Evaluation - Pour une Inspection générale de l'administration territoriale
Comment renforcer l'évaluation des politiques publiques locales ? Ne faudrait-il pas pour cela mettre à disposition des collectivités une structure dédiée de contrôle, de conseil et de mesure de l'efficacité de ces politiques ? Pour avancer sur ces questions, le président de l'Assemblée des départements de France (ADF), Claudy Lebreton, confiait en mai dernier à l'Association des administrateurs territoriaux de France (AATF) une mission de réflexion sur la constitution d'une "Inspection générale de l'administration territoriale" (Igat). Le président de l'AATF, Jean-Christophe Baudoin, lui a remis le 3 avril le résultat de ce travail, sous la forme d'un rapport de près de 200 pages. "Ce rapport n'est qu'un début. Il s'agit de lancer le débat au sein des collectivités. Il montre en tout cas que la création d'une inspection générale de l'administration territoriale est possible", précise Claudy Lebreton.
L'AATF, qui a notamment travaillé sur la base de nombreux entretiens (territoriaux, élus locaux et représentants de leurs associations, cabinets privés, représentants de l'Etat...), souligne que plusieurs éléments de contexte viennent renforcer l'idée d'une Igat : l'extension des champs de compétence des collectivités et la complexification de la gestion publique locale ; la multiplication des inspections générales locales (ou autres structures d'audit interne) au sein des grandes collectivités ; l'intervention croissante des corps de contrôle de l'Etat, y compris, paradoxalement, dans des domaines ayant pourtant été transférés aux collectivités.
"L'état des lieux des dispositifs de contrôle et d'évaluation existants montre que les besoins des collectivités ne sont pas satisfaits, y compris au sein des collectivités disposant d'une inspection générale locale. Souvent, des champs entiers ne sont pas couverts, qu'il s'agisse par exemple d'urbanisme ou de culture", explique Jean-Christophe Baudoin.
Quatre scénarios
Toute "entité de conseil et de contrôle, spécialisée et autonome, essentiellement dédiée aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics" devrait, estime-t-il, répondre à quelques principes d'action : subsidiarité (ne pas se substituer aux inspections générales locales), coproduction avec les inspections ministérielles de l'Etat dès lors que celles-ci interviennent déjà, conseil et ingénierie en matière de prévention des risques juridiques ou financiers, missions de réflexion stratégique, mise en réseau des bonnes pratiques.
Devra-t-il s'agir d'une instance de droit public dépendant de l'Etat ou des collectivités (établissement public ou GIP), de la simple émanation d'institutions existantes, d'une structure associative portée par les grandes associations d'élus ? Le rapport de l'AATF choisit de ne pas trancher - mais passe en revue les questions concrètes qui ne devront pas être oubliées, que ce soit en termes de modes de saisine, de financement et de rémunération des prestations, de diffusion des travaux ou de déontologie. "La question se pose, par exemple, de savoir s'il faut préférer le modèle d'une adhésion librement consentie des collectivités ou d'une obligation", note ainsi Claudy Lebreton.
Au final, quatre scénarios sont proposés "du plus minimaliste au plus ambitieux" : se contenter de mettre en réseau les inspections générales territoriales ou structures analogues ; faire en sorte que les associations d'élus créent ensemble une association qui jouerait le rôle de cette Igat ; créer un établissement public (ce qui impliquerait une mesure législative) ; associer dans un groupement d'intérêt public les collectivités et établissements publics locaux volontaires ainsi que des instances étatiques et d'autres organismes encore.
L'ADF compte, pour commencer, diffuser le rapport auprès de ses membres, évoquer le sujet avec les autres grandes associations d'élus et, probablement, organiser d'ici à quelques mois un colloque dédié aux politiques d'évaluation.
Claire Mallet