Médiateur de l’énergie : la Cour des comptes demande de fermer le service aux collectivités
Pour les Sages de la rue Cambon, l’accès des collectivités territoriales au service du médiateur national de l’énergie n’est pas justifié. Un rapport d’observations, publié ce 13 septembre, demande de les en exclure expressément et renvoie la balle aux intercommunalités pour faire face aux litiges sur leur approvisionnement en énergie.
Les collectivités territoriales pourraient bientôt trouver porte close auprès du médiateur national de l’énergie. En tête de liste d'une série de recommandations formulées dans un rapport d’observations, dévoilé ce 13 septembre, sur la manière dont l’institution assume ses missions de médiation et d’information, la Cour des comptes suggère tout bonnement de les exclure du champ de compétence du médiateur public dans le cadre des litiges les opposant à des entreprises du secteur de l’énergie.
Dans un contexte de flambée des prix de l’énergie, la proposition a de quoi surprendre. En réalité, le ver était dans le fruit. La rédaction de l'article L. 122-1 du code d’énergie, qui traduit l'élargissement du champ d’attribution du médiateur de l’énergie, notamment à tous les consommateurs non professionnels, présente une certaine ambiguïté concernant la recevabilité des collectivités, mise en exergue par la rue Cambon. Les travaux préparatoires de la loi du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique plus sobre, à l’origine entre autres de cette extension de compétence, montrent "que les ‘non-professionnels’ concernés incluaient l’ensemble des associations, ainsi que les syndicats de copropriété, sans mentionner le cas des collectivités locales", relève la Cour des comptes. La compétence du médiateur de l’énergie pour de tels litiges "ne va pas de soi dès lors qu’ils portent sur l’application de contrats conclus dans le cadre de marchés publics, pour lesquels les collectivités agissent comme des professionnels", ajoute-t-elle à sa démonstration.
Préserver les collectivités de petite taille
"Ces saisines sont certes peu nombreuses (une soixantaine de dossiers en 2021) mais elles contribuent à alourdir inutilement la charge du médiateur national de l’énergie", observe en outre le rapport. L’autorité indépendante a plutôt bien absorbé le surcroît d’activité dû à l’intensification de la concurrence et de l’arrivée de nouveaux acteurs. Toutefois, le rapport s’inquiète d’une dégradation du délai de traitement des saisines depuis 2019, qui pourrait à terme poser la question de l’adéquation entre ses missions et les moyens humains dont elle dispose. La Cour y voit également une question de "principe", sachant que ces saisines "concernent principalement des collectivités de moyenne ou de grande importance qui disposent des moyens de traiter leurs litiges". Qui plus est, elles sont en outre "majoritairement portées (55 sur 61 en 2021) par une société de conseil démarchant les collectivités en les incitant à saisir le médiateur".
Pas question de faire dans la dentelle. La Cour recommande donc d’exclure expressément les collectivités du champ des personnes morales éligibles du service de médiation "quelle qu’en soit la taille, les plus petites collectivités, dont les moyens sont plus modestes, pouvant disposer, quant à elles, des services des intercommunalités pour se prémunir contre d’éventuels litiges". La réponse du médiateur national de l’énergie, Olivier Challan Belval, se veut plus nuancée. S’il souscrit globalement à la recommandation de la Cour, il considère "qu’il serait néanmoins opportun de conserver la possibilité de le saisir pour les collectivités de petite taille". La solution serait, selon lui, de leur appliquer les mêmes critères que ceux qui définissent sa compétence pour les micro entreprises (moins de 10 salariés ou agents et jusqu’à 2 millions d’euros de ressources). Une interprétation des textes que la structure a d’ailleurs déjà utilisée par le passé pour clarifier les règles de recevabilité des collectivités. Conserver cette compétence pour les collectivités "les moins armées" face aux fournisseurs d’énergie serait "en cohérence avec la philosophie du rôle du médiateur national de l’énergie", estime-t-il.