Une circulaire pour reconstruire "sans délai" ce qui a été détruit
Le gouvernement a annoncé ce mercredi 5 juillet avoir pris une circulaire pour permettre aux villes de reconstruire "sans délai" les bâtiments publics détruits pendant les émeutes, qui sera complétée par un texte législatif dont l'exécutif espère l'adoption au Parlement "avant la pause estivale". Le Sénat en a d'ailleurs déjà préparé un.
Le président Emmanuel Macron avait dit mardi 4 juillet devant les maires des communes concernées réunis à l'Élysée sa volonté d'adopter une "loi d'urgence" pour accélérer cette reconstruction (voir notre article). "Une circulaire de la Première ministre" a "été prise cette nuit" pour "simplifier" la reconstruction de "tout ce qui a été détruit", "sans délai", a déclaré ce mercredi devant la presse le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, à l'issue du conseil des ministres. Le texte "permet de répondre probablement à 90% voire 95% des situations", a-t-il assuré, sans plus de précisions (la circulaire n'était pas encore publiée ce mercredi après-midi).
Certaines situations nécessitent toutefois un changement de la loi, a-t-il relevé. "Si jamais vous ne les construisez pas à l'identique, si vous êtes en zone des architectes des Bâtiments de France, par exemple, il y a des délais légaux qui s'imposent avec des analyses", a-t-il dit. "Nous souhaitons pouvoir raccourcir tous ces délais". "Le président de la République nous a demandé de travailler très vite et donc on peut s'attendre" à ce qu'un "projet de loi soit présenté dans un prochain conseil des ministres ou celui d'après peut-être, et que le Parlement soit amené à examiner et adopter, nous l'espérons, ce texte avant la pause estivale", a ajouté Olivier Véran.
Adaptations ou dérogations tous azimuts
Le Sénat a pris les devants. La présidente de la commission des affaires économiques, Sophie Primas (LR), a annoncé mercredi avoir déposé une proposition de loi pour aider les communes dont des équipements publics ont été incendiés ou saccagés : mairie, postes de police municipale, écoles ou encore crèches. Inspirée par les dispositions exceptionnelles adoptées après l'incendie de Notre-Dame de Paris, en 2019, le texte prévoit des mesures dérogatoires permettant la reconstruction "dans les délais les plus brefs". "En recevant les maires à l'Élysée (mardi), le président de la République a apporté son soutien à cette proposition. Il est urgent de légiférer", a déclaré la sénatrice des Yvelines dans un communiqué.
Cette "proposition de loi d’urgence pour la reconstruction des bâtiments et équipements publics endommagés lors des émeutes", déjà en ligne sur le site du Sénat, prévoit que "les travaux nécessaires à la réfection et à la reconstruction des bâtiments et des équipements publics affectés par les actes de dégradation et de destruction liés aux évènements de voie publique survenus depuis le 27 juin 2023 bénéficient d’adaptations ou de dérogations aux règles en matière de voirie, d’environnement et d’urbanisme, en particulier en ce qui concerne la délivrance des autorisations nécessaires, les procédures et délais applicables et, le cas échéant, la mise en compatibilité des documents d’urbanisme en vigueur".
Le texte précise que pour ces travaux, s'il n'y a pas de changement de destination du bâtiment, l’article L. 111-15 du code de l’urbanisme (qui porte sur le droit de reconstruire à l’identique un bâtiment détruit ou démoli) est applicable "y compris lorsque la reconstruction ne se fait pas à l’identique" et "y compris si la carte communale ou le plan local d’urbanisme en dispose autrement".
Les autres dispositions de la proposition de loi portent sur la participation du public, les enjeux environnementaux et la commande publique ("l’acheteur peut passer des marchés sans publicité ni mise en concurrence préalable" pour les "prestations strictement nécessaires pour faire face à la situation d’urgence"). Un décret en Conseil d'État viendra préciser les choses.
"Éviter deux écueils"
Selon Olivier Véran, Emmanuel Macron a par ailleurs demandé à ses ministres de mener dans les "prochaines semaines" un "travail en profondeur" pour "comprendre ce que nous devons changer" à la suite des émeutes. Et aboutir à "des décisions concrètes, efficaces, proportionnées à la hauteur des enjeux". "Ces décisions devront éviter deux écueils" : "Celui qui consisterait à considérer que les émeutes seraient un appel à plus de dépenses publiques dans les quartiers", et celui des "vieilles recettes", des "mesures de répression prises dans l'urgence au niveau régalien", a encore dit le porte-parole. Il a d'ores et déjà estimé qu'il y avait un "besoin d'autorité", un "besoin d'efficacité dans l'action publique" et un "besoin de solidarité humaine".
On saura enfin que le gouvernement pourrait envisager de "suspendre des fonctionnalités" sur les réseaux sociaux en cas de nouvelles émeutes mais n'a pas l'intention de procéder à un "black-out généralisé" des plateformes. "Ça peut être des suspensions de fonctionnalités", a déclaré le porte-parole du gouvernement : "Vous avez par exemple des fonctions de géolocalisation, sur certaines plateformes, qui permettent à des jeunes de se retrouver à tel endroit, en montrant des scènes, comment mettre le feu etc. C'est des appels à l'organisation de la haine dans l'espace public et là vous avez autorité pour pouvoir suspendre." Il était invité à clarifier des propos controversés tenus la veille par Emmanuel Macron devant les maires. Le ministre chargé de la Transition numérique, Jean-Noël Barrot, a pour sa part proposé mardi soir au Sénat la mise en place d'un groupe de travail sur les mesures à prendre en cas d'émeutes, qui pourraient être intégrées au projet de loi pour "sécuriser" internet.