Salon des maires – Refonder l’acte de construire dans un contexte de pénurie de foncier
Comment continuer de construire, voire construire davantage de logements dans un contexte de pénurie de foncier ? À l’ère du ZAN, les acteurs du logement présents au Salon des maires et des collectivités cherchent des pistes nouvelles du côté de la réhabilitation des friches, de la rénovation de l’existant... et envisagent la démolition comme une hypothèse de travail de plus en plus pertinente.
Face à la pénurie de foncier accentuée par les injonctions du ZAN, le zéro artificialisation nette, les acteurs du logement s’interrogent : doit-on construire ou plutôt rénover ? Pour Gabriel Bourdon Gomez, directeur du pôle valorisation et revitalisation chez Ville en œuvre (filiale du groupe Scet), qui intervenait le 20 novembre dans le cadre d'une conférence organisée par l'Union sociale pour l'habitat (USH) sur le Salon des maires, le premier gisement intéressant de foncier, ce sont clairement les friches. Des sites dont il faut au préalable "qualifier la vocation" en caractérisant "la capacité à donner du potentiel résidentiel". Ensuite, une analyse fine de marché en lien avec "la dynamique du territoire" est indispensable, sans oublier le contexte opérationnel, toujours déterminant, qui nécessite d’identifier les investisseurs potentiels "et de comprendre leurs besoins".
Directrice adjointe de l’USH en charge du pôle politiques urbaines, Raphaële d’Armancourt rappelle que "la question de la rénovation du parc est un élément de notre quotidien". "Malgré le ZAN, souligne-t-elle, il existe des besoins de logement à satisfaire." Des besoins identifiés dans une étude lancée par l’USH en 2023 qui projetait alors 518.000 logements à produire sur la période 2024-2040, dont 112.000 logements sociaux. Au final, en 2023, seuls 80.000 logements sociaux sont sortis de terre, "on est donc assez loin du compte". Le constat est simple, "la demande de logements sociaux augmente depuis plusieurs années (+15%) y compris sur les marchés dits détendus", explique la représentante de l’USH, qui rappelle qu’"aujourd’hui, 2,6 millions de ménages sont en attente d’un logement social". Alors pour répondre à cette demande exponentielle, au-delà de l’acte de construire, "il faut puiser dans l’existant à travers la surélévation ou encore la densification". D’ailleurs, à ce sujet, elle invite les élus à interpeller les bailleurs "pour voir comment utiliser le potentiel de leur parc".
"Les élus connaissent bien leur territoire ainsi que leurs besoins"
Vu depuis la fenêtre des entreprises du bâtiment, résume le président de la FFB Grand Paris, Philippe Servalli, "ce qui inquiète, c’est qu’il n’existe pas un modèle unique dans la transition écologique" qui s’impose à tous. Il plaide à ce titre pour une "trajectoire du ZAN assouplie", en concertation avec les élus et en fonction des spécificités des territoires : "Les élus connaissent bien leur territoire ainsi que leurs besoins" et sont donc les mieux à même de décliner les exigences du ZAN à l’échelon local.
La solution miracle consiste-t-elle désormais à reconstruire la ville sur la ville ? "C’est une réponse adaptée à certaines agglomérations mais pas une solution miracle pour relancer le secteur", prévient Philippe Servalli. Le marché de la rénovation des centres-villes, estime-t-il, reste au final très limité en raison des fortes contraintes techniques liées à ce type d’opérations. Des opérations également plus longues en termes de délais de livraison et plus onéreuses de l’ordre de +10%.
En bout de ligne, explique Raphaële d’Armancourt, il y a "le tabou de la démolition". Des opérations dont le bilan carbone élevé est souvent mis en avant "alors que sur des opérations concernant l’habitat indigne, il n’y a pas à hésiter". Il suffit, dit-elle, "de regarder la question de l’impact environnemental à la bonne échelle car si on démolit 100 logements pour en produire 450 et qu’on y adosse des équipements publics...", le bénéfice de l’opération semble plus évident. Quant à la question de la densification, la représentante de l’USH croit aux vertus "d’une densification douce qui passe par l’action des collectivités, un foncier stratégique et des opérateurs disposés à faire". En conclusion, Philippe Servalli appelle à "du pragmatisme dans les mesures".