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Commande publique - Le Conseil d'Etat détermine le régime de la DSP provisoire

Dans un arrêt en date du 4 avril 2016, le Conseil d'Etat a admis la possibilité de recourir à une convention provisoire pour la gestion d'un service public, tout en l'encadrant. Ainsi, cette dérogation ne s'applique qu'en cas d'urgence, pour assurer la continuité du service.

Dans un arrêt en date du 4 avril 2016, le Conseil d'Etat a admis la possibilité de recourir à une convention provisoire pour la gestion d'un service public sous certaines conditions. Il n'a toutefois pas reconnu cette faculté à la communauté d'agglomération du centre de la Martinique (Cacem).
Retour sur les faits. Le 9 avril 2008, la Cacem a conclu une convention de délégation de service public (DSP) pour la gestion et l'exploitation d'une fourrière de véhicules. Cette même convention a été reprise par la société Caraïbes Développement en 2011. L'échéance du contrat était fixée au 31 août 2015 mais la compétence en matière de fourrière de véhicules devant être transférée à l'Etat, la collectivité a donc souhaité prolonger la convention.
Une discussion s'est alors engagée entre la personne publique et le titulaire du contrat afin de conclure un avenant le prolongeant jusqu'au 30 avril 2016. Ce dernier a été signé le 31 août 2015 mais la société Caraïbes Développement y a ajouté deux clauses suspensives que le préfet de la région de la Martinique a estimées illégales. La société a renoncé à ces clauses mais la communauté d'agglomération a tout de même "retiré" l'avenant et engagé une consultation avec plusieurs entreprises en vue de la conclusion d'une convention provisoire.
La société Caraïbes Développement a alors saisi le juge du référé précontractuel du tribunal administratif de la Martinique afin d'obtenir l'annulation de la procédure de passation du nouveau contrat. Ce dernier ayant été signé en cours d'instance, la requérante en a demandé l'annulation au juge du référé contractuel, lequel a accueilli sa demande. En effet, selon lui, la situation n'autorisait pas la personne publique à s'affranchir des mesures de publicité requises par le Code général des collectivités territoriales (CGCT).
La communauté d'agglomération du centre de la Martinique s'est donc pourvue en cassation contre l'ordonnance du juge du référé contractuel. Les juges du Palais-Royal se sont alors trouvés en présence d'une question qualifiée d'inédite par le rapporteur public : une situation d'urgence peut-elle justifier la passation d'une délégation de service public sans mesures de publicité ?

Une dérogation admise en cas d'urgence

Le CGCT prévoit une obligation de publicité préalable pour toutes les délégations de service public, quel que soit leur montant. Le législateur n'a pas prévu de dérogation en cas d'urgence pour ces contrats contrairement aux marchés publics, lesquels bénéficient d'une telle opportunité à l'article 35 du Code des marchés publics (CMP).
Le Conseil d'Etat a toutefois décidé de reconnaître cette possibilité "en cas d'urgence résultant de l'impossibilité soudaine dans laquelle se trouve la personne publique, indépendamment de sa volonté, de continuer à faire assurer le service par son cocontractant ou de l'assurer elle-même". La personne publique pourra alors conclure un nouveau contrat de délégation de service public sans publicité préalable mais seulement à titre provisoire et si le motif d'intérêt général qu'est la continuité du service public l'exige.
Le Conseil d'Etat précise d'ailleurs que la durée de ladite convention ne pourra excéder la durée nécessaire pour la mise en œuvre d'une procédure de publicité et de mise en concurrence pour la poursuite de la DSP, ou bien l'organisation de sa reprise en régie. La convention ne doit en outre pas dépasser les seuils européens, auquel cas elle entrerait dans le champ d'application de la directive Concession, laquelle ignore le recours à une convention provisoire.
La décision de la personne publique d'abandonner l'avenant pour signer une nouvelle convention a été analysée par le juge du référé contractuel comme une résiliation du contrat de DSP la liant à la société Caraïbes Développement. Les juges de la haute juridiction administrative ont validé cette interprétation et jugé que la passation d'une nouvelle convention sans publicité ni mise en concurrence n'était dès lors pas justifiée. Ils ont en conséquence rejeté le pourvoi de la collectivité.

L'Apasp

Référence : CE, 4 avril 2016, n°396191.
 

 

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