Serre Chevalier Vallée, premier domaine skiable à produire son électricité (05)
À Serre-Chevalier Vallée, les changements liés au Covid-19 n’ont fait que conforter la stratégie environnementale engagée par la Compagnie des Alpes, exploitante du domaine skiable et soutenue par les élus. En 2023, le domaine qui s’étend sur six communes produira 30 % de son électricité, via trois modes de production d’énergie renouvelable.
« Un domaine skiable est d’abord un domaine de montagne et à ce titre, il a vocation à exister toute l’année, estime Patrick Arnaud, directeur général du domaine skiable Serre Chevalier Vallée. Notre mission est de faire découvrir cet environnement naturel d’exception et de le rendre accessible au plus grand nombre, en toute sécurité. » Conscients de la valeur de cet espace naturel, où les pistes de ski occupent 10 % seulement du domaine, les dirigeants du domaine skiable s’engagent dès 2016, en lien avec les élus locaux, dans une transition qui passe par une manière radicalement nouvelle d’exploiter le site : reconquête de la biodiversité, neutralité carbone pour 2030, pas de création de nouvelles pistes, engazonnage de nouveaux espaces… Emeric Salle, maire de La Salle-les-Alpes et vice-président de la communauté de communes du Briançonnais confirme : « la production d’électricité et l’objectif d’une autosuffisance énergétique entrent pleinement dans le plan climat air énergie territorial, voté dès le début de notre mandat. Un domaine skiable, même s’il est lié aux activités de loisirs, doit être précurseur en matière d’énergies renouvelables et de respect de l’environnement. Ceci tout autant pour nos populations que pour nos visiteurs. N’oublions pas que la montagne est le thermomètre du changement climatique. »
Trois types de production d’électricité
Convaincue que la montagne représente avec le vent, le soleil et l’eau, un fort potentiel énergétique, l'équipe dirigeante du domaine skiable, soutenue également par la région Sud, a lancé la fabrication d’énergie électrique selon trois modes. « Je me félicite, dit Patrick Arnaud, de l’engagement de notre groupe Compagnie des Alpes et du soutien financier de la région Sud, qui nous ont permis de réaliser au mieux et au plus vite, les études et expérimentations nécessaires. Nous avons acquis là un savoir-faire que nous souhaitons partager largement aujourd’hui. »
Pour ce qui concerne l’énergie produite par le vent, une éolienne à axe vertical, adaptée au vent faible a été installée, mais abandonnée car trop fragile par vents forts, et une autre à axe horizontal pour vent fort. Toutes deux sont assez petites, afin de respecter le paysage. Conclusion de la démonstration : « nous savons poser une éolienne de 12 mètres à 2.400 mètres d’altitude. La production est satisfaisante, mais elle coûte cher. Cependant, dans le cadre plus large d’un éventuel plan national éoliennes par exemple, nous disposons de toutes les données techniques et économiques pour contribuer. » À ce jour, l’éolien produit 2 % de l’électricité consommée par le domaine.
Quant à l’énergie solaire, l’expérience a montré le très bon fonctionnement des panneaux photovoltaïques, avec un rendement « au-delà des attentes » et ce, pour deux raisons : la température reste basse y compris l’été et l’effet albédo (réverbération de la lumière sur la neige) est très fort. Grâce au concours de fabricants novateurs, le domaine skiable a fait réaliser des panneaux photovoltaïques souples et sur mesure, avant de les installer sur les façades des télésièges. Une innovation reprise par le constructeur Poma, qui vend aujourd’hui des transports par câble ainsi conçus, tandis que plusieurs stations de ski ont, elles aussi, rénové leurs télésièges. « Sur les remontées mécaniques, le photovoltaïque est devenu un standard », estime Patrick Arnaud. Bien sûr, les toits des grandes installations accueillent également les panneaux solaires. Au total, 700 m² de panneaux solaires ont été installés, pour une production annuelle de 420 mégawatts, soit 8 % de la production totale d’électricité.
L’hydroélectricité, la plus performante
Hydrostadium, filiale d’EDF spécialisée dans la création de parcours d'eau vive et de centrales hydroélectriques a réalisé les études montrant la faible rentabilité de petits barrages, mais une autre solution innovante a émergé. « Alors qu’une microcentrale sur le torrent du Bez s’avérait inopérante, l’utilisation des conduites existantes pour transporter l’eau qui sert à fabriquer la neige se révèle très pertinente », explique Emeric Salle. L’installation d’une turbine électrique sera donc prochainement mise au vote du conseil municipal de La Salle-les-Alpes. L’hiver, l’eau du torrent est pompée pour fabriquer de la neige tandis qu’au printemps, la neige naturelle qui fond descend vers les turbines pour produire de l’électricité. « De fait, l’énergie hydroélectrique est le plus efficace des trois modes de production, avec 4 gigawatts produits chaque année, soit 90 % de la production totale », précise Patrick Arnaud. L’autosuffisance énergétique du domaine est visée pour 2030, en complément d’une démarche ambitieuse d’économie d’énergie déjà engagée.
Des évolutions réglementaires
La délégation de service public du syndicat intercommunal des communes de La Salle les Alpes et du Monêtier-les-bains au domaine skiable a été mise à jour en 2017, permettant aux communes de donner les autorisations nécessaires. Par ailleurs, des évolutions réglementaires peuvent devenir incontournables pour ajuster les autorisations à la réalité des usages. Exemple : la limitation de pompage de l’eau à laquelle est contraint le domaine skiable pourrait être adaptée, si les installations servent à produire de l’électricité toute l’année dans l’intérêt de tous.
Outre ces résultats très probants, la démarche a d’autres atouts. D’une part, un domaine skiable permet de faire les installations (éolien, solaire) avec un impact marginal sur l’environnement puisque le réseau électrique est déjà là, partout. Point n’est besoin de créer de nouvelles routes ou de déboiser pour disposer d’espaces vierges ! D’autre part, le personnel dispose déjà des compétences nécessaires à la mise en œuvre et à la maintenance de ces équipements, à savoir l’électricité et la mécanique. « Cela permet d’accroître leur savoir-faire et de conforter les emplois », précise Patrick Arnaud. Enfin, autre piste : « On peut imaginer, utiliser les réserves collinaires pour stocker l’eau et ainsi, grâce aux turbines sur les torrents, produire de l’énergie à des périodes où le besoin est important », explique Emeric Salle. Produire de l’énergie hydroélectrique tout au long de l’année, la voie pour l’autosuffisance énergétique recherchée.
Les chiffres clés
- 3 types d’énergies renouvelables sur le même site : éolien, photovoltaïque et hydroélectrique
- 5 gigawatts produits chaque année
- Objectif à l’horizon 2023 : produire 30 % de la consommation du domaine skiable
Les coûts et financeurs
- Budget études 300.000 €
- Investissement total : 3 M€
- Subvention de la Région Sud : 500.000 €
- Coût de fonctionnement annuel : 50.000 €
Communauté de communes du Briançonnais
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Nombre de communes :
Emeric Salle
Domaine skiable Serre Chevalier Vallée
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