Accessibilité numérique : le coût de la mise aux normes ne doit pas être disproportionné
De nouvelles dispositions législatives, qui modifient la loi Handicap pour répondre à des exigences européennes, élargissent le champ des obligations d’accessibilité numérique. Un décret est attendu pour déterminer la "charge disproportionnée" qui évitera aux collectivités la sanction.
Le gouvernement a profité de la loi pour "la liberté de choisir son avenir professionnel", publiée le 6 septembre, pour modifier les dispositions en vigueur sur l’accessibilité numérique des services de communication au public. L'article 80 de cette loi modifie ainsi l’article 47 de la loi Handicap de 2005 pour intégrer les obligations de la directive européenne du 22 décembre 2016 relative à l’accessibilité des sites internet et des applications mobiles des organismes du secteur public.
Davantage d’organismes concernées
La nouvelle rédaction élargit le champ des entités concernées par les obligations d’accessibilité. Elle s’applique désormais aux personnes morales de droit public, à l’exception des médias audiovisuels, aux délégataires de service public mais aussi aux personnes morales de droit privé à but non lucratif exerçant une mission d’intérêt général ainsi qu’aux services essentiels au public et/ou aux personnes handicapées. Enfin, les obligations d’accessibilité numérique sont étendues aux grandes entreprises dépassant un seuil de chiffre d’affaires qui sera fixé par décret. La liste des supports numériques est élargie et concerne dorénavant les sites internet, intranet, extranet, applications mobiles comme les progiciels et le mobilier urbain numérique.
Un plan pluriannuel d’accessibilité
La loi se cale ensuite sur le principe des agendas d’accessibilité pratiqués pour les bâtiments et la voirie pour améliorer la lisibilité des démarches entreprises par les entités concernées. Celles-ci ont l’obligation de mettre en œuvre un schéma pluriannuel d’accessibilité assorti d’un plan d’actions. Elles doivent mentionner clairement, dès la page d’accueil de leur site, leur niveau de conformité aux règles d’accessibilité numérique. En cas de manquement, les usagers devront pouvoir disposer d’un "bouton" pour le faire savoir.
Des contrôles, des sanctions et un joker
La directive impose par ailleurs un calendrier de contrôles avec une première vague en 2020 pour les sites internet et une seconde pour les applications mobiles en 2021, date à laquelle la France devra fournir un rapport à la Commission. En cas de manquement aux règles d’accessibilité, les contrevenants s’exposent désormais à des sanctions pouvant atteindre 25.000 euros, soit cinq fois plus que ce que prévoyait la loi Lemaire (5.000 euros). Cette amende, qui se veut un signal fort, est cependant contrebalancée par une autre disposition introduite par la directive. Le texte prévoit en effet que l’accessibilité "est mise en œuvre dans la mesure où elle ne crée pas une charge disproportionnée pour l'organisme concerné", notion qu’il reviendra de définir dans un décret en Conseil d'État.
Si les associations de personnes handicapées craignent que ce décret vide le texte de sa substance, sa portée est à relativiser. Dans la pratique, les administrations tendent à intégrer l'accessibilité lors de la refonte de leurs outils, obligeant les prestataires en concurrence à proposer une solution gérant l'accessibilité. Le véritable défi reste de gérer "l'accessibilité au quotidien" avec des agents qui n'ont pour seul appui qu'un référentiel technique peu… accessible aux non techniciens.