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Territoires d'industrie : les élus réclament plus d'adaptations locales

Seize protocoles d'engagement ont été signés dans le cadre du programme Territoires d'industrie, sur un total de 141 territoires labellisés. Le point d'étape présenté par le délégué aux Territoires d'industrie, le 12 juin 2019, lors d'une rencontre nationale organisée par l'Assemblée des communautés de France (ADCF) et Régions de France, a mis en avant un nombre très (trop ?) élevé de projets. Quelques thématiques prioritaires remontent, comme l'innovation, l'attractivité des métiers de l'industrie et les difficultés de recrutement. Mais avant même la mise en œuvre des actions, des élus réclament une adaptation locale des procédures et mettent en garde contre une désillusion des industriels.

À l'heure actuelle, seize protocoles d'engagement de Territoires d'industrie, comportant 250 actions, ont été signés et une trentaine de signatures devraient intervenir d'ici l'été 2019. Olivier Lluansi, délégué aux Territoires d'industrie, a réalisé un point d'étape sur ce programme lancé en novembre 2018. 141 territoires ont été labellisés dans ce cadre, représentant 30% du territoire national, 40% de la population active et 55% des emplois industriels. Ils vont bénéficier d'un fléchage prioritaire de financements existants correspondant à l'équivalent de 1,3 milliard d'euros. Associés à des services, ces financements doivent leur permettre de se développer et enclencher une relance industrielle.
"Les territoires se sont emparés de ces sujets, il y avait une envie d'industrie", a signalé Olivier Lluansi, précisant aussi que le nombre de projets identifiés était peut-être un peu trop élevé. Les 29 Territoires d'industrie qui ont permis de réaliser ce premier point d'étape comportent 389 fiches projets, soit entre dix et quinze projets par territoire.
Quatre thèmes avaient été identifiés par le gouvernement dans le cadre du dispositif : recruter, innover, attirer des projets et simplifier, auxquels le délégué a ajouté un cinquième, installer (foncier).

L'écologie, dimension incontournable

Selon ce premier bilan d'étape, l'innovation est le thème qui ressort le plus parmi les projets analysés, dont l'innovation numérique (30%) et la transition écologique (11,5%). Mais d'après le délégué "les fiches ne sont pas encore assez claires et il y a un travail collectif à faire pour mieux structurer le parcours d'un chef d'entreprise dans ce domaine". En matière de numérique, l'État a mis sur la table 80 millions d'euros pour permettre à 10.000 entreprises industrielles de réaliser un diagnostic Industrie du futur. Mais à l'heure actuelle, peu encore sont entrées dans cette phase de diagnostic. "Il y a besoin de donner de l'appétit aux entreprises sur ce sujet, notamment aux PME", a insisté Philippe Varin, président de France Industrie. Par ailleurs, sur le thème de l'innovation, le délégué a incité chaque territoire à intégrer une dimension de transition écologique, considérée comme essentielle. 
Vient ensuite le thème de l'attractivité des métiers de l'industrie et des territoires, avec 23% des fiches. Il s'agit d'une grande préoccupation des acteurs, avec notamment la question du déficit d'image de l'industrie auprès des jeunes et de leur famille. Une préoccupation qui pousse Virginie Carolo, vice-présidente de Caux Vallée de Seine, à demander à l'État une véritable campagne de marketing au niveau national.

Plus de la moitié des chefs d'entreprises ont du mal à recruter

Le recrutement et la formation concernent quant à eux 18,5% des fiches recensées, avec des chefs d'entreprises qui ont de plus en plus de mal à trouver de la main-d'œuvre. Ainsi, d'après Philippe Varin, alors qu'il y a 2,5 millions de personnes sans emploi, plus de la moitié des chefs d'entreprises sont dans ce cas. "Sur ce domaine, il faut se saisir des nouveaux outils destinés à la formation comme les centres de formation d'apprentis (CFA) d'entreprise, a souligné Olivier Lluansi. Nous n'avons pas consommé les 15 milliards d'euros disponibles sur la formation professionnelle", dans le cadre du plan d'investissement dans les compétences (PIC), a-t-il aussi insisté. La question de l'installation concerne elle 13% des fiches mais "il y a des injonctions contradictoires entre les exigences sur les friches industrielles et les difficultés d'installer une entreprise sur un territoire", a fait remarquer Olivier Lluansi. Un sujet qui, comme pour l'Industrie du futur, devrait faire l'objet d'un travail collectif.

34 fiches seulement pour la simplification

Quant à la simplification, dont tout le monde parle, elle ne fait l'objet que de 34 fiches (9%). Un retour qui n'est pas jugé à la hauteur du message de demande de simplification qui est passé, selon le délégué. Pour Olivier Lluansi, "si on en reste à ces 34 fiches, le mode de travail correspondant à Territoires d'industrie ne pourra pas fonctionner, nous serons dépourvus de levier pour avancer sur ces sujets", a-t-il indiqué, demandant aux parties prenantes de faire remonter d'ici juillet 2019 d'autres points concrets de blocage, des situations concrètes sur des difficultés procédurales. Objectif : s'arrêter sur une dizaine de fiches emblématiques par région et commencer à agir. "Dès 10 à 15 fiches sur une région, nous pourrons aller sur place, sous l'autorité du préfet de région, et réunir les entreprises qui rencontrent ces difficultés, avec les administrations et experts concernés, et voir comment résoudre ces problèmes", a précisé Olivier Lluansi.
Pour Virginie Carolo, le fait qu'il n'y ait que 34 fiches sur la simplification n'est pas un problème, car "nous avons toujours le même sujet, a-t-elle signalé. Dans ces fiches, il y a comme le signal d'une essence à changer dans les services de l'État". Un changement de culture qui permettrait d'accorder le temps administratif avec celui de l'entreprise. Jacques Chabal, président de la communauté du Val'Eyrieux, est encore plus alarmiste. "S'il n'y a pas une adaptation des procédures et du dispositif, nous allons vers une désillusion des industriels ; et nous ne voyons pas non plus le bénéfice d'être dans ce programme par rapport au droit commun. Il faut prendre en compte les différences qui sont les nôtres sur le terrain, car le cadre est rigide, voire psychorigide." Une critique qui s'ajoute à celles formulées par les présidents des régions Hauts-de-France et Grand Est, la semaine dernière, lors de leur audition au Sénat.

Pas de dérogation au droit commun ?

Message reçu par Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Économie et des Finances.  "Je ne sais pas répondre à une demande générique de simplification, a-t-elle répondu, et ce n'est de toute façon pas le grand soir qui fonctionnera mais un travail sur les retours d'expériences." Quant aux demandes d'aller au-delà du droit commun, Agnès Pannier-Runacher oppose une fin de non-recevoir, mais propose de réfléchir au besoin d'ingénierie qui émerge pour le montage de projets.
Enfin, "les autorisations administratives correspondent à un sujet que nous allons prendre dans le cadre du pacte productif 2025", a-t-elle affirmé. Annoncé en avril 2019, ce pacte doit permettre de viser en 2025 le plein emploi avec plusieurs axes de travail, menés avec toutes les parties prenantes (syndicats, entreprises, associations, parlementaires…) : faire émerger des projets industriels créateurs d'emploi, amplifier l'effort de formation, renforcer l'appropriation par les industriels de la transition écologique, et proposer une trajectoire de baisse de la fiscalité de production. Un sujet délicat sur lequel l'ADCF tente d'accorder ses violons avec le Medef.

 

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