Assemblée des communautés de France : les priorités du nouvel exécutif
Composé de trois jeunes élus – Sébastien Martin, Sébastien Miossec et Virginie Carolo – le nouvel exécutif de l'Assemblée des communautés de France (ADCF) a détaillé, ce 5 novembre, la feuille de route des présidents d'intercommunalité. En mettant l'accent sur trois "R" : "relance du dialogue", "relance économique" et "relance de la transition écologique". Des marges de manœuvre sont également demandées dans le cadre du projet de loi "3D".
Avec le fameux couple "maire-préfet", érigé en solution à bien des problèmes depuis le printemps, l'intercommunalité semble être sur la touche. Mais derrière "la formule", il faut regarder "comment les choses se passent" et c'est bien "cela qui compte", analyse Sébastien Martin, président du Grand Chalon, qui a été élu, ce 5 novembre, président de l'Assemblée des communautés de France (ADCF) en remplacement de Jean-Luc Rigaut.
Dans les faits, les présidents d'intercommunalité sont régulièrement "en relation" avec les préfets, fait valoir Virginie Carolo, présidente de Caux Vallée de Seine agglomération et première vice-présidente de l'ADCF. D'ailleurs, une enquête que l'association a conduite le mois dernier le confirme. Plus de la moitié des 165 présidents d'intercommunalité y ayant répondu affirment que le préfet de leur département réunit leurs pairs de façon "régulière" et "spécifique". Pour 26% d'entre eux, il s'agit d'une habitude prise "il y a longtemps", tandis que 30% mettent en avant une nouveauté apparue "depuis le début de la crise". La première vice-présidente de l'ADCF avance les raisons de ces réunions : "Il est tout simplement impossible techniquement que l'ensemble des maires du département suivent une audioconférence avec le préfet." C'est logique, souligne-t-elle : "Automatiquement, les présidents d'intercommunalité sont délégués sur toutes les questions, qu'elles soient intercommunales ou municipales."
Autorités organisatrices
"Maires, présidents et présidentes d’intercommunalité, de métropole, élus de terrain, nous allons avoir besoin de vous de manière encore accrue", déclarait le président de la République lors de l'annonce du reconfinement, le 28 octobre. Cela n'a pas échappé à la nouvelle équipe dirigeante de l'ADCF. Sébastien Miossec, président de Quimperlé communauté et président délégué de l'association, estime qu'il s'agit d'"un symbole assez fort" et y voit la marque d'une "évolution". "Les solidarités que nous construisons à l'échelle intercommunale, à travers les conférences des maires, nos exécutifs et nos politiques publiques sont reconnues", souligne l'élu.
C'est en tout cas de bon augure pour des présidents d'intercommunalité qui, à travers l'ADCF, entendent contribuer activement aux chantiers conduits par le gouvernement, notamment en passant avec ce dernier des "compromis constructifs", comme l'a souligné le nouveau président. Lequel, donc, avec ses deux coéquipiers, entend suivre la ligne tracée par l'association depuis plus de trente ans.
C'est ainsi par le dialogue avec les pouvoirs publics que l'ADCF espère que des "assouplissements" aux règles du confinement seront apportés suite à "certaines décisions de fermetures" qui paraissent "excessives ou peu équitables".
Le dialogue voulu avec l'exécutif s'est d'ailleurs poursuivi immédiatement dans la foulée de l'élection du nouveau conseil d'administration de l'ADCF, ce 5 novembre. Puisque la ministre de la Cohésion des territoires, Jacqueline Gourault, s'est exprimée par visioconférence devant les présidents d'intercommunalité. L'occasion pour l'ADCF de rappeler ses attentes à l'égard du projet de loi "3D" que la ministre doit présenter début 2021 : désireux ni d'un nouveau "big bang" territorial, ni d'un transfert de nouveaux blocs de compétences obligatoires, les élus intercommunaux réclament "plus de confiance" de la part de l'État, ainsi que davantage de souplesse dans l'exercice des compétences. Il s'agirait concrètement d'étendre la notion d'autorité organisatrice, aujourd'hui appliquée aux transports, à de nouveaux domaines (déchets, eau, assainissement et plans climat). Ces élus revendiquent aussi un renforcement de leurs pouvoirs réglementaires (en particulier en matière de logement, de mobilités et d'aménagement commercial), ce qui leur offrirait davantage de marges de manœuvre.
Relance par les intercommunalités
Ils tiennent par ailleurs à conserver leurs compétences actuelles. Un renforcement de celles-ci serait même bienvenu. En particulier s'agissant de l'habitat. Des intercommunalités entendent "être offensives" dans ce domaine, notamment sur le volet de la rénovation, indique Sébastien Martin. "Nous serons très attentifs" sur la question, poursuit-il. Pour cause, MaPrimeRénov', nouvelle aide financière accordée par l'Etat aux propriétaires, est "une bonne idée", mais "elle a tendance à passer au-dessus des collectivités", juge le président de l'ADCF.
De son côté, Jacqueline Gourault a confirmé que le quatrième "D" (comme décomplexification), qui a été récemment ajouté à son projet de loi, prendrait une dimension importante. "Il faudra amener le maximum d'assouplissements", a-t-elle déclaré. En mettant aussi en avant l’idée de "simplification" et d'"accompagnement" des collectivités.
Mettant la relance économique au cœur de ses priorités, l'ADCF a encouragé les intercommunalités, via l'une des résolutions adoptées lors de son assemblée générale, à "adopter et mettre en œuvre des plans de relance dans leurs territoires, en lien étroit avec les communes, les acteurs économiques et associatifs locaux". Comme le montre l'enquête menée par l'association, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre n'ont pas attendu cette invitation pour lancer des initiatives. Un tiers de ceux qui ont été interrogés le mois dernier ont affirmé que leur plan "est adopté et engagé". De plus, un peu plus d'un sur cinq a affirmé que ce plan "est en construction", tandis que la même proportion a dit mener "une réflexion sur le sujet".
Contrats globaux
Interrogés sur la méthode de mise en oeuvre du plan de relance, les mêmes présidents d'intercommunalité ont clairement émis une préférence pour une déconcentration des crédits aux préfets (62%) ou une délégation directe des crédits à la collectivité régionale (30%). Les appels à projets nationaux, que l'exécutif a privilégié dans certains domaines, ne recueillent que 6% de suffrages. Le problème est que les uns après les autres, ces appels à projets "arrosent les mêmes territoires", laissant de côté ceux qui n'ont pas de moyens en ingénierie, déclare Nicolas Portier, délégué général de l'ADCF.
Pour, justement, qu'aucun territoire ne soit oublié, l'association plaide pour que les plus défavorisés d'entre eux bénéficient d'un "coaching" dans le cadre de la préparation des contrats de relance et de transition écologique qui seront signés avec les intercommunalités à partir de 2021. Des documents que l'ADCF voit d'un bon œil, car ils pourraient concrétiser le contrat global qu'elle appelle de ses vœux. Ces contrats, qui "vont être lancés très rapidement", "vont dans le sens de ce que vous souhaitez", a d'ailleurs estimé la ministre de la Cohésion des territoires face aux responsables de l'ADCF.