Secrétaires généraux de mairie : les mesures de revalorisation entrent en vigueur

La plupart des dispositions de la loi visant à améliorer l'attractivité du métier de secrétaire de mairie étaient conditionnées à la parution de décrets d'application. Très attendus, ces derniers ont été publiés ce 17 juillet. A la clé, plusieurs nouveautés de taille : voies de promotion interne supplémentaires, renforcement de la formation initiale, bonifications pour les avancements d'échelon… Les syndicats dénoncent toutefois l'inéligibilité de plusieurs milliers de secrétaires de mairie de catégorie C aux nouveaux dispositifs de promotion interne.

Dès le vote définitif et la promulgation, en décembre, de la loi visant à revaloriser le métier de secrétaire de mairie, les parlementaires et l'Association des maires de France (AMF) avaient déclaré qu'ils seraient vigilants sur les décrets d'application de la réforme, des textes qui notamment préciseraient les conditions d'éligibilité à celle-ci. Sachant les décrets très attendus, le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Stanislas Guerini avait promis en début d'année d'"aller rapidement" en ce qui concerne leur élaboration (voir notre article du 15 février 2024). Mais la concertation - celle organisée dans le cadre de l'Agenda social de la fonction publique territoriale, ainsi que la consultation du conseil supérieur de la fonction publique territoriale - a pris plus de temps que prévu.

La perspective de voir, au cours des prochaines semaines, le gouvernement ne s'occuper que des affaires courantes, faisait redouter un retard conséquent, préjudiciable aux secrétaires généraux de mairie (nouveau nom donné aux secrétaires de mairie). Pour éviter cela, l'Association des maires de France (AMF) ou encore le sénateur Cédric Vial (l'un des auteurs du rapport d'information de la délégation sénatoriale aux collectivités sur "l'attractivité du métier de secrétaire de mairie") ont interpelé ces derniers jours l'exécutif, afin qu'il publie les décrets au plus vite.

Nouveaux dispositifs de promotion interne

Ils ont été entendus, puisque les quatre décrets de mise en œuvre de la loi du 30 décembre 2023 ont pu être promulgués in extremis ce 16 juillet. Ils ont été publiés le lendemain au Journal officiel.

Les décrets étaient en particulier très attendus sur les nouveaux dispositifs de promotion interne, dérogatoires aux règles communes. La loi a d'abord mis en place un "plan de requalification" dans un emploi de catégorie B, au profit de certains secrétaires de mairie de catégorie C. Selon le principal décret (qui a été pris en consultant le Conseil d'État), seront éligibles "les fonctionnaires titulaires des grades d'adjoint administratif territorial principal de 2e classe et de 1re classe du cadre d'emplois des adjoints administratifs territoriaux" comptant "au moins quatre ans de services publics effectifs dans les fonctions de secrétaire général de mairie d'une commune de moins de 2.000 habitants". Précision importante sur le calcul de la durée de services de quatre ans : l'exercice de fonctions de secrétaire général de mairie comme adjoint administratif territorial et comme agent contractuel est à prendre en compte, s'il y a lieu.

L'autre nouvelle voie de promotion interne mise en place par la loi est pérenne. Comme pour la première, les restrictions applicables d'ordinaire à la promotion interne ne s'appliquent pas à elle. Elle doit permettre à des fonctionnaires territoriaux de catégorie C employés dans d'autres fonctions que celles de secrétaire général de mairie d'être promus en catégorie B, après avoir suivi une formation qualifiante, et ce en vue de l'exercice de la mission de secrétaire général de mairie. Pour en bénéficier, les agents concernés devront avoir à leur compteur huit années de services effectifs. Suivie dans sa totalité, la formation sera d'une durée de 56 jours, répartie en plusieurs modules, sur une période d'au plus deux ans à compter de l'entrée en formation. Elle portera sur "les activités courantes d'un secrétaire général de mairie". En fonction de la qualification, des formations professionnelles déjà suivies et de l'expérience professionnelle des agents, le contenu de la formation sera adapté, tandis que la durée de la formation sera réduite.

"Des milliers" de secrétaires de mairie "laissés de côté"

L'examen professionnel que les agents devront valider au terme de la formation consistera en un entretien d'une durée de vingt minutes avec un jury. Il débutera par un exposé de l'agent sur les acquis de leur expérience professionnelle, d'une durée de cinq minutes au plus. Une fois recruté, le lauréat aura l'obligation d'exercer les fonctions de secrétaire général de mairie pendant trois ans au minimum.

