La part des personnes en situation de privation a atteint 14% en 2022

C’est le niveau le plus haut depuis 2013, avec une hausse plus importante dans les communes rurales et de densité moyenne et dans les familles monoparentales, selon l’Insee.

La part des personnes considérées comme étant "en situation de privation matérielle et sociale" a augmenté en 2022 pour atteindre 14% de la population de France métropolitaine, soit 9 millions de personnes, selon une étude de l’Insee publiée le 20 juillet 2023.

Cet indicateur "repère les personnes ne pouvant pas couvrir les dépenses liées à au moins cinq éléments de la vie courante parmi treize", précise l’Institut. Parmi ces 13 éléments variés, on trouve : "payer à temps les loyers, intérêts, factures" (9,6% de personnes déclarant ne pas pouvoir en 2022), "se payer une semaine de vacances dans l’année" (24,4%), "manger de la viande, du poisson ou un équivalent végétarien tous les deux jours" (9,4%), "faire face à une dépense non prévue de 1.000 euros" (30,4%), "chauffer suffisamment leur logement" (10,2%), "avoir une activité de loisirs payante régulière" (15,9%) et "avoir accès à Internet à domicile" (1,5%).

La reprise des habitudes antérieures au Covid-19 et le poids de l’inflation

Au global, ce taux, qui était de 13,4% début 2020, a atteint "un niveau historiquement bas" de 11,3% en 2021, du fait de la crise sanitaire, avec à la fois la restriction – pour tous – des possibilités de consommer et les mesures de soutien aux revenus.

Début 2022, à l’inverse, le taux "atteint son plus haut niveau depuis 2013", première année de mesure pour cet indicateur. "Outre la reprise des habitudes de vie antérieures à la crise sanitaire, l’inflation est venue éroder le pouvoir d’achat des ménages", explique l’Insee. Sans surprise, et malgré les boucliers tarifaires mis en place sur l’énergie, les difficultés liées au chauffage sont "en forte augmentation", 10% des personnes déclarant de ne pas avoir les moyens de chauffer correctement leur logement, contre 5 à 7% entre 2014 et 2021. Du fait du poids des dépenses de chauffage et de carburants dans leurs budgets, "les habitants des zones rurales ressentent davantage que les autres la hausse des prix de l’énergie".

Parmi les autres privations reparties à la hausse en 2022, l’accent est mis par l’Insee sur la part des personnes dans l’incapacité de s’offrir une semaine de vacances hors du domicile, qui "baissait tendanciellement depuis une dizaine d’années".

Un taux plus élevé dans les grandes villes, une hausse plus forte dans les communes rurales

La tendance n’est pas la même selon le type de territoire. La hausse du taux de privation matérielle et sociale concerne les habitants des communes rurales (11,2% en 2022 contre 9,2% en 2020) et des villes de densité intermédiaire (15,4% en 2022 contre 13,8% en 2020). Dans les grands centres urbains, ce taux baisse mais reste le plus élevé (15,6% en 2022 contre 17% en 2020).

"Les familles monoparentales, et dans une moindre mesure les familles nombreuses, sont particulièrement exposées", ajoute l’Insee, avec un taux de privation qui augmente depuis deux ans. En 2022, le taux de personnes en situation de privation était de 31,1% en 2022 dans les familles monoparentales, de 21,5% dans les familles avec trois enfants ou plus, de 15,8% parmi les personnes seules et de 6,8% dans les couples sans enfant.

"L’isolement relationnel accompagne parfois le manque de moyens financiers pour avoir des conditions de vie acceptables", ajoute l’Insee, à l’appui de réponses à des questions sur "le sentiment de solitude", le fait d’avoir des personnes à qui demander de l’aide et le "sentiment d’exclusion".

Ces données sont issues des enquêtes "Statistiques sur les ressources et les conditions de vie", ayant conduit l’Insee à interroger "17.000 ménages, soit près de 39.000 personnes" en 2022.

Portant la stratégie de lutte contre la pauvreté du gouvernement et plusieurs fois reporté (voir notre article), le Pacte des solidarités "sera présenté dans quelques jours", a indiqué Jean-Christophe Combe le 20 juillet, au moment de passer la main à Aurore Bergé au ministère des Solidarités.