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Handicap - La compensation du handicap est un revenu comme un autre

Dans une décision QPC du 2 juin 2014, le Conseil constitutionnel déclare contraire à la Constitution le deuxième alinéa de l'article 272 du Code civil. Cet article traite de la prestation compensatoire, fixée par le juge ou par les parties dans le cadre d'une procédure de divorce. L'alinéa censuré par le Conseil précisait que "dans la détermination des besoins et des ressources, le juge ne prend pas en considération les sommes versées au titre de la réparation des accidents du travail et les sommes versées au titre du droit à compensation d'un handicap".

Des dispositions contraires à l'égalité devant la loi

Dans sa décision, le Conseil constitutionnel juge que ces dispositions méconnaissent l'égalité devant la loi et les déclare donc contraires à la Constitution.
Son raisonnement est double. D'une part, le Conseil considère "qu'en excluant des éléments retenus pour le calcul de la prestation compensatoire les sommes versées au titre de la réparation des accidents du travail, ces dispositions empêchent de prendre en compte des ressources destinées à compenser, au moins en partie, une perte de revenu alors que, par ailleurs, toutes les autres prestations sont prises en considération dès lors qu'elles assurent un revenu de substitution".
D'autre part, il considère qu'"en excluant la prise en considération des sommes versées au titre de la compensation du handicap dans la détermination des besoins et ressources, les dispositions contestées ont pour effet d'empêcher le juge d'apprécier l'ensemble des besoins des époux, et notamment des charges liées à leur état de santé".

La PCH banalisée, mais non "détournable"

Ce considérant ne remet pas en cause le caractère affecté et spécifique de la prestation de compensation du handicap, qui ne peut être détournée de son objet. La décision QPC précise en effet que "les sommes versées à une personne au titre de la compensation de son handicap ne sauraient être détournées de leur objet pour être affectées au versement de la prestation compensatoire dont cette personne est débitrice". Cette position est en phase avec d'autres aspects de la prestation de compensation du handicap, comme son caractère insaisissable. En revanche, le Conseil ne valide pas l'exclusion de la compensation du handicap de l'appréciation des besoins et des ressources des époux.
Conclusion : en dépit de leurs spécificités - et notamment de leur caractère affecté - les sommes versées au titre de la compensation du handicap doivent être considérées comme des revenus comme les autres et entrer dans le calcul des ressources du couple et chacun de ses membres.
Sur un plan pratique, l'abrogation du second alinéa de l'article 272 du Code civil est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à la date de publication de la décision (soit le 4 juin 2014). En revanche, les prestations compensatoires fixées par des décisions définitives en application des dispositions déclarées contraires à la Constitution ne peuvent être remises en cause sur le fondement de cette inconstitutionnalité.

Jean-Noël Escudié / PCA

Référence : Conseil constitutionnel, décision n°2014-398 QPC du 2 juin 2014 (Journal officiel du 4 juin 2014).

 

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