bailleurs sociaux, en contrepartie de l'abattement de 30% sur la taxe foncière dont ils continueront à bénéficier en 2015 (et en principe jusqu'en 2020) dans les 1.500 quartiers prioritaires, à s'engager sur une série d'actions liées à la qualité de vie des habitants au quotidien : entretien et maintenance des parties communes et des abords, insonorisation et isolation des bâtiments, dépannage des ascenseurs, gardiens et autres agents de proximité, qualité des relations avec les locataires, petits travaux d'amélioration du cadre de vie, soutien aux actions favorisant le "lien social" entre habitants… Tout cela n'aurait-il pas un petit air de "GUP", les démarches de "gestion urbaine de proximité" ? Ce n'est pas fortuit : "Les actions des organismes HLM prises en compte dans le cadre de l'abattement de TFPB font partie des programmes d'actions réalisés dans le cadre des démarches de gestion urbaine de proximité" pilotées par les collectivités et l'Etat pour "répondre aux besoins spécifiques des quartiers", souligne en effet la charte.
La reconduction de cette mesure fiscale au-delà de 2014 (elle existait depuis 2001, puis avait été prolongée d'un an en 2013, alors applicable aux ZUS) et l'élaboration de cette charte avait été inscrite dans l'"Agenda HLM 2015-2018" signé par l'USH et l'Etat en clôture du dernier congrès HLM en septembre 2014 (voir ci-contre notre article du 29 septembre 2014). La loi de finances pour 2015 l'avait ensuite entérinée, avec la volonté de "mieux contrôler l'utilisation qui en est faite par les bailleurs sociaux".

Des actions à chiffrer

La charte signée mercredi n'est en fait qu'un cadre national qui doit ensuite être décliné localement sous forme de "conventions d'utilisation de l'abattement de TFPB", conventions qui doivent elles-mêmes être déclinées par quartier et par organisme HLM, et constituer une annexe à chaque contrat de ville. L'inscription de ces conventions dans les contrats de ville avait été actée lors du comité interministériel des villes du 19 février 2013 puis confirmée dans la loi de finances. Chaque convention sera co-signée par l'organisme HLM, l'Etat et la collectivité (commune ou EPCI) concernée.
Les actions engagées par les organismes HLM doivent pouvoir être détaillées et chiffrées. Les bailleurs doivent ainsi être en mesure d'identifier les initiatives spécifiques mises en œuvre et de mesurer le différentiel entre le coût de ces actions et le coût d'une gestion de droit commun dans le parc social hors quartiers prioritaires (comparer, par exemple, le coût annuel moyen du gardiennage ou de la maintenance hors quartiers prioritaires et le coût envisagé en quartier prioritaire).
La convention fixera un "programme d'actions" qui devra faire l'objet de "points d'étape réguliers" associant la collectivité ainsi que des représentants des locataires et incluant des enquêtes de satisfaction, des tableaux de bord de suivi… Un suivi et une évaluation sont également prévus à l'échelle nationale puisque l'USH devra réaliser un bilan triennal du dispositif.
"L'abattement de 30% sur la taxe foncière des propriétés bâties pour les immeubles locatifs situés en zone urbaine sensible (…) représente un allègement de 150 millions d'euros", a précisé Patrick Kanner mardi à Toulouse, où il ouvrait les "Assises métropolitaines de la politique de la ville" organisées par l'agglomération toulousaine pour préparer la signature de son contrat de ville 2015-2020. On saura que lors de la préparation de la loi de finances, la dépense fiscale associée à l'abattement avait été évalué à 89 millions d'euros pour 2013 et à 71 millions d'euros en 2014 (une perte de recettes fiscale pour les collectivités intégralement compensée par l'Etat).
"C'est un accord gagnant-gagnant : moyennant des engagements pour réaliser des aménagements facilitant la vie des habitants, l'abattement sera prolongé pour six ans, avec une clause de revoyure au bout de trois ans", a également commenté le ministre. "La nouvelle convention précise le dispositif d'action quotidienne renforcée qui justifie de prolonger l'abattement dont nous bénéficions depuis 2001", a pour sa part résumé la secrétaire générale de l'USH, Marianne Louis, interrogée par l'AFP, poursuivant : "Une trentaine d'actions à mettre en oeuvre avec les associations et les élus locaux des 1.500 quartiers prioritaires de France sont prévues, depuis la formation des gardiens ou le rythme d'entretien renforcé des locaux, jusqu'au portage des courses, à l'aménagement de locaux associatifs ou à la formation de médiateurs de nuit".
Certains territoires ont déjà largement anticipé cette charte puisque dans le département du Nord par exemple, la Direction départementale des territoires avait dès 2011 réalisé un "Livret bailleur" (mis à jour début 2015) détaillant, tableaux à l'appui, le contenu de ce que doit être la "stratégie pour l'amélioration de la gestion urbaine de proximité à partir du dispositif d'abattement de la TFPB".