Réforme des retraites : quel impact sur le champ médicosocial ?
Le Conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) a émis un avis majoritairement négatif sur le projet de loi portant la réforme des retraites. Il y est question du sort des professionnels de l'aide à domicile ou en établissement, du cas particulier des aidants, des personnes handicapées... sans oublier le possible impact de la réforme sur le RSA.
Alors qu'a été donné lundi dans l'hémicycle de l'Assemblée le coup d'envoi évidemment houleux de la discussion de la réforme des retraites, que la troisième journée de mobilisation s'est déroulée ce mardi 7 février dans les rues un peu partout en France… certains aspects de la réforme sont passés quelque peu inaperçus. Dont ses divers impacts dans le champ médico-social. L'avis rendu par le Conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (PLFRSS) contenant la réforme apporte à ce titre un éclairage intéressant. Réuni le 2 février, le Conseil a majoritairement émis un avis défavorable sur le texte (12 voix pour, 18 voix contre, 38 membres "ne prenant pas part au vote", ce qui était le cas des représentants de l'Etat).
Cet avis motivé publié le 6 février souligne tout d'abord que la CNSA, qui représente la branche autonomie de la sécurité sociale, est naturellement attentive à l'équilibre des comptes entre les branches. Et que du point de vue de la branche autonomie, cet équilibre ne semble pas assuré à moyen terme du fait de la courbe démographique et de l'absence, pour l'heure, de "grande loi autonomie".
Dans ce contexte, le Conseil de la CNSA alerte sur "l’impact potentiel d’un allongement de la durée du travail sur l’équilibre des autres branches [que la branche vieillesse], en particulier pour les professions présentant un niveau élevé de pénibilité, si cette dernière n’était pas bien prise en compte". Et souligne le sort particulier des professionnels du secteur de l’autonomie, que ce soit en établissement ou à domicile, ceux-ci étant "particulièrement exposés à la pénibilité et à l’usure, y compris psychologique, et aux difficultés de maintien dans l’emploi pour les séniors". Ce secteur présente d'ailleurs "un taux d’accidents du travail / maladie professionnelle et d’absentéisme parmi les plus élevés, devant le secteur du BTP", est-il souligné. Il faut donc à la fois bien tenir compte de "la spécificité des tâches" liées à ces métiers et assurer des "parcours de reconversion professionnelle". Autre point mis en avant : l'aide à la personne, ce sont des métiers "fortement féminisés", de faibles salaires et, bien souvent, des "carrières hachées".
Le Conseil de la CNSA met par ailleurs l'accent sur le fait que le projet de loi prévoit de créer une "assurance vieillesse des aidants" (AVA) et d'élargir le dispositif actuel de validation de trimestres pour ces mêmes aidants. Une bonne chose en soi. Dans sa version actuelle toutefois, le texte ne permettrait pas de "prendre en compte la réalité de la situation des aidants, exposés à la fois à une usure et à des carrières très hachées ou arrêtées précocement". Les membres du Conseil espèrent notamment que de nouvelles mesures seront prises pour "augmenter le recours" au congé de proche aidant (CPA) et à l’allocation journalière du proche aidant (AJPA).
Enfin, ils alertent sur les mesures qui concernent les personnes invalides ou en situation de handicap. Ces dernières, du fait de "taux de chômage et de pauvreté largement supérieurs à la moyenne nationale, une fatigabilité importante et des carrières en dents de scie", sont "fortement pénalisées à l'âge de la retraite".
Parmi les prises de positions publiées en marge de l'avis, celle de quatre présidents de département, qui ajoutent que la réforme aura selon eux un impact "sur l’évolution du nombre d’allocataires du RSA de plus de 50 ans dont les perspectives de retour à l’emploi demeurent minces", sachant que la réforme de l'assurance chômage a déjà "réduit sensiblement la durée d’indemnisation des plus de 55 ans".