Le Conseil d'État bloque un projet de parc éolien au pays de Marcel Proust
Dans une décision rendue ce 4 octobre, le Conseil d'État a bloqué un projet controversé de parc éolien qui aurait dû voir le jour à quelques kilomètres d'Illiers-Combray (Eure-et-Loir), terre d'enfance de l'écrivain Marcel Proust. La société Combray Energie, filiale de la société JP Energie Environnement (JPee), voulait ériger huit aérogénérateurs sur les communes de Montigny-le-Chartif et Vieuxvicq, situées à quelques kilomètres du bourg rural que Marcel Proust (1871-1922) a rendu célèbre dans "Du côté de chez Swann", premier tome d'"A la recherche du temps perdu". Le projet avait été bloqué en 2020 par la préfète d'Eure-et-Loir, soutenue par l'association de défense de l'environnement des riverains de la Thironne et de la société des amis de Marcel Proust et des amis de Combray.
La plus haute juridiction administrative a confirmé une précédente décision de la cour administrative de Versailles rendue en avril 2022, estimant que ce projet "risquerait de porter une atteinte significative à des paysages étroitement liés à la vie et l'oeuvre de l'écrivain". Les magistrats de la cour versaillaise avaient retenu que "les éoliennes projetées seraient visibles depuis certains lieux se situant au sein du périmètre du site patrimonial remarquable d'Illiers-Combray ou à sa périphérie" pour juger que le projet de parc éolien "risquerait de porter une atteinte significative à un site remarquable et classé", rappelle le Conseil d'État. La cour de Versailles avait "également relevé que le clocher de l'église d'Illiers-Combray et le jardin du Pré Catelan, dessiné par Jules Amiot, oncle de Marcel Proust, sont classés au titre des monuments historiques".
Le Conseil d'État donne ainsi raison à la cour pour avoir pris "en considération des éléments qui ont trait aux dimensions historiques, mémorielles, culturelles et notamment littéraires du paysage" afin de s'opposer au projet de parc éolien.
"Cette décision du Conseil d’État ouvre un débat, a réagi JPee dans un communiqué ce 6 octobre. L’Etat va nécessairement devoir expliquer à ses services comment en tenir compte pour l’instruction des demandes d’autorisation qui leur sont présentées. En lieu et place d’une opposition manichéenne entre le développement des énergies renouvelables - en l’occurrence, l’énergie éolienne – et la conservation des paysages, il faut saisir l’opportunité de questionner notre usage du territoire et le respect de ses dimensions patrimoniales." La société dit réfléchir aux suites à donner à la décision et affirme qu'elle "étudiera notamment, avec les élus locaux, la possibilité d’améliorer encore ce projet pour démontrer qu’il n’est pas une contrainte mais, au contraire, une opportunité pour la protection du paysage".