Quel mode de gouvernance pour gérer les centres-villes ? L'exemple du Canada et de l'Italie
L'Observatoire européen du centre-ville, lancé en février 2024 par Centre-ville en mouvement, a tenu sa première conférence en ligne le 3 avril, mettant en avant les modes de gouvernance et de financement de nos voisins européens et au-delà pour gérer les centres-villes et artères commerciales. Exemples avec le Canada et l'Italie.
Lancé par l'association Centre-ville en mouvement en février 2024, l'Observatoire européen du centre-ville organisait son premier webinaire le 3 avril 2024. Objectif : découvrir les pratiques de nos voisins européens, mais pas seulement puisque le Canada était représenté. En question : la gestion du centre-ville et les modes de gouvernance et de financement. Parmi les exemples les plus aboutis : les sociétés de développement commercial (SDC) initiées au Canada. "On ne peut pas gérer le centre-ville comme un centre commercial car il y a des acteurs privés, publics… C'est un partenariat public privé qui est absolument nécessaire", a expliqué le Canadien Pierre Boudreault, consultant senior d'Arteres, manager d'artères commerciales et de centre-ville. D'où l'idée de se regrouper au sein d'une société de ce type, qui permet en outre de lever une cotisation obligatoire auprès des commerçants. "C'est le point principal de la SDC, a détaillé Pierre Boudreault, assurer le financement avec les cotisations par une contribution équitable de tous les commerçants." La gouvernance de la SDC est assurée dans le cadre de ce partenariat et son périmètre est défini conjointement avec la ville : il regroupe ensuite toutes les entreprises non résidentielles (commerces, services, bureaux). Chaque occupant de ces locaux paye sa cotisation. Un conseil d'administration est constitué, avec neuf administrateurs : six commerçants élus, deux nommés par le conseil, et un représentant de la ville.
"La SDC est aussi un levier financier"
La SDC permet aussi à cette communauté d'avoir une voix unique, d'avoir du personnel, de se doter d'une permanence, de mettre en œuvre des services pour ses membres et des projets pour développer le centre-ville. "C'est aussi un levier financier qui permet d'obtenir des subventions", a souligné Pierre Boudreault, qui met en outre en avant les freins que rencontrent les associations classiques, à savoir un essoufflement des commerçants bénévoles, avec souvent un même groupe qui fait le travail, paye et mobilise les autres… A l'inverse, l'appui de la ville dont bénéficie la SDC lui assure une certaine pérennité. "Le système fonctionne très bien depuis la première à Toronto en 1970, a indiqué Pierre Boudreault, il y a plus de 2.000 SDC dans le monde, 22 à Montréal, 7 pour la ville de Québec, et il y a aussi des regroupements de SDC". Elles ont été particulièrement efficaces durant la crise sanitaire, devenant de véritables courroies de transmission pour les villes. Parmi les actions menées par les SDC : l'embellissement du territoire, la sécurité, la publicité, la promotion, les animations et événements, les services aux membres et leur représentation. Deux assemblées générales ont lieu chaque année.
Les cellules italiennes de gestion de centre-ville
Autre exemple, avec un principe assez proche : les cellules de gestion de centre-ville italiennes. Là encore, le modèle du partenariat public-privé avec un périmètre géographique défini est privilégié. Exemple avec le Piémont. En 2020, la région, qui s'est lancée plus tard que les autres dans ce modèle (la Lombardie a commencé en 2008), a investi 20 millions d'euros pour soutenir 77 cellules. 569 municipalités de la région sont concernées, soit une sur deux. Le modèle prévoit deux niveaux de gouvernance : un partenariat stratégique et opérationnel mis en oeuvre par le premier niveau constitué des municipalités et des commerçants (442 membres), et un deuxième niveau, plus large, intégrant les CCI, les écoles, les associations culturelles, le tiers secteur et ce qui relève de l'inclusion sociale (992 membres). "Pour gérer tout cela, nous avons pour l'instant 77 managers de centre-ville, qui sont soit des employés de la ville, des associations de commerçants, soit des professionnels employés par la structure partenariale, a détaillé Elena Franco, de l'Université de Venise, et pour accompagner cette énorme mobilisation de partenaires, nous avons signé un accord entre la région du Piémont, l'association qui regroupe les CCI et un autre partenaire, une fondation d'origine bancaire, qui s'est associée à la démarche." Objectifs : travailler ensemble, mettre en commun les idées, assurer un accompagnement et une formation en continu. "Depuis mai 2022, nous avons fait une dizaine de réunions stratégiques pour étudier, mettre en commun et mettre en place des actions. Nous avons besoin de mettre en synergie les politiques."
L'Observatoire européen poursuit son travail pour analyser les pratiques de nos voisins. D'autres webinaires sont programmés ces prochaines semaines.