Le Sénat entend "sécuriser" les missions des collaborateurs de cabinet

Clarifier les missions, permettre des remplacements en cas de congé, attribuer par la loi une autorité fonctionnelle sur certains services… À moins de deux ans des élections municipales, une mission d'information flash de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales formule cinq recommandations pour "clarifier et sécuriser le rôle et les missions" des "bras droits" des exécutifs locaux. 

Le rapport de Cédric Vial (LR) et Jérôme Durain (socialiste) a été adopté ce 25 juin, soit un peu plus d'un an après une décision du tribunal judiciaire de Paris, que les quelques milliers de collaborateurs de cabinet ont jugé inquiétante pour l'avenir de leur profession.

Ce jugement en date du 29 mars 2023 a condamné l'ancien président du conseil départemental du Val-de-Marne et son directeur de cabinet à des peines respectives de 10.000 euros et 8.000 euros d'amende pour détournement de fonds publics et complicité de ce délit. Il a été reproché à la collectivité d'avoir recruté 29 agents placés à la "questure", service administratif distinct du cabinet et dont l'objet était d'assister les vice-présidents dans l'exercice de leurs fonctions. Le tribunal a considéré que les agents exerçaient des missions identiques à celles des collaborateurs de cabinet du président et que, par conséquent, des postes de cabinet avaient été créés au-delà du plafond légal.

Contrôles des chambres régionales des comptes

L'affaire est partie d'un contrôle de la chambre régionale des comptes d'Île-de-France sur la gestion du département du Val-de-Marne. Lequel a débouché sur un signalement des magistrats financiers au procureur de la République. Les chambres régionales des comptes dans leur ensemble exerceraient "une attention croissante" au sujet des emplois de cabinet dans les collectivités, pointent les rapporteurs, prenant très au sérieux les risques qui pèsent ainsi sur les élus locaux et leurs collaborateurs.

Pour cause : le rattachement de certains services - en premier lieu communication et protocole - au cabinet de l'exécutif est une pratique couramment mise en œuvre, en raison de leur proximité supposée avec le responsable de la collectivité, et dans le but de garantir une plus grande réactivité.

Dans une réponse à la question écrite d'un sénateur, le ministère de l'Intérieur et le ministère chargé de la transition écologique ont toutefois estimé, début 2024, que la mise en place d'une autorité fonctionnelle du directeur de cabinet sur "les services de la collectivité qui concourent, malgré leur caractère de services administratifs, à l'exercice des missions de l'élu" est possible "par principe". 

Autorité fonctionnelle

Les sénateurs voudraient aller plus loin que cette forme de reconnaissance encore limitée de l'autorité fonctionnelle des directeurs de cabinet des exécutifs locaux sur certains services de la collectivité. Ils recommandent la reconnaissance "dans la loi" de cette autorité fonctionnelle directe, qui doit s'exercer "dans le respect de l’autorité hiérarchique" du directeur général des services (DGS) sur les agents. En sachant que la loi ne définirait ni "le périmètre" (c'est-à-dire les services administratifs concernés), ni "l’objectif" de l’autorité fonctionnelle :  ceux-ci seraient laissés à la libre appréciation de chaque exécutif local.

Cette reconnaissance de l'autorité fonctionnelle était demandée par Aurélien Mallet, président de Dextera - association des collaborateurs de cabinet de la droite et du centre -, qui, avec plusieurs de ses collègues, a été auditionné par la mission d'information.

Au-delà, les rapporteurs proposent de "clarifier les missions" des collaborateurs de cabinet, en consacrant celles-ci dans la loi - alors qu'aujourd'hui seule la jurisprudence définit leurs contours. 

Remplacement en cas de congé 

Ils préconisent par ailleurs un assouplissement des quotas de recrutement de collaborateurs de cabinet - lesquels sont fonction de la population de la collectivité. Actuellement, une collectivité qui a atteint le plafond ne peut pas recruter un collaborateur de cabinet pour remplacer une collaboratrice placée en congé maternité ou un collaborateur absent pour longue maladie. Dircab, l'association des collaborateurs de cabinet des collectivités territoriales de gauche, avait pointé le problème dans un Livre blanc mis à jour en novembre 2022.

Les sénateurs proposent encore de doter les vice-présidents ou adjoints des plus grandes collectivités et intercommunalités de collaborateurs de cabinet dédiés. "Aucun texte" ne semble permettre "expressément" de le faire aujourd'hui, regrettent-ils. Leur dernière proposition vise à "sécuriser l'organisation et la gestion des cabinets mutualisés" entre une commune et son intercommunalité, notamment en permettant un cumul des deux plafonds d’emplois.

Les collaborateurs de cabinet des collectivités territoriales de gauche revendiquent des mesures pour réduire la précarité de leurs emplois : intégration de ceux-ci aux emplois permanents des collectivités, "CDIsation", augmentation de l'indemnité de licenciement. Mais ces dernières n'ont pas été reprises par la mission d'information.

 

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