Le Conseil national de la montagne victime des coupes rases de la simplification ?

Le Conseil national de la montagne fait partie des victimes de la vague de suppressions d'instances consultatives envisagées par les députés dans le cadre du projet de loi de simplification de la vie économique. Face à la "stupeur" de l'Anem, le gouvernement réaffirme son soutien à cette instance créée par la loi montagne de 1985. Il annonce par la même occasion la préparation d'une "feuille de route" pour l'avenir de ces territoires.

En promettant un ménage dans les "1.000 agences" et autres opérateurs de l’Etat, le gouvernement a ouvert la boîte de Pandore, au risque de se prendre les pieds dans le tapis. Dans le cadre de l’examen du projet de loi de simplification de la vie des entreprises, déjà adopté par le Sénat au mois d’octobre (voir notre article du 23 octobre), les députés ont pris l'appel du gouvernement à la lettre et n’y sont pas allés de main morte. Le rapporteur du texte lui-même, le député UDI Christophe Naegelen, n’a pas été le moins zélé d’entre eux puisqu’il a fait adopter une cinquantaine d’amendements dont bon nombre visent à supprimer toutes sortes d’organismes et de commissions consultatifs. Parmi les victimes de cet élagage de printemps : le Conseil national de la montagne (CNM). Cet organe consultatif a été créé par la célèbre loi montagne de 1985 pour rendre des avis sur les politiques de développement de la montagne. Composé de 90 membres dont un collège représentant les collectivités, il est présidé par le Premier ministre. Seulement il "n’a tenu qu’une seule réunion en trois ans (2021-2023), ce qui traduit une faible activité et une absence manifeste d’utilité opérationnelle", considère le député dans l’exposé des motifs de son amendement de suppression adopté en commission. De plus "son coût de fonctionnement, essentiellement lié à des frais de réception et de logistique, semble disproportionné par rapport à son impact réel". De quoi provoquer l’ire de l’Association nationale des élus de la montagne (Anem) qui a fait part de sa "stupeur" lundi, dénonçant par la même occasion l'"avis de sagesse" du gouvernement, "alors même que le Premier ministre François Bayrou est originaire du massif des Pyrénées et président d’une intercommunalité de montagne". Cette décision "n'est pas à une absurdité près", estime l’association qui a ses entrées au gouvernement (l’actuelle ministre de l’Agriculture Annie Genevard en a été présidente). Elle rappelle que la convocation du CNM est du ressort du Premier ministre et qu’une réunion devait avoir lieu le 11 juillet 2024 mais a été annulée en raison de la dissolution.

Une feuille de route pour la montagne

Le message a manifestement porté. Mardi soir, le gouvernement s’est fendu d’un communiqué pour "réaffirmer son soutien" à ce qui constitue selon lui "un espace indispensable de discussion associant les élus, les parlementaires et les représentants des comités de massif". "En prévision d’une prochaine réunion du CNM", ses membres se sont vu confier, le 20 mars, en lien avec l’Anem, une mission "pour dresser un retour d’expérience du plan Avenir montagnes et élaborer une feuille de route pour les années à venir, en particulier pour l’adaptation de ces territoires au dérèglement climatique", indique le gouvernement, dans un communiqué signé par quatre ministres : François Rebsamen (Aménagement du territoire), Agnès Pannier-Runacher (Transition écologique), Nathalie Delattre (Tourisme) et Françoise Gatel (Ruralité). Afin de préparer cette réunion, Françoise Gatel doit justement réunir ce jeudi les associations, les élus et les parlementaires impliqués dans ce dossier. Lancé en 2021 (voir notre article du 27 mai 2021), le plan Avenir montagnes a mobilisé quelque 330 millions d’euros dans "des projets d’investissement, de mobilité et d’ingénierie" pour accompagner les territoires de montagne "dans leur transition écologique et la diversification de leurs activités vers le tourisme quatre saisons", rappelle le communiqué. Pour le gouvernement, à l’approche des JO d'hiver de 2030, les territoires de montagne constituent "un atout pour la France" mais ils sont confrontés à "des enjeux majeurs, d’adaptation au changement climatique, d’aménagement du territoire et de développement économique". 

"Pas de simplification à l'américaine"

En attendant, l’Anem demande le rétablissement du CNM en séance (l'examen devant avoir lieu à partir du 8 avril) et "sa convocation sans délai". Interpellé mardi par le député écologiste Charles Fournier sur cette vague de suppressions, le ministre de l'Action publique Laurent Marcangeli a promis d'"agir avec méthode, sans tronçonneuse, sans avoir pour modèles monsieur Trump et ses amis". "Parce que nous sommes en France et parce que nous ne voulons pas d’une simplification à l’américaine."

 

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