La 5G est aussi une affaire de fréquences

Trois gammes de fréquences seront utilisées pour la 5G. Des bandes où il faudra composer avec les usages existants, comme le THD radio exploité par certaines collectivités ou les satellites scientifiques. À chaque bande seront associés des usages, mais aussi des capacités de couverture.

Le gouvernement vient de formaliser les objectifs que devront respecter les candidats à la 5G (voir notre article). Parmi ceux-ci, faire en sorte que "tous les territoires puissent bénéficier de services 5G" avec un lancement du service dans "plusieurs villes" dès 2020, et une couverture des grands axes de transport en 2020. Le respect de ce calendrier impose cependant des fréquences disponibles, adaptées aux usages de la 5G. Dans la feuille de route définie voici un an trois gammes de fréquences ont été identifiées.

Une 4G++ sur les fréquences mobiles actuelles

Tout d'abord des fréquences utilisées aujourd'hui par la 3G/4G entre 700 et 1,4 Ghz. "Cette bande capacitaire servira uniquement pour du téléchargement (du réseau de l'opérateur vers l'utilisateur) afin d'augmenter les débits et la capacité des opérateurs" précise l'Arcep. Il ne s'agira donc que d'une 4G++ avec cependant pour avantage de bénéficier des bonnes capacités de propagation des ondes sur les bandes dites "basses". Une partie de ces bandes étant occupées par la TNT, elles font actuellement l'objet de réaménagements suite à la décision de les affecter à la téléphonie mobile. Ces travaux, qui devraient s'achever ce printemps, peuvent occasionner des brouillages pour les téléspectateurs qui ont la possibilité de solliciter une aide via le site recevoirlatnt.fr.

3,5 Ghz, une cohabitation avec le THD radio jusqu'en 2026

La "vraie" 5G ne va véritablement apparaître qu'avec les fréquences mises cet automne aux enchères sur la bande 3,5-3,8Ghz. Celle-ci a été définie au niveau européen par le Radio Spectrum Policy Group pour favoriser l'émergence de services fonctionnant partout en Europe avec les mêmes équipements. En France, cette bande est cependant occupée par les services THD radio du type Wimax