Normes, décentralisation... La délégation sénatoriale aux collectivités ne lâche pas ses sujets de prédilection

Alors qu'a été adoptée la proposition de loi sur le statut de l'élu portée par sa présidente, la délégation aux collectivités territoriales du Sénat se penche sur d'autres chantiers jugés prioritaires. Parmi eux, encore et toujours, l'inflation normative et la différenciation. On saura aussi que dans l'attente des conclusions de la mission Woerth, trois propositions de loi sénatoriales sur la décentralisation vont bientôt étre déposées.

On a dernièrement pas mal entendu parler de la délégation aux collectivités territoriales du Sénat et de sa présidente, Françoise Gatel, du fait d'une actualité législative particulière : la proposition de loi sur le statut de l'élu, adoptée le 7 mars au Sénat en première lecture (voir notre article) au terme d'un long processus. "La période a été très intense", reconnaît Françoise Gatel, rappelant que les travaux de la délégation sur cet enjeu du statut de l'élu avaient démarré dès octobre dernier, pour aboutir à des préconisations fin décembre puis à la proposition de loi en janvier.

Alors que l'on ne sait pas encore quand (voire si) le texte sera à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, la sénatrice redit l'"urgence" d'apporter une réponse "au désengagement et à la désillusion des élus". Faute de quoi on risque, entre autres, de se retrouver en 2026 avec un nombre inédit de "communes sans candidats". Soulignant le caractère "transpartisan" et "raisonnable" de cette proposition de loi cosignée par pas moins de 309 sénateurs et adoptée à l'unanimité, l'élue d'Ille-et-Vilaine estime que sa délégation "a fait son job" et se réjouit que le sujet soit "dans l'air du temps". Ceci, dans la mesure où une autre proposition de loi (PPL Spillebout-Jumel) sur le sujet a été déposée côté Assemblée nationale et pourrait donc faire de l'ombre au travail sénatorial.

Normes : quel bilan face au "harcèlement textuel" ?

En parallèle, la délégation aux collectivités territoriales du Sénat a aujourd'hui d'autres grands chevaux de bataille, que sa présidente a évoqués ce mercredi 20 mars lors d'une rencontre avec la presse. Parmi eux, le sujet des normes, qui fera l'objet d'un événement le 4 avril, en présence Conseil national de l'évaluation des normes (CNEN) désormais présidé par Gilles Carrez et, en principe, du Premier ministre. Ceci afin de marquer le premier anniversaire de la "charte d'engagement" signée par le Sénat et le gouvernement en mars 2023 à l'occasion d'"états généraux de la simplification" (voir notre article) et suite au rapport Gatel-Pointereau de janvier 2023 (voir notre article). Tout récemment d'ailleurs, début février, la délégation organisait une "réunion de sensibilisation relative aux conséquences de l’inflation normative sur le pouvoir d’agir des collectivités", ouverte à l’ensemble des membres du Sénat (disponible en vidéo).

La manifestation du 4 avril devra permettre de dresser un "bilan" de ce qui a été fait depuis un an face à cette inflation normative que Françoise Gatel qualifie volontiers de "harcèlement textuel". Lequel, souligne-t-elle, à l'heure de la chasse aux économies budgétaires… coûte extrêment cher. Selon l'élue toutefois, du côté de l'exécutif, la nécessité d'une "chasse aux normes" a bien été intégrée depuis quelques années.

Elle rappelle quelques idées-forces de ses travaux menés avec Rémy Pointereau, centrés sur les normes à venir plus que sur le stock : lors de la préparation d'un projet de loi, être en mesure de "prouver que la loi existante n'apporte pas déjà de réponse" ; renforcer la neutralité des études d'impact ; introduire des "clauses guillotine" (une disposition législative ne serait valable que pour un temps donné au terme duquel la disposition "tombe" si l'on n'a pu prouver son utilité) ; miser davantage sur l'expérimentation. Françoise Gatel cite à ce titre l'exemple de la proposition de loi en cours de navette sur le transfert de la médecine scolaire : il s'agit bien de proposer une expérimentation avec des départements volontaires, donnant lieu à évaluation à mi-parcours puis à cinq ans (voir notre article du 15 février).

"L'Etat doit se détendre"

Autre événement prévu en avril au Sénat, le 11 : une table-ronde consacrée à la différenciation. Différenciation et décentralisation… là encore, un sujet plus que jamais d'actualité avec l'avancée des travaux de la mission Woerth, sans oublier le récent accord sur la Corse qui donne semble-t-il des idées ou des envies à d'autres territoires (voir notre article du 13 mars). La différenciation "n'est pas une rupture d'égalité", elle "sert l'égalité de droit an adaptant les moyens", juge Françoise Gatel, pour qui "l'Etat doit se détendre" et donner "une obligation de résultats plus que de moyens". Un exemple lié à un territoire qu'elle connaît bien : le "pacte breton" sur le logement, qui permet au territoire de gérer en lieu et place de l'Etat les dispositifs d'investissement locatif, en fonction des priorités et contraintes locales. L'élue n'y voit que du bon.

On saura aussi que dans le sillage du groupe de travail sur la décentralisation lancé en octobre 2022 par le président du Sénat, Gérard Larcher, et aux 50 propositions "pour le plein exercice des libertés locales" présentées en juillet dernier (voir notre article), trois propositions de loi vont bientôt être déposées par le président de la commission des lois (une PPL constitutionnelle, une organique et une ordinaire). N'est-ce pas un peu prématuré, alors que l'on attend les conclusions de la mission Woerth ? "On ne va pas attendre. Chaque structure joue son rôle. On apporte une contribution. Si le gouvernement veut s'en servir, on gagnerait du temps", répond Françoise Gatel qui, avec Mathieu Darnaud, assure les contacts sénatoriaux avec Eric Woerth. Et qui a bon espoir que les deux corpus de propositions puissent converger.

Parmi les autres sujets à l'ordre du jour de la délégation

  • L'IA dans les services publics

  • L'ingénierie territoriale

  • L'action des communes dans le champ du vieillissement

 

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