Transformer les bureaux en logements : un texte de simplification adopté à l'Assemblée
L'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité ce jeudi 7 mars un texte visant à faciliter la transformation de bureaux en logements, même si des députés de tous bords conviennent qu'il n'est qu'un petit pas face à la profonde crise que traverse le secteur.
Votée ce 7 mars en première lecture par les 80 députés présents, issus de quasiment tous les groupes (le groupe GDR à majorité communiste n'a pas pris part au scrutin), la proposition de loi du MoDem Romain Daubié (Ain) visant à "faciliter la transformation des bureaux en logements" est désormais attendue au Sénat.
Selon le ministre délégué au Logement, Guillaume Kasbarian, ce texte "fait oeuvre utile en rajoutant de l'offre dans un contexte où le marché est bloqué". En Ile-de-France, il y aurait 4,5 millions de mètres carrés de bureaux vides, estiment le député Daubié et le gouvernement. Faciliter leur transformation est indispensable face aux nombreuses difficultés pour se loger et répond aussi à une "nécessité écologique", insiste le parlementaire. En sachant que "la vacance des bureaux ne touche pas que l’Île-de-France" et que les mesures doivent donc "pouvoir s’appliquer partout".
Afin de réduire les délais, son texte prévoit des mesures de simplification comme une dérogation au plan local d'urbanisme quand un bureau est transformé en logement. Plus précisément, le premier article vise à permettre à l’autorité compétente en matière de permis de construire de déroger au PLU en tenant compte de la nature du projet et de la zone d’implantation.
Il crée également un "permis de construire réversible", qui permet de changer la "destination" d'un bâtiment grâce à un rapprochement des normes incendies et acoustiques. Romain Daubié, qui s'inspire sur ce point de ce qui a été fait en Seine-Saint-Denis pour le village olympique, a insisté sur le fait qu'il s'agirait d'un outil "laissé à la main des élus locaux qui pourront choisir de l’utiliser ou non".
Une partie de la proposition de loi est par ailleurs consacrée aux Crous, afin que davantage de bureaux puissent devenir des logements étudiants : lors de projets de rénovation et de construction de résidences étudiantes, les Crous bénéficieraient de deux avantages actuellement réservés aux bailleurs sociaux, à savoir le recours aux marchés de conception-réalisation et l’application de bonus de constructibilité prévus par les documents d’urbanisme.
Enfin, deux articles doivent faciliter la transformation de locaux professionnels en logements au sein des copropriétés : les décisions concernant un changement d'usage seraient soumises à la règle de la majorité simple.
Plus débattue, les députés ont validé une mesure de soutien financier aux collectivités, permettant aux maires d'assujettir des opérations de transformation de bureaux en logements à la taxe d'aménagement. La droite s'y est opposée en redoutant un renchérissement du coût du logement et le gouvernement a exprimé ses réserves. Là encore, l'auteur de la proposition de loi a souligné qu'il s'agirait seulement d'une possibilité pour les collectivités. Répondant à ceux qui estiment que l'assujetissement à la taxe d'aménagement "menacerait l’équilibre économique des opérations de transformation de bureaux en logements, dont le coût est déjà élevé", Romain Daubié a au contraire fait valoir que "de nombreux maires bloquent des projets de transformation de bureaux en logements" parce que "d’un point de vue comptable, il est plus intéressant de favoriser des opérations de démolition-reconstruction afin de percevoir la taxe d’aménagement, voire de laisser des bureaux vacants pour encaisser une taxe foncière plus élevée que pour les logements".
Sans s'opposer à la proposition de loi, de nombreux élus ont souligné qu'elle n'était qu'une "petite pierre", loin de répondre à la crise du secteur. Ce texte répond à une "problématique périphérique", a ainsi estimé le député David Taupiac, du groupe indépendant Liot. "C'est un outil de niche qui ne va pas répondre à la crise structurelle du logement", a abondé l'écologiste Sabrina Sebaihi. Dans un communiqué paru après le vote, le groupe MoDem, membre de la majorité présidentielle, a lui-même rappelé "l'attente d'un grand projet de loi sur le logement".
"Je n’ai pas la prétention de penser que cette proposition de loi répondra à elle seule à la crise du logement que nous traversons mais j’ai la conviction qu’une crise plurielle appelle des solutions plurielles. Notre assemblée examine depuis plusieurs semaines des textes proposant des réponses à cette crise, souvent dans un esprit de consensus", avait d'ailleurs déclaré Romain Daubié en introduisant les débats, citant le texte sur l’encadrement des locations saisonnières et celui sur la lutte contre les copropriétés dégradées.