Olga Givernet : "Vert Marine met les collectivités au pied du mur"
La société Vert Marine a annoncé unilatéralement, lundi 5 septembre, la fermeture d'une trentaine de piscines publiques dont elle assure la gestion en délégation de service public (DSP) en raison de l’augmentation des prix de l’énergie. À l’initiative d’Olga Givernet, députée de l'Ain, un groupe de députés de la majorité présidentielle concernés par ces fermetures ont convoqué mercredi 7 septembre des représentants de Vert Marine. Olga Givernet revient pour Localtis sur cette audition.
Localtis : Pourquoi avez-vous souhaité auditionner des représentants de la société Vert Marine en urgence ?
Olga Givernet : À l'annonce de cette décision de fermeture de piscines publiques que nous avons découverte d'abord par la presse puis par les sollicitations de nos collectivités territoriales, nous avons pu en discuter entre députés. Nous nous retrouvions dans la même situation, d'abord surpris par la méthode de Vert Marine d'annoncer de manière unilatérale cette décision qui met les collectivités au pied du mur, et ensuite désireux de comprendre leur motivation, même si on peut entendre la question de la crise énergétique, un sujet sur lequel nous travaillons depuis des semaines en essayant de faire de la prévention. Et si nous faisons de la prévention, c'est justement pour éviter de nous retrouver dans des situations comme celles-ci. Il nous paraissait donc intéressant de pouvoir les entendre.
Quelle a été la teneur de vos échanges ?
Nous avons entendu les dirigeants de Vert Marine sur les difficultés qu'ils pouvaient rencontrer. Nous avons également pu les interroger sur leurs démarches pour obtenir des aides, et nous leur avons rappelé que le gouvernement avait annoncé 3 milliards d'euros d'aides en soutien aux entreprises grandes consommatrices d'énergie. Ils nous ont précisé avoir effectivement obtenu 120.000 euros d'aides mais ils estiment que cela ne couvre pas le surcoût de consommation d'électricité [Jean-Pascal Gleizes, directeur général de Vert Marine, a récemment évoqué un surcoût hebdomadaire de 1,5 million d'euros, ndlr]. Nous les avons ensuite interrogés sur la façon dont ils gèrent leur contrat avec leur fournisseur d'énergie pour comprendre comment ils se sont retrouvés dans une telle situation sachant qu'ils sont censés négocier des contrats annuels ou pluriannuels. Sur ce point, nous n'avons pas eu de réponse.
Avez-vous compris pourquoi seulement une trentaine de piscines était concernée par cette décision alors que Vert Marine gère environ 80 équipements de cette nature ?
Nous avons posé cette question. Il nous a été répondu qu'il s'agissait des piscines les plus en difficulté, mais nous n'avons pas eu plus d'informations sur le niveau de ces difficultés.
Quels arguments juridiques les dirigeants de Vert Marine ont-ils mis en avant pour justifier ces fermetures, alors que des juristes spécialisés dans la commande publique remettent notamment en cause la théorie de l’imprévision invoquée, laquelle suppose que le cocontractant de l’administration poursuive l’exécution du contrat ?
Ils ont affirmé qu'ils étaient en droit de procéder à ces fermetures, et je suppose qu'ils ont pu vérifier ce point avant de prendre leur décision. Mais j'émets un doute, je pense qu'ils ne sont pas forcément dans des critères qui leur permettent de prendre ces décisions de cette manière-là. Nous allons travailler sur ce sujet en lien avec les collectivités. Chacun des députés impliqués va se tourner vers ses élus locaux et voir au cas par cas ce qu'il en est pour chaque contrat.
Des solutions ont-elles évoquées lors de vos échanges ?
Vert Marine a évoqué le fait que dorénavant les collectivités pourraient supporter le coût de l'énergie, moyennant une refacturation. Je dis aux collectivités qui pourraient accepter ce type de clause : attention à ce qu'il n'y ait pas de plafond sur le taux applicable à la facturation de l'électricité [à partir duquel la collectivité serait tenue de payer, ndlr].
Finalement, quel sentiment ces échanges vous inspirent-ils ?
Le sentiment que Vert Marine a souhaité mener une action pour faire réagir. Mais il existe une responsabilité pour assurer un service public, surtout en cette période de rentrée où l'accès des scolaires à ces infrastructures fait partie de ses obligations.
Cela remet-il en cause à vos yeux l'intérêt de recourir à une DSP pour un service public tel qu'une piscine ?
Il y a 4.000 piscines municipales ou intercommunales en France et seules environ 10% ont recours à la DSP. Je ne critique pas le système et il faut garder cette liberté de pouvoir utiliser une DSP car certaines communes ou intercommunalités n'ont pas les compétences pour gérer une infrastructure de cette ampleur. Mais le recours à la DSP implique d'avoir un contrat bien ficelé et de s'assurer que les clauses du contrat soient correctement appliquées et ne lèsent ni la collectivité ni les usagers de l'équipement. Les collectivités doivent donc être bien soutenues par leur service ou conseil juridique pour négocier avec ces entreprises qui elles-mêmes bénéficient d'un tel accompagnement.
Quelle va être la prochaine étape pour vous dans ce dossier ?
Nous avons demandé à Vert Marine un certain nombre d'informations mais nous n'avons pas arrêté de date pour nous revoir. C'est un sujet qui est en cours. Pour nous, l'objectif est de rouvrir les piscines le plus rapidement possible. Je sais que les collectivités territoriales s'organisent de leur côté. D'autres opérateurs d'équipements aquatiques ont été amenés à prendre des décisions : aménagement des horaires d'ouverture, baisse des températures de l'air ou de l'eau. C'est plutôt vers ce type de discussions et d'accords qu'il faut aller et je souhaite que dans les prochains jours on puisse avoir des retours positifs. La méthode de Vert Marine est abrupte alors que nous souhaitons travailler avec les acteurs économiques pour faire face aux difficultés.