Un plan de relance pour la 5G industrielle
Le gouvernement peine à convaincre les industriels à se saisir des opportunités de la 5G. Pour les aider à se lancer, le ministère chargé de l’industrie vient d’affecter 480 millions d’euros à la création de plateformes et de solutions 5G souveraines. Une mission va par ailleurs identifier les raisons de la faible appétence des acteurs économiques pour cette technologie.
Vendredi 2 juillet, le secrétaire d’État aux communications électroniques, Cédric O, était à Rennes pour visiter l’un des pôles d’excellence tricolores de la 5G. Au programme, une expérience de maintenance assistée d’un terminal billettique en gare de Rennes et le téléchargement en quelques secondes d’un film de deux heures… des cas d’usage mis en scène par la SNCF dont les technocentres expérimentent la 5G industrielle, déployée dans la bande des 26 Ghz. Et à la différence de la 5G actuelle, déployée sur les bandes 700 Mhz et 3,5 Ghz pour soulager les réseaux 4G, cette "vraie 5G" entend révolutionner les usages.
Un risque de perte de compétitivité
À la différence de la 5G grand public, celle-ci repose sur des fréquences dites millimétriques qui seront mises aux enchères aux alentours de 2023. Bénéficiant d’une infrastructure 100% 5G, elle promet des débits faramineux, un temps de latence quasi nul et des échanges de données ultrasécurisés, autant de caractéristiques qui en font une technologie dédiée à l’industrie. Force est cependant de constater qu’en dehors de quelques acteurs (Orange, SNCF, RATP, Enedis…), les industriels français ne se précipitent pas pour lancer des investissements dans la 5G. Aucune annonce majeure n’a par exemple été faite dans ce domaine lors du Mobile World Congress qui vient de fermer ses portes à Barcelone. Cet attentisme inquiète le gouvernement, la France risquant d’y perdre sur les tous les tableaux : compétitivité, souveraineté et emploi. "Nous devons prendre notre destin en main avant que d’autres ne le fassent à notre place", a mis en garde ce 6 juillet la ministre déléguée à l’industrie, Agnès Panier-Runacher, à l’occasion de la présentation d’un plan de relance de la 5G.
Offre française souveraine
Le gouvernement va en effet mobiliser 480 millions d’euros de financements publics d’ici 2022 et "jusqu’à 735 millions d’euros" d’ici 2025 dans l’espoir de générer un investissement total (avec le privé) de 1,7 milliards d’euros et de créer plus de 20.000 emplois. L’objectif de l’État est notamment de faire émerger des usages dans des domaines comme l’agriculture, l’automobile ou le bâtiment, aujourd’hui peu mobilisés sur la 5G. Les services publics sont également cités avec la gestion des flux de circulation, la smart city ou encore l’énergie. Il s’agit également de favoriser l’émergence d’une "offre française souveraine" et de créer une filière de formation autour du déploiement de la 5G. Parallèlement, dès septembre, une mission va plancher sur les moyens pour transformer la 5G en levier de compétitivité des entreprises françaises. Sa mission sera de "comprendre les éventuels freins à l’appropriation de la 5G" et de préparer l’arrivée de la… 6G.
Multiplication des micro-antennes
Parmi les points de blocages, la mission reviendra certainement sur les questions sanitaires et environnementales, au cœur de la fronde anti 5G de nombreux élus municipaux. Si les premières mesures réalisées par l’ANFR (lire ci-dessous) montrent que la 5G des bandes millimétriques ne va pas faire exploser les niveaux d’exposition aux ondes, elles ne lèvent pas pour autant toutes les interrogations. Dans son dernier rapport (voir notre article du 20 avril 2021), l’Anses ne faisait ainsi que constater le manque d’études scientifiques sur les effets sanitaires des ondes millimétriques. En outre, le test rennais prouve que la "bonne" couverture 5G passera par une multiplication des micro-antennes (small cells) dans l’espace public. Une densification des antennes qui placera les élus en première ligne pour gérer "l’acceptabilité sociale" de la technologie.
Dans le cadre des expérimentations 5G menées à Rennes, l’agence nationale des fréquences (ANFR) a mené une campagne de mesures des champs électromagnétiques générés par la 5G utilisant la bande des 26 Ghz. Les résultats de ces mesures se révèlent rassurants pour l’ANFR avec des niveaux d’exposition "de l’ordre de 0,4 V/m à 3,2 V/m selon les configurations de tests", soit des valeurs "très inférieures à la valeur limite réglementaire, fixée à 61 V/m pour cette bande de fréquences". En outre, l’agence relève une exposition "très localisée", celle-ci baissant fortement des que l’on s’éloigne de l’antenne de quelques mètres. De même, l’exposition diminuerait avec l’augmentation du nombre d’utilisateurs de l’antenne 5G. Enfin, même avec un usage soutenu, comme le téléchargement d’un fichier d’un Go, "les niveaux d’exposition maximum relevés ne dépassent pas 1 V/m", se situant dans la valeur moyenne des mesures réalisées en France par l’ANFR. |