La Chancellerie invite les parquets au contrôle des amendes forfaitaires délictuelles
Parfois érigée en panacée – sans pour autant faire l’unanimité, la Défenseure des droits ayant notamment plaidé l’an passé pour y mettre fin –, et en dépit des difficultés de son recouvrement, l’amende forfaitaire délictuelle (AFD) connaît un succès tel que le garde des Sceaux vient d’adresser aux procureurs une circulaire visant à s’assurer de sa bonne utilisation. "L’accélération du rythme de développement de nouvelles AFD rend (…) nécessaire de garantir la sécurité juridique de ces procédures", y argue sa signataire, la directrice des affaires criminelles et des grâces. Cette dernière recense à ce jour dix délits* susceptibles d’être verbalisés par AFD, mais rappelle que "de nombreux autres le seront prochainement, à l’issue de développements techniques qui doivent encore intervenir**, la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur du 24 janvier 2023 (Lopmi) ayant ouvert la voie de l’AFD pour 85 nouveaux délits". Un mouvement encouragé d’ailleurs par le ministre lui-même, puisqu’il a tout récemment fait part de sa volonté d’un recours accru à ce dispositif dans le cadre du plan de lutte contre le narcotrafic annoncé à Marseille (voir notre article du 8 novembre).
Si la direction des affaires criminelles et des grâces (DACG) rappelle que le "contrôle qualité" de ces amendes est assuré par le centre national de traitement du parquet de Rennes, sa directrice souligne qu’"il appartient aux procureurs de la République de contrôler le respect, par les forces de sécurité intérieure, des instructions de politique pénale déclinées localement en matière d’AFD" (instructions qui doivent s’adapter aux spécificités du ressort : état de la délinquance, problématiques sanitaires et sociales, grands événements, action de prévention et de lutte contre la délinquance). Aussi, la circulaire prévoit que ces derniers pourront, à compter du 1er janvier prochain, demander la transmission d’un échantillon de PV dressés sur leur ressort par la voie de l’AFD afin d’exercer pleinement ces prérogatives de contrôle.
Rappelons que la Lopmi dispose que le gouvernement doit remettre au Parlement, avant le 1er janvier 2026, un rapport sur la mise en œuvre de ces AFD.
* Conduite d’un véhicule sans permis ou avec un permis d’une catégorie n’autorisant pas sa conduite ou sans assurance, usage illicite de stupéfiants, occupation en réunion d’un immeuble collectif, vol, vente à la sauvette, introduction, détention ou usage de fusées ou d’artifices dans une enceinte sportive. Lors des débats sur la Lopmi, le député Florent Boudié, rapporteur du texte pour l’Assemblée, en recensait onze.
** La DACG indique que sept AFD sont en cours d’expérimentation : installation en réunion sur le terrain d’autrui (voir notre article du 7 septembre 2021), abandon ou dépôt de déchets, port ou transport d’arme de catégorie D, entrave à la circulation, intrusion sur une aire de compétition et introduction de boissons alcooliques dans une enceinte sportive. Des "ateliers de cadrage" ont en outre été initiés afin de sanctionner les délits d’outrage sexiste aggravé, de vente à la sauvette aggravée, de vente d’alcool aux mineurs et d’exercice illicite du métier de taxi.