Réforme des retraites : les nouveautés figurant dans la mouture du "49-3"
Après l'activation du "49-3", le gouvernement a fait connaître les "améliorations" qu'il entendait ajouter au projet de loi de réforme des retraites. L'extension de la retraite progressive à la fonction publique et l'aménagement des fins de carrière en font partie. De plus, les modalités de transition entre l'actuel et le futur systèmes sont précisées.
Le recours du gouvernement à l'article 49 alinéa 3 de la Constitution a eu pour effet de mettre fin précipitamment à la discussion en première lecture à l'Assemblée nationale sur le projet de loi instituant un système universel de retraite. Mais le texte sur lequel le gouvernement a engagé sa responsabilité n'est pas celui qu'il a déposé en conseil des ministres. Il s'agit d'une version "améliorée" et "profondément enrichie", a défendu le Premier ministre, samedi 29 février. L'exécutif a en effet retenu de nombreux amendements qu'il a lui-même préparés, ou émanant de sa majorité, mais aussi quelques amendements de l'opposition. Plusieurs ont pour objectif d'intégrer à la réforme les mesures issues de la concertation avec les partenaires sociaux, que le Premier ministre a annoncées le 13 février. Pour la fonction publique, il s'agit de dispositions sur la transition entre l'actuel et le futur système et sur la retraite progressive. Le gouvernement a aussi gravé dans le marbre de la loi plusieurs dispositions, qui initialement, devaient être définies par des ordonnances. Ainsi, il abaisse de 29 à 22 le nombre des ordonnances qu'il aura à préparer pour mettre en œuvre la réforme. Tour d'horizon des nouvelles dispositions qui figurent dans le texte et qui concernent la fonction publique territoriale.
Période de transition
Les cotisations des fonctionnaires ne subiront pas d'effet de seuil en 2025, car elles évolueront au cours d'une période de transition de 20 ans. La "convergence" des cotisations salariales dues par les agents publics avec le système universel de retraites aura lieu en 2043. Les employeurs publics prendront transitoirement en charge une part plus importante des cotisations que celle prévue à long terme (60%). Cette prise en charge diminuera à mesure que la part salariale remontera pour atteindre 40%. Initialement, il était prévu qu'une ordonnance précise les modalités de la convergence du régime de cotisation des fonctionnaires vers le système cible. La période de transition ne devait pas excéder quinze ans.
Retraite progressive
La retraite progressive est étendue à partir de 2022 aux fonctionnaires et aux agents contractuels de droit public. Les règles spécifiques en matière de temps partiel applicables aux fonctionnaires - notamment la possibilité de surcotisation - seront conservées. Un décret en Conseil d’État adaptera la retraite progressive aux spécificités de la fonction publique. Les travailleurs handicapés qui rempliront les conditions d'un départ en retraite anticipé au titre du handicap pourront bénéficier de la retraite progressive dès l'âge de 55 ans.
Compte épargne-temps
Les agents pourront demander l'ouverture d'un compte épargne-temps de fin de carrière. Les jours épargnés pourront être utilisés au plus trois ans avant l’âge de la retraite à taux plein. L'agent conservera ses droits en cas de changement d’employeur public. Les modalités d'utilisation du compte seront fixées par décret.
Compte professionnel de prévention
Les fonctionnaires et les contractuels de droit public nés depuis le 1er janvier 1975 bénéficieront du compte professionnel de prévention (C2P) à partir de 2025. Mais le suivi des expositions aux risques professionnel sera mis en place dès 2022. En 2025, le compte pourra être crédité du stock de points correspondant aux expositions subies pendant les années 2022 à 2024.
Catégorie active
- Pour les agents nés en 1975 ou après, et éligibles à la catégorie active (mais pour des métiers non considérés comme dangereux), il sera tenu compte du nombre d'années passées dans la catégorie active avant le 1er janvier 2025. Celles-ci offriront la possibilité de partir à la retraite plus tôt. Et ce même si l’agent n’atteint pas le minimum requis actuellement. L’âge d’ouverture du droit à retraite et la limite d’âge seront fixés par décret.
- Le policier, ou le pompier qui sera reconnu inapte à l'exercice de ses fonctions "pour des causes imputables au service", bénéficiera d’un droit à la retraite anticipée, "quelles que soient ses affectations postérieures à la déclaration de cette inaptitude."
- Une disposition permet aux policiers de cumuler "entièrement" leur pension de retraite avec des revenus d’une activité professionnelle, et ce "à partir de la date à laquelle ils atteignent la limite d’âge afférente à leur emploi."
- Les égoutiers recrutés avant le 1er janvier 2022 conserveront la possibilité d'un départ anticipé à 52 ans.
- Les infirmiers ayant opté pour leur maintien en catégorie B (et ayant donc renoncé à la catégorie A) conserveront le bénéfice de la catégorie active. Ce maintien "vaudra tant pour ceux qui ont accompli la durée de services actifs avant 2025 que ceux qui compléteront cette durée à compter de 2025 dans les mêmes conditions qu’aujourd’hui."
- Dans les six mois suivant la publication de la loi, le gouvernement remettra au Parlement, un rapport "sur la possibilité d’attribuer des points de solidarité aux citoyens s’engageant en tant que sapeurs-pompiers volontaires, sous condition d’une durée minimale fixée par décret."
Impact de la réforme sur les collectivités territoriales
Un rapport sera élaboré sur l’impact de la réforme sur les collectivités territoriales. Le gouvernement devra le remettre au Parlement au plus tard le 1er janvier 2024. "Les différentes mesures relatives à la retraite des agents de la fonction publique territoriale vont se traduire par une modification des cotisations patronales pour les employeurs territoriaux et des cotisations salariales pour les fonctionnaires territoriaux", justifie l'auteur de l'amendement, le président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, Jean-René Cazeneuve.
Ce mardi 3 mars, après la séance des questions au gouvernement, les députés devaient débattre de deux motions de censure déposées le 29 février, après l'annonce par le Premier ministre de l'utilisation de l'article 49-3 de la Constitution. Les explications de vote et le vote sur ces deux motions (l'une déposée par le groupe Les Républicains et l'autre par les groupes Socialistes, La France insoumise et Gauche démocrate et républicaine) devaient avoir lieu dans la soirée.
Mercredi, les députés examineront en séance le projet de loi organique relatif au système universel de retraite, dont la discussion doit s'achever le dimanche 8 mars.