Assises des départements : un rendez-vous sous haute tension financière

Les élus départementaux vont se retrouver ces 13 et 14 octobre à Agen pour leurs assises, une version élargie du congrès annuel de Départements de France. Plusieurs ministres sont attendus, dont Élisabeth Borne en clôture. Les enjeux financiers du moment devraient évidemment occuper une place importante.

Une semaine exactement après son intervention devant les élus intercommunaux à Bordeaux, c'est devant les élus départementaux qu'Élisabeth Borne s'exprimera ce vendredi 14 octobre à Agen. Ceux-ci seront réunis les 13 et 14 octobre pour leurs assises nationales, un format élargi couplé au 91e congrès des départements.

Derrière un intitulé large aux airs de slogan, "Les départements, une chance pour la France", présidents ou vice-présidents de département et conseillers généraux participeront pendant ces deux jours à une succession de tables-rondes thématiques : social (RSA, illectronisme, précarité énergétique, autonomie, grand âge), santé et médicosocial, finances, incendies et sécurité civile (avec les conclusions de la mission flash sur "l’organisation et les investissements nécessaires à l’adaptation de notre modèle de sécurité civile aux nouveaux risques").

Pour chaque séquence, un ministre a été invité. Sont ainsi escomptés, sous réserve, Christophe Béchu, Caroline Cayeux, Geneviève Darrieussecq (handicap), Jean-Christophe Combe (solidarités) dont Départements de France attend des précisions et réassurances sur pas mal de sujets… et, donc, en clôture, la Première ministre. Avec de sa part, après celles de Bordeaux (voir notre article), de nouvelles annonces en vue ? Possible. Notamment sur les questions de finances locales. En sachant toutefois qu'une partie de ce qui a été dit à la convention d'Intercommunalités de France concernait aussi les départements - par exemple l'élargissement à 2023 de la période de référence pour le calcul de la part de TVA qui remplacera la CVAE.

Sortir les AIS des dépenses à maîtriser

Concernant là encore le remplacement de la CVAE par une part de TVA, Élisabeth Borne devrait logiquement faire valoir vendredi que le gouvernement répond favorablement à l'une des demandes de Départements de France : un amendement gouvernemental au projet de loi de finances (PLF) prévoit que contrairement aux communes, il n'y aura pas de territorialisation de la dynamique de TVA en fonction de l'activité économique. "Ce principe se comprend pour les communes, en revanche pour les départements, cela aurait pénalisé les départements faibles", avait expliqué le 28 septembre François Sauvadet, le président de Départements de France, en présentant les assises à la presse.

Autre demande financière des départements : sortir les allocations individuelles de solidarité (RSA, APA, PCH) des dépenses de fonctionnement qui seront prises en compte dans le mécanisme de "modération" des dépenses des collectivités prévu par le projet de loi de programmation des finances publiques. "Ces allocations, nous n'en maîtrisons ni le contour ni le montant", donc ne pas "les retirer des trajectoires" serait "incompréhensible", tranche François Sauvadet, appuyé par la présidente du département hôte des assises, Sophie Borderie. Là-dessus, l'entourage de Caroline Cayeux a récemment parlé d'"interrogation légitime". Si le gouvernement n'a pas préparé d'amendement sur ce point, des députés de tous bords s'en sont chargés, avec pas moins de neuf amendements déposés en vue de l'examen du projet de loi de programmation en séance publique. [MAJ du 12/10 : ce mardi 11 octobre en fin de soirée à l'Assemblée, lors de l'examen de ce texte, les députés ont au final adopté plusieurs amendements supprimant purement et simplement l'article 23 instaurant le nouveau mécanisme de maîtrise de l'évolution des dépenses de fonctionnement - Localtis y reviendra dans sa prochaine édition]

"On ne pourra pas nous demander en même temps de faire plus, d'accélérer… et d'appuyer sur la pédale de frein des dépenses", contextualise François Sauvadet, en relativisant largement ce qui a pu être dit ou écrit quant à la santé financière des départements. Du côté des recettes, le président de la Côte-d'Or prévoit entre autres "une baisse des DMTO beaucoup plus importante que ne le fait Bercy", avec une conjonction de multiples facteurs immobiliers (taux d'usure, taux d'emprunt, prochaine interdiction de location des logements classés F ou G… sans oublier la dimension "anxiété"). "Les DMTO sont volatiles et oui, on observe un tassement", confirme la présidente du Lot-et-Garonne.

Le poids des revalorisations salariales

Côté dépenses, comme pour les autres niveaux de collectivités, le coût de l'énergie fait partie des préoccupations. Pour le Lot-et-Garonne, l'augmentation de la facture énergétique représente un bond de 8 millions d'euros, soit +90%, sur une hausse totale des dépenses du département de 20 millions. "Nous avons demandé au gouvernement de regarder la situation des départements les plus fragiles par rapport à cet enjeu de l'énergie, tels que les Ardennes ou l'Aisne", indique François Sauvadet, qui recommande par ailleurs que l'on s'intéresse à la question du chauffage des "personnes âgées à domicile".

Mais au-delà de l'énergie, il y a toutes les dépenses propres aux départements, le président de Départements de France pointant notamment les diverses revalorisations salariales intervenues récemment (aide à domicile, Ségur de la santé puis "oubliés du Ségur"…), qui s'ajoutent à la revalorisation du point d'indice des fonctionnaires (François Sauvadet aurait préféré que l'on fasse "du ciblage" sur les bas revenus). Il y a aussi la hausse des dépenses de RSA (certes partiellement prise en compte dans la dernière loi de finances rectificative) et l'"inévitable" pente ascendante des dépenses d'APA. Sans oublier les conséquences du changement climatique, notamment en matière d'incendie, sachant que les départements sont les principaux financeurs des services d'incendie et de secours (Sdis) : "Il faudra revoir le modèle de financement, y compris par rapport aux communes et métropoles", estime François Sauvadet.

Il y a un an, lors de leur congrès de Bourg-en-Bresse, les élus départementaux avaient approuvé un ensemble de "102 propositions". Celles-ci ont depuis été "approfondies" pour constituer un livre blanc intitulé "La France en vrai". Il y est question d'institutions, de social et de médicosocial, d'aménagement du territoire, d'habitat, de numérique, d'environnement… "Nous mettons sur la table ces propositions" pour "éclairer le débat public pour les années à venir", dit le président de Départements de France, avec l'intention d'en faire notamment la contribution de son association à l'"agenda territorial" que souhaite élaborer le gouvernement. Et, probablement, une contribution aux futures discussions sur le "nouveau chapitre de la décentralisation" qu'Emmanuel Macron dit vouloir ouvrir.

 

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