Lors de l'examen des décrets (alors à l'état de projets) au conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT), les membres syndicaux ont regretté que la loi du 30 décembre 2023 ait réservé le bénéfice des nouveaux dispositifs de promotion interne en catégorie B aux "fonctionnaires de catégorie C relevant des grades d'avancement de leur cadre d'emplois respectif", c'est-à-dire les grades C2 et C3 (voir notre article). Selon eux, les secrétaires de mairie seraient, du fait de pratiques de recrutement contraires aux textes, plusieurs milliers à être positionnés dans le grade C1.

D'après un autre décret pris en Conseil d'Etat, l'avantage spécifique d'ancienneté, que la loi du 30 décembre 2023 accorde à tous les secrétaires généraux de mairie pour le calcul de l'ancienneté conditionnant l'avancement d'échelon, sera de six mois. Cette réduction de la durée requise pour le passage à l'échelon supérieur sera octroyée automatiquement "tous les huit ans d'ancienneté dans un emploi de secrétaire général de mairie". Notons que les années accomplies comme adjoint administratif territorial, ou comme agent contractuel dans un poste de secrétaire général de mairie seront prises en compte dans le cadre du dispositif.

"Accélérateur de carrière"

S'il le souhaite, l'employeur pourra octroyer en plus, par périodes "d’au moins trois années d’ancienneté dans la fonction de secrétaire général de mairie", une réduction d’un à trois mois de la durée requise pour l’avancement d’échelon. L’autorité territoriale fondera sa décision sur l'évaluation de la valeur professionnelle de l'agent concerné.  Les représentants syndicaux au CSFPT sont vent debout contre cette possibilité, évoquant "une ligne rouge" (CFDT), ou un dispositif d'"avancement à la tête du client" (CGT).

Les années d’ancienneté dans la fonction de secrétaire général de mairie acquises avant l’entrée en vigueur du décret seront prises en compte pour l’application de ces mesures (dans la limite de huit années pour l'attribution automatique et de trois années pour celle qui intervient sur décision de l'autorité territoriale).

La loi a fixé une obligation de formation pour les agents accédant à des fonctions de secrétaire général de mairie. S'il s'agit de l'accès à un premier emploi de secrétaire général de mairie, les fonctionnaires concernés suivent, en plus de leur formation initiale, une formation spécifique à cet emploi, d'une durée de quinze jours. La formation, qui intervient dans un délai d'un an à compter de la prise de poste, est "adaptée aux besoins de la collectivité concernée".

Textes emblématiques

Par ailleurs, l'un des décrets comporte une disposition permettant d'acter la mesure de la loi prévoyant que "pour assurer les fonctions liées au secrétariat de mairie dans les communes de moins de 2.000 habitants, le maire nomme aux fonctions de secrétaire général de mairie un agent relevant d'un corps ou d'un cadre d'emplois classé au moins dans la catégorie B". Pour rappel, cette disposition entrera en vigueur le 1er janvier 2028.

Avec leurs mesures particulières (bonification spécifique d'ancienneté attribuée le cas échéant au mérite, promotion-formation dérogatoire aux règles de la promotion interne) la loi et les décrets destinés à revaloriser le métier de secrétaire de mairie "préfiguraient" un volet du projet de loi de réforme de la fonction publique prévu pour l'automne, selon les propres déclarations de Stanislas Guerini. C'est dire que les décrets qui viennent d'être publiés, sont emblématiques.

Selon des informations de la direction générale des collectivités locales (DGCL) rapportées par la CFDT, une circulaire présentera les diverses mesures issues de la loi et des décrets sur les secrétaires généraux de mairie, avec des clarifications qui sont attendues.

Selon le gouvernement, les communes et leurs groupements emploient quelque 23.000 secrétaires de mairie. 80% sont fonctionnaires, dont la majorité (60 %) relèvent de la catégorie C.

Références : décret n° 2024-826 du 16 juillet 2024 relatif au recrutement, à la formation et à la promotion interne des secrétaires généraux de mairie ; décret n° 2024-827 du 16 juillet 2024 relatif à l'avantage spécifique d'ancienneté des secrétaires généraux de mairie ; décret n° 2024-830 du 16 juillet 2024 relatif à la formation qualifiante prévue à l'article 8-1 du décret du 30 juillet 2012 portant statut particulier du cadre d'emplois des rédacteurs territoriaux ; décret n° 2024-831 du 16 juillet 2024 fixant les modalités d'organisation de l'examen professionnel prévu à l'article 8-1 du décret du 30 juillet 2012 portant statut particulier du cadre d'emplois des rédacteurs territoriaux et précisant la durée minimale d'exercice des fonctions de secrétaire général de mairie.