L'instance départementale de la prévention de l'évitement scolaire jugée légale par le Conseil d'État
La loi n'ayant pas prévu que des représentants d'associations ou de parents d'élèves siègent au sein de l'instance départementale chargée de la prévention de l'évitement scolaire, le Conseil d'État a rejeté une demande d'annulation du décret relatif à cette instance.
La composition de l'instance départementale chargée de la prévention de l'évitement scolaire est bien légale, a jugé le Conseil d'État dans un arrêt du 9 mai. Instaurée par un décret n°2022-184 du 15 février 2022, pris en application de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, cette instance est chargée de favoriser l'échange et le croisement d'informations entre communes, conseil départemental, organismes de prestations familiales et Éducation nationale afin de repérer les enfants soumis à l'obligation scolaire qui ne sont pas inscrits dans un établissement public ou privé et n'ont pas fait l'objet d'une autorisation d'instruction en famille (IEF).
L'association "Les Enfants d'abord", qui milite en faveur de l'IEF, contestait l'absence de représentants d'associations ou de représentants de parents d'élèves au sein de l'instance, composée de représentants de l'État, des communes, du département et des organismes de prestations familiales. De façon aussi nette que succincte, le Conseil d'État estime que "la requérante ne peut utilement soutenir que le décret attaqué, faute de prévoir que de tels représentants y siègent, méconnaît l'intérêt supérieur de l'enfant et la liberté de l'instruction".
Ici, les conclusions du rapporteur public nous éclairent sur les motivations de la décision. D'une part, une décision du 13 décembre 2022 avait déjà jugé qu'aucun principe ni aucune disposition légale n'exigeait que les parents d'élèves soient représentés au sein de la commission chargée d'examiner les recours contre les décisions de refus d'IEF, et qu'il en allait a fortiori de même de l'instance de prévention de l'évitement scolaire. D'autre part, la composition de cette instance étant fixée par la loi, et celle-ci ne mentionnant pas les associations et parents d'élèves dans sa composition, "il ne peut utilement être reproché au décret de ne pas les y avoir fait entrer.
Un traitement des données préexistant
L'association contestait également la conformité au droit de l'échange et du croisement d'informations entre les membres de l'instance. Sur ce moyen, le Conseil d'État considère que "les dispositions attaquées n'ont pour objet ni de créer de traitement de données à caractère personnel, ni de modifier les conditions d'utilisation de traitements existants". En effet, le traitement des données à caractère personnel des enfants soumis à l'obligation scolaire et les garanties y afférentes ne relève pas du décret attaqué mais des articles R.131-10-1 et suivants du Code de l'éducation, lesquels n'ont pas été modifiés par la loi du 24 août 2021. En conséquence, le Conseil d'État rejette la demande d'annulation pour excès de pouvoir du décret n°2022-184 du 15 février 2022.
Le rapporteur public nous apprend enfin que dans cette affaire le ministre de l'Éducation nationale avait soulevé "une fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de [l'] association au motif que ses statuts n'intégreraient pas spécialement la question traitée par le décret attaqué". Une conception que le rapporteur estime, par un euphémisme dont la justice a le secret, "bien rigoureuse"…
Avec ce troisième recours, les trois décrets du 15 février 2022 pris pour l'application de la loi du 24 août 2021 ont désormais été attaqués.