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Abattage des loups - Le Conseil d'Etat rejette un recours porté par des associations de défense

Par une décision rendue le 18 décembre, le Conseil d'Etat a écarté l'essentiel des critiques portées par plusieurs associations de défense du loup à l'adresse de deux arrêtés datés du 30 juin 2015. Ces textes fixent respectivement les conditions dans lesquelles des tirs de loups peuvent être autorisés par le préfet afin de protéger les troupeaux et le plafond maximal de loups pouvant être abattus pour la période désormais révolue "2015-2016". Pour le Conseil d'Etat, le premier arrêté attaqué ne méconnaît pas l'article L. 411-2 du Code de l'environnement, dès lors qu'il respecte les trois conditions auxquelles est subordonné l'octroi de dérogations à l'interdiction de destruction d'espèces protégées, tenant à l'existence de dommages importants causés à l'élevage, à l'absence d'autre solution satisfaisante et au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations de loups dans leur aire de répartition naturelle.

Insatisfaction dans les deux camps

La Haute Juridiction estime en particulier que l'arrêté a pu légalement permettre le recours à des tirs de défense "d'élevages non protégés". Cette décision constitue donc un nouveau revers pour les défenseurs du loup à quelques semaines de la finalisation du nouveau plan national "2018-2023" soutenu par le ministre de la Transition écologique, Nicolas Hulot. Présenté comme le fruit d'une "discussion apaisée", ce plan ne satisfait en réalité aucun des deux camps, pas même celui des organisations agricoles qui ont boycotté les dernières réunions.
Quant aux associations de "Cap loup", elles y voient "un plan ‘mouton' sans solution". Quarante loups pourront être abattus en 2018, comme en 2017, avant que ce plafond ne soit actualisé en fonction de la population de loups recensée au printemps et porté à "10 % de cette population". "(…) l'État semble reculer sur une des rares mesures de bon sens qu'il avait envisagées cet été suite à nos demandes depuis des années : n'indemniser l'éleveur, en cas de prédation imputée aux loups, que si celui-ci avait mis en place des moyens de protection du troupeau", s'indigne le collectif de défense. Surtout ce plan "n'apporte aucune garantie sur l'amélioration des techniques de protection des troupeaux, ni sur le développement de méthodes non létales d'effarouchement des loups", déplore-t-il. La seule "petite avancée" concerne l'abattage des loups hors du contexte de prédation sur le bétail  (tirs de prélèvements) : "elle ne sera plus autorisée toute l'année mais surtout en automne-hiver". 

Tirs de prélèvement

En cas de dommages  "importants ou récurrents" dans les élevages, des tirs de prélèvement peuvent en effet être autorisés par arrêté préfectoral. Sur ce point spécifique, le Conseil d'Etat retient l'argumentation des requérants : "(…) la seule circonstance que des dommages se soient répétés ne peut à elle seule suffire à les regarder comme importants". En permettant de prendre en compte également des dommages récurrents, quelle que soit leur importance, l'arrêté attaqué "a illégalement élargi les possibilités de dérogation prévues par le législateur", estime-t-il. Le Conseil d'État annule en conséquence les mots "ou récurrents", contraires à l'article L. 411-2 qui n'autorise la destruction de loups qu'en cas de dommages importants à l'élevage. A cette exception près, il juge en revanche les mesures prévues par l'arrêté de 2015 "nécessaires, proportionnées et progressives". Le reste du recours est donc rejeté.
Même sort pour les recours dirigés contre le second arrêté et ce en dépit de la proposition d'annulation faite par le rapporteur public lors de l'audience. Pour le Conseil, compte tenu de "la croissance soutenue de la population des loups sur le territoire national" (de 150 à 300 spécimens sur la période 2009/2015, soit un doublement en six ans), d'une part, et "de l'augmentation sensible du nombre d'attaques sur la période 2009/2016" d'autre part, le plafond de 36 loups pour la campagne 2015/2016 "ne nuit pas au maintien, dans un état de conservation favorable, de la population de loups en France".
Le feuilleton est néanmoins loin d'être terminé. La LPO (Ligue pour la Protection des Oiseaux) et FNE (France Nature Environnement) contestent également le plafond de destruction de loups, fixé là encore par arrêté, pour la période 2017/2018, et ont donc saisi le Conseil d'Etat le 21 septembre dernier, pour demander son annulation.