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Simplification des normes - Alain Lambert s'échauffe contre la réglementation thermique

Récemment nommé par le gouvernement médiateur des normes applicables aux collectivités locales, Alain Lambert, président du conseil général de l'Orne, fait la chasse à l'inflation normative et a trouvé une nouvelle cible avec la RT 2012. Il estime qu'elle ne tient pas compte des spécificités territoriales, la juge rigide, compliquée et appelle à sa révision.

La critique n'est pas nouvelle mais le 18 mars, Alain Lambert, qui préside la Commission consultative d'évaluation des normes (CCEN), lui a offert un autre écho devant une cinquantaine d'invités réunis pour en débattre. Répondant à l'appel de l'association Equilibre des énergies, l'ancien ministre du Budget, qui est devenu depuis peu le premier médiateur entre l'administration et les collectivités confrontées à des difficultés dans la mise en œuvre de lois ou de règlements, a expliqué que la réglementation thermique RT 2012, fruit d'une certaine "démesure dans la rédaction administrative avec ses 1377 pages", n'était pas fidèle à l'esprit du législateur et constituait un ensemble de "prescriptions techniques élevées comme cela n'aurait pas dû l'être au rang de dispositions juridiques".
D'où un paradoxe atteint lorsque l'élu décrète que cette réglementation, pourtant issue du Grenelle de l'environnement et de deux ans de concertation menée à l'époque (en 2008-2010) avec un comité scientifique et des professionnels du bâtiment, "ne respecte pas l'esprit du Grenelle de l'environnement". Le respect coûte que coûte de cette réglementation viderait selon lui les professionnels de leur créativité, et donc freinerait l'innovation. Ce à quoi Christian Louis-Victor, qui préside l'Union des maisons françaises (organisation des constructeurs de maisons), ajoute qu'elle freine même la construction. "Or les collectivités veulent construire, il y a donc urgence à sortir de l'ambiguïté et à réviser ce texte qui, juridiquement, n'est pas applicable", insiste Alain Lambert.

Mais que reprochent-ils au juste à cette réglementation qui, pour rappel, vise en logement neuf une consommation plafonnée à 50 kWh/m2 /an ? Il y a sa complexité, mais d'autres professionnels l'ont déjà pointée à un moment plus opportun, dès la sortie des arrêtés à l'été 2011. Des groupements comme le Gifam (fabricants d'appareils de chauffe-eau et chauffage électrique) ont d'ailleurs pris le relais et sont même allés jusqu'au Conseil d'Etat pour faire invalider il y a un an la méthode de calcul sur laquelle repose la RT 2012. Alain Lambert, aux côtés d'Equilibre des énergies, en remet donc une couche en critiquant plusieurs points. D'abord, la RT 2012 a été selon lui conçue pour la ville mais ailleurs, ses effets sont "catastrophiques" du fait des critères retenus, qui privilégient le gaz. C'est en effet l'un des grands changements de la RT 2012 : elle contraint la consommation d'énergie primaire et non plus l'énergie finale. Or, comme un chauffage au gaz consomme deux fois moins d'énergie primaire qu'un chauffage électrique - car les radiateurs électriques transforment en chaleur une électricité elle-même issue de chaleur (celle de la vapeur des centrales) - en rendement global, et pour le même mètre carré chauffé, le chauffage électrique est moins performant et se trouve pénalisé. "Résultat, dans les territoires ruraux où les communes ne sont pas reliées au gaz, comme c'est le cas dans mon département, la réglementation renchérit de 10 à 15% la quasi-totalité des nouveaux logements", conclut-il.