Aides au logement : le "temps réel" n'a guère simplifié les choses pour les bénéficiaires

La Cour des comptes a rendu ce 28 janvier un rapport sur la "contemporanéisation" du versement des aides personnelles au logement (APL), une réforme entrée en vigueur en janvier 2021 visant à mieux synchroniser le calcul de leur montant et le niveau de ressources des allocataires.

Le principe des aides personnelles au logement (APL) a été introduit dès 1948 et n’a cessé depuis d’être aménagé. Un dispositif dont le financement est assuré par le Fonds national d’aide au logement (FNAL) lui-même alimenté par dotation budgétaire de l’Etat et à travers lequel 17 milliards d’euros auront été versés en 2020 ; chiffre relativement stable par rapport à celui de 2014 (17,7 milliards d’euros), souligne la Cour des comptes. Avant le 1er janvier 2021, le calcul du montant de ces aides se fondait sur les déclarations fiscales des demandeurs établies en année n-2 avec une actualisation annuelle. Avec la mise en œuvre de la réforme, ce sont désormais les ressources de l’année écoulée qui sont prises en compte à travers une nouvelle base déclarative automatisée et actualisée de manière trimestrielle. C’est cette refonte dite de "contemporanéisation" que la Cour des comptes a passé au crible pour mieux apprécier ses résultats.

L’objet de la refonte, rappelle la Cour, consistait alors à mieux synchroniser le calcul du montant des APL et le niveau de ressources des allocataires. En filigrane, l’exercice promettait de simplifier le parcours des bénéficiaires, de réduire les différences "peu justifiables" entre les bénéficiaires et, au final, de générer des économies budgétaires. Dans leur rapport, les magistrats financiers rappellent que cette refonte du dispositif s’est construite "sur un consensus large", soutenu à la fois par la Caisse nationale d’allocations familiales (Cnaf), l’administration et les bailleurs sociaux. Une réforme rendue possible grâce à la dématérialisation des procédures et notamment l’automatisation des déclarations de revenus.

Un mode de calcul encore jugé complexe

Cependant, constatent les magistrats, il n’y pas eu de refonte complète du système car si les gains en termes de synchronisation sont bien observables, l’aménagement du dispositif n’a pas corrigé ses failles structurelles, pas plus qu’il n’a permis de simplifier un mode de calcul jugé complexe. Dans la pratique, cette évolution a nécessité de la part de la Cnaf la mise au point d’un nouveau système informatique (SI) dont la mise en œuvre a engendré "des retards et des complications", évoque le rapport. Mais si l’adaptation des SI de l’ensemble des partenaires aura au bout du compte nécessité un investissement de l’ordre de 100 millions d’euros, elle aura permis en parallèle de réaliser une économie sur le versement des APL de l’ordre de 1,11 milliard d’euros en 2021, notamment en réduisant le nombre d’allocataires dont les revenus en n-2 les rendaient éligibles alors qu’ils dépassaient les plafonds en année n. La Cour précise d’ailleurs que dans le même temps, le montant moyen de l’aide versée mensuellement aux bénéficiaires est resté constant, de l’ordre de 219 euros en 2022.

Reste que le bénéfice de cette refonte a été atténué, estime la Cour des compte, "par des facteurs externes" tels que la crise sanitaire ou encore "des tensions internes à la Cnaf". Dans la pratique, la mise en œuvre du nouveau dispositif s’est confrontée à plusieurs difficultés telles que la qualité des déclarations de revenus traitées, des demandes d’information plus complexes ou encore une insécurité accrue pour certains allocataires ayant une activité irrégulière. La Cour juge au final que si les objectifs de réduction des inégalités ou encore de réalisation d’économies budgétaires ont été atteints, la promesse de simplification du parcours des bénéficiaires n’est pas au rendez-vous.