Le Cerema opère sa mue autour de l’adaptation au changement climatique
Mobilités, adaptation des bâtiments aux enjeux climatiques, reconquête des friches industrielles, prise en compte des risques littoraux… le Cerema réinvente son expertise au prisme de l'adaptation au changement climatique en s’affirmant comme un partenaire clé des acteurs territoriaux. Une nouvelle identité qui coïncide avec l'arrivée d'une nouvelle présidente, Marie-Claude Jarrot, élue de terrain pour qui la résilience des territoires est un enjeu essentiel.
Nouveau logo, nouvelle signature "Climat et territoires de demain", positionnement affirmé autour de l’adaptation au changement climatique, gouvernance renouvelée, fonctionnement optimisé… Marie-Claude Jarrot, la présidente du conseil d'administration, et Pascal Berteaud, le directeur général, présentaient à la presse, ce 28 janvier, la nouvelle identité du Cerema (Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l’aménagement), réformé pour accompagner les transitions, notamment écologique et énergétique, au plus près des territoires.
Un projet de transformation et de modernisation engagé par son prédécesseur, Pierre Jarlier, que la toute nouvelle présidente (son élection remonte à début décembre) devra porter, notamment lors des prochains rendez-vous qui seront décisifs : ceux du projet stratégique (2021-2024) et du contrat d’objectif et de performance (COP) qui devrait être adopté au premier trimestre 2021. Celle qui s’est présentée dans son propos introductif, comme "une militante des territoires" veut avant tout leur redonner de l’espoir et des perspectives dans ce contexte de crise sanitaire. "Les maires peuvent trouver auprès du Cerema un capital confiance et un solide appui à l’ingéniérie", explique Marie-Claude Jarrot. Maire de Montceau-les-Mines depuis 2014, présidente de l’Association des maires de Saône-et-Loire, conseillère régionale et représentante de l’Association des maires de France auprès de la Coordination des employeurs territoriaux, de par ses multiples casquettes, la nouvelle présidente est particulièrement impliquée localement, notamment sur la question des friches industrielles.
Six thématiques, un fil conducteur
Augmentation des températures, îlots de chaleur urbains, augmentation du niveau de la mer, feux de forêt, exposition des populations aux risques climatiques…,"la question de l'adaptation au changement climatique sera l'enjeu des 20 prochaines années", martèle le directeur, Pascal Berteaud, un ingénieur général des Ponts, des Eaux et des Forêts. Une boussole qui conduit le Cerema à recentrer son expertise de référence sur six grands domaines de compétences : l’efficacité énergétique des bâtiments, les mobilités (développement des coronapistes de vélo, par exemple), les infrastructures de transport (notamment la vulnérabilité des routes, chaussées, ouvrages d’art au climat), les risques et nuisances (travail sur la résilience des territoires face aux géorisques), mer et littoral (recul du trait de côte en particulier), et enfin, l’expertise et l’ingénierie territoriale, domaine d’activité transversal aux cinq autres. Son objectif : apporter des solutions "sur mesure" aussi bien aux collectivités, qu’aux maîtres d’ouvrages, aux entreprises et aux porteurs des politiques publiques. Car en la matière, les réponses sont "d’abord locales". Le maillage territorial de l’établissement, gage d’une proximité opérationnelle, fait partie des atouts. La création d’une délégation dédiée à l’Occitanie viendra renforcer sa capacité d’action dans la région. En 2021, le Cerema concrétisera également le développement de sa présence outre-mer à travers une délégation dédiée. Et son nouvel Institut Carnot Clim'adapt permettra de développer des projets partenariaux de recherche et développement dans les domaines des infrastructures, de l'aménagement urbain, des mobilités et des risques naturels, qui sont dans l’ADN du Cerema.
Embarquer les collectivités dans la relance
En tant qu'opérateur d'État, le Cerema jouera un rôle majeur dans la mise en œuvre de plusieurs chantiers du plan de relance. C’est le cas du programme national "Ponts" ouvert à 28.000 communes pour le recensement de leurs ouvrages et d’un premier diagnostic des travaux d’entretien nécessaires. Un budget de 40 millions d’euros qui trouve également sa concrétisation dans l'appel à projets "Ponts connectés", alternative aux visites de surveillance. Le Cerema a aussi été choisi pour piloter dans le cadre de France Relance, l'opération Sentier littoral-La France-vue- sur-Mer, mise en place pour deux ans avec un budget sanctuarisé de 5 millions d’euros pour ouvrir de nouveaux tronçons libres d'accès, assurer des continuités de parcours, les valoriser et les rendre attractifs. L’établissement vient d'ailleurs de lancer avec l'Association nationale des élus du littoral (Anel) un appel à partenaires pour développer, expérimenter et valoriser des démarches intégrées d'aménagement du littoral.
Sur les friches, véritable cheval de bataille de Marie-Claude Jarrot, élue d’un territoire en mutation post-industrielle et en reconstruction, le plan de relance a prévu 300 millions d’euros, dont 40 millions pour la dépollution des sols gérés par l’Ademe et 1 million par le Cerema "pour produire des outils de recensement et de qualification". Cet été, l’établissement a dévoilé pour le compte du ministère de la Transition écologique une première version de l’outil en ligne Cartofriches. Autre chantier colossal, celui de la rénovation des bâtiments tertiaires publics, la présidente a entre autres évoqué le sujet des médiathèques, "il y fait froid l’hiver, ce sont des fours l’été et les agents ne peuvent y travailler correctement".
Vers une évolution du statut
"Pour plus d’efficacité, de réactivité et un accompagnement financier plus ouvert des collectivités", le Cerema réfléchit à la mise en œuvre d’une quasi-régie conjointe avec l’État et les collectivités locales. Un peu sur le modèle du CNFPT (Centre national de la fonction publique territoriale), les collectivités seront adhérentes moyennant une cotisation modeste. "La loi 4D pourrait ainsi servir de véhicule juridique pour porter cet enjeu", a précisé Marie Claude Jarrot. Cette évolution du statut du Cerema devrait permettre d’alléger les procédures du code des marchés publics tout en sécurisant la commande publique des collectivités, de manière à ce que cet établissement public d’État porteur d’une mission d’adaptation au changement climatique puisse se rapprocher des territoires. Le Cerema, dont le budget total représente 242 millions d'euros en 2020 (dont 83% apportés par l’État), a été confronté rapidement après sa création à une diminution très significative de ses moyens (baisse de subvention de 3% à 4% par an depuis 2017). Une contrainte financière qui se cumule à une chute des effectifs de 80 à 100 personnes par an (passé de 4.000 personnes à 2.400 d’ici 2022). Conscient de cette difficulté, le Cerema doit développer son offre de services auprès des collectivités et apporter son soutien à l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) à qui il est lié par une convention. Le nouveau directeur stratégie et communication, Pascal Terrasse, a enfin insisté sur la volonté de passer "d’une culture des guides papier" à une ouverture maximale des données. Avec ses 2.500 publications par an, le Cerema ouvrira d’ici trois semaines un portail documentaire qui sera gratuit et ouvert à tous. Une plateforme collaborative, "agrégation des données provenant d’autres opérateurs dans un esprit collaboratif", devrait également voir le jour.