2018, "année exigeante" pour la Cohésion des territoires
Jacques Mézard et Julien Denormandie ont présenté leurs vœux pour l'année 2018 aux acteurs institutionnels, aux élus et à la presse, jeudi 25 janvier, à Malakoff. Chacun dans son style.
Le secrétaire d'Etat a débuté par un discours assez politique. Lui qui, il y a deux ans encore, "n'avait jamais fait de politique", s'est-il amusé. "Mon engagement vient d'une conviction profonde, c'est que le pays est trop souvent figé". Il a confié s'en être rendu compte "lors de la loi Macron" (il a été son directeur de cabinet, au ministère de l'Economie, de septembre 2014 à mars 2016) et plus tard lors de "la Grande Marche" de la campagne présidentielle. Dès lors, pour lui, 2018 sera tout à la fois "l'année de la transformation" et "une année exigeante car beaucoup de chantiers sont devant nous".
"Notre mission est de lutter, partout, contre les fractures territoriales"
Car "cette transformation, c'est d'abord la cohésion de la nation", termes qui "résonnent avec d'autant plus de force pour Jacques et moi qui sommes en charge de la cohésion des territoires". La cohésion des territoires, "c'est ce qui fait 'tenir ensemble'", explique-t-il. "Notre mission, avec Jacques, c’est donc de lutter, partout, contre les fractures territoriales". "Jacques" avec qui, confie-t-il, il passe "beaucoup d'heures, ce qui permet de développer des habitudes et une certaine forme d'intimité, très sincère et amicale". Une complicité aussi, à entendre les petites phrases hors discours officiels, échangées sur le vif en tribune.
"Le signe que l'Etat se repositionne totalement dans sa mission d'Etat stratège"
Pour le ministre non plus, "la cohésion des territoires n'est pas qu'une affaire de sémantique". "C'est le signe que l'Etat se repositionne totalement dans sa mission d'Etat stratège au service de la lutte contre les fractures territoriales et sociales", a assuré Jacques Mézard. "Cela ne signifie pas que l'Etat fait tout, tout seul", a-t-il poursuivi. Sa longue expérience d'élu local (il a été sénateur du Cantal jusqu'à son entrée au gouvernement et président de la communauté d'agglomération d'Aurillac pendant 16 ans) lui fait dire : "Je sais que les politiques publiques sont plus utiles quand les objectifs sont partagés à la fois par l'Etat et par les collectivités".
C'est au ministre qu'est revenu le soin de lister les grandes priorités de l'année 2018. Pas de scoop, plutôt des rappels mis en musique dans un même discours.
Première priorité : "agir auprès des plus démunis"
La première des priorités citées, "c’est d’agir auprès des plus démunis". Jacques Mézard a évoqué à ce propos le plan hivernal instauré le 1er novembre avec l'ouverture de 140.000 places d'hébergement en direction des personnes vivant à la rue, soit 13.000 de plus que l'année précédente. Il a rappelé la "promesse du Président" - "que chaque personne à la rue puisse se voir proposer une solution d’hébergement adaptée" - et assuré que son ministère était "mobilisé au quotidien pour qu'elle soit tenue".
Il a naturellement évoqué aussi le plan Logement d'abord présenté par le Président de la République à Toulouse le 11 septembre, dont l'enjeu est d'"éviter les remises à la rue faute de solution [par] un effort accru d’accompagnement au retour vers le logement des personnes hébergées."
"Ce quinquennat sera celui de la fin des fractures numériques en France"
Deuxième chantier prioritaire: "Garantir l’accès à la téléphonie mobile et à internet partout sur le territoire". Le ministre a fait référence à l'accord conclu le 14 janvier avec l'Arcep, visant un objectif : "Plus aucune ville, plus aucun village, sans téléphonie mobile d’ici cinq ans". "Ce quinquennat sera celui de la fin des fractures numériques en France", a-t-il prédit.
"Nous garantirons aussi progressivement la couverture mobile de tous les trains, et plus particulièrement des trains du quotidien, soit au total 5 millions de passagers et 30.000 kilomètres de lignes", a-t-il déclaré.
"Je ne remets pas en question la nécessité d’avoir des métropoles fortes. Mais..."
Les villes moyennes et le déploiement du plan "Action cœur de villes", présenté le 15 décembre à Rodez, constitue le troisième chantier prioritaire (voir aussi notre dossier "Redynamisation des centres-villes : quelles solutions ?").
Il a évoqué le "sentiment profond de déclassement et de relégation" exprimé par les habitants. Selon lui, "ce sentiment a été accru par le phénomène de métropolisation accéléré par le gouvernement précédent". "Que les choses soient claires : je ne remets pas en question la nécessité d’avoir des métropoles fortes. Mais je constate, comme beaucoup d’élus locaux, que cette métropolisation a été souvent déséquilibrée, qu’elle n’a pas bénéficié aux villes moyennes où vivent plus de 25% de nos concitoyens, qui sont des pôles de développement pour les territoires ruraux et qui jouent un rôle essentiel dans le maillage territorial de notre pays", a-t-il déclaré. "Quand on me parle de la théorie du ruissellement, j'attends que l'eau arrive partout", s'est-il amusé à ce propos.
"Nous devons accompagner toutes les villes, pas seulement celles qui ont les moyens de remplir de beaux dossiers"
Il a aussi rappelé qu'avec ce plan, le gouvernement mobilise plus de 5 milliards d’euros sur cinq ans, y compris 1 milliard d’euros de la Caisse des Dépôts en fonds propres et 700 millions d’euros en prêts ; 1,5 milliard d’euros d’Action Logement et 1 milliard d’euros de l’Anah.
Il a insisté sur "un point essentiel", comme il l'avait fait la veille devant les maires de villes moyennes : "Nous devons accompagner toutes les villes, pas seulement celles qui ont les moyens de remplir de beaux dossiers. Nous concentrerons nos efforts sur celles qui ont le plus besoin de l’ingénierie de l’Etat, car c’est cela notre rôle".
Il a résumé la Stratégie logement présentée le 20 septembre - le quatrième chantier – par cette formule : "Nous voulons construire plus et plus vite, répondre aux besoins des plus modestes et agir sur les quartiers en grande difficulté (450 quartiers) en améliorant l’habitat et en renforçant le programme national de renouvellement urbain".
"Dans chaque département, j'entends qu'il puisse exister au moins une structure HLM"
A propos de "la restructuration" du secteur HLM voulu par le gouvernement, il s'est remémoré avec humour l'accueil "dynamique" que les congressistes de Strasbourg lui avaient réservé en septembre ainsi qu'à Julien Denormandie. Il a évoqué dans la foulée l’accord signé avec les ESH le 13 décembre et "les différentes pistes et hypothèses qui sont aujourd’hui examinées par le gouvernement avec ses partenaires, que ce soit la facilitation des rapprochements entre acteurs, les regroupements des acteurs les plus petits...". A ce propos, il a assuré que "le gouvernement n’a pas d’idées arrêtées sur les solutions à mettre en œuvre" et que le principe d’un seuil minimal de logements "n’est absolument pas arrêté, car il ne tient pas nécessairement compte de la diversité de nos territoires". "Dans chaque département, j'entends qu'il puisse exister au moins une structure HLM", a-t-il déclaré.
Jean-Louis Borloo, missionné sur la politique de la ville, rendra ses conclusions "courant mars"
Le cinquième chantier pour 2018 est la mobilisation nationale en faveur de la politique de la ville, lancée par Emmanuel Macron à Tourcoing le 14 novembre, qui sera bâtie à partir d'un plan de travail proposé par le Président. Le ministre a rappelé "la mise en place un groupe d’experts de la politique de la ville autour de notre très cher Jean-Louis Borloo", lequel présentera ses conclusions "courant mars".
En plus de ces "priorités", Jacques Mézard a eu un mot pour la préparation des Jeux Olympiques 2024, précisant que le projet de loi sera examiné au Sénat le 6 février. Il a terminé sur l'Europe, en rappelant : "Nous travaillons activement pour porter la position de la France dans la refonte, avec les régions (qui sont en charge des fonds structurels), de la politique de cohésion, pour gagner en simplicité et en flexibilité dans le cadre de l’élaboration du nouveau cadre financier pluriannuel post 2020".