Amiante dans les écoles : des "mesures d’urgence" réclamées au ministère de l'Éducation
Alors que la loi impose de le fournir, "46% des directeurs d’école n’ont pas accès au dossier technique amiante" de leur école, pointe un rapport d’inspecteurs santé au travail de l’Éducation nationale, dévoilé par Le Monde - et qu’AEF info s’est procuré. Des syndicats de l’Éducation nationale et des associations de prévention et de victimes de l’amiante dénoncent "une urgence sanitaire".
Après être resté confidentiel plusieurs mois, un rapport de 2019 réalisé par des inspecteurs santé et sécurité au travail (ISST) de l’Éducation nationale rend compte d'une enquête menée auprès de 175 écoles lors de l’année scolaire 2018-2019. Les inspecteurs se sont penchés sur le dossier technique amiante (DTA), son suivi, assuré par la collectivité territoriale, son accessibilité, les travaux sur les matériaux contenant de l’amiante et sur le suivi médical des personnels. L'enquête révèle que pour presque la moitié des écoles visitées, le DTA n'est pas disponible.
Des syndicats de l’Éducation nationale (FSU, Sud, Ferc-CGT), l’UNL, la FCPE et des associations de prévention et de victimes de l’amiante (1), ont dénoncé dans un communiqué commun du 26 novembre 2019 le "défaut de transparence" autour de l’amiante dans les école et ont demandé au ministère de l'Éducation nationale (MEN) des "mesures d’urgence" :
- "la réalisation et la mise à jour des dossiers techniques amiante (DTA)
- la constitution d’une base de données lisible par tous
- le repérage systématique avant travaux
- la formation au risque amiante des agents de maintenance et d’entretien et des personnels
- l’information des usagers".
Les collectivités obligées d’établir le DTA
Près de la moitié des écoles maternelles et élémentaires, françaises ne disposeraient pas d’un DTA, pourtant exigé par la loi, relèvent les organisations nationales représentatives des personnels de l’Éducation nationale, des parents d’élèves et des lycéens ainsi que les associations de victimes de l’amiante dans leur communiqué commun du 26 novembre. "88% (de 175 écoles visitées lors de l’année scolaire 2018-2019 dans le cadre de l’enquête de l’ISST, NDLR) ont été construites avant 1997, année de l'interdiction de l'amiante en France. Ce qui oblige normalement les collectivités territoriales propriétaires de ces bâtiments à établir un diagnostic technique amiante (DTA). Or 46% des établissements visités ne disposent pas de DTA. Et, pour les 54% qui en ont un, sa qualité laisse à désirer et sa mise à jour, pourtant obligatoire, est prévue par seulement 9% des propriétaires des bâtiments", a dénoncé Cyril Verlingue, président de l'association Urgence Amiante écoles, lors d'un point presse.
"Ce rapport nous a vraiment fait l'effet d'une bombe car c'est extrêmement grave le taux de méconnaissance du sujet au sein de l'Éducation nationale, ça nous a frappés et cela renforce notre volonté de se mobiliser sur ce sujet", a-t-il lancé.
Face à ces "constats alarmants", ce collectif demande "un plan réel d'action" contre l'amiante dans l'Éducation nationale, et souhaite rencontrer Jean-Michel Blanquer afin de prévenir les risques d'exposition à l'amiante et leurs effets pour les élèves et les personnels.
"La situation sur le terrain, c'est qu'on a par exemple des enfants de trois ans dans des dortoirs, qui dorment sur des matelas sur des sols amiantés abîmés, des salles dans des collèges avec des flocages qui se désagrègent... L'amiante se répand ainsi dans l'atmosphère des établissements scolaires", a déploré Julie Olivier, de Sud Éducation.
Suite notamment à la mobilisation autour du lycée Georges-Brassens de Villeneuve-le-Roi en région parisienne, le ministre de l’Éducation avait promis une cellule du bâti scolaire créée en lien avec le ministère de la Cohésion des territoires.Une promesse datant d’octobre 2018 “sans autre autre précision de moyen ni de calendrier”, déplorent les signataires du communiqué du 26 novembre.
(1) Ces associations et syndicats sont la FCPE, FERC CGT, FSU, Sud Éducation Union syndicale Solidaire, UNL, Andeva, Association des victimes de l'amiante, Association Henri Pézerat, Ban Asbestos France, Comité anti-amiante Jussieu, Urgence amiante écoles, Urgence santé Brassens, Association des victimes de l'amiante dans les locaux de l'éducation des Bouches-du-Rhône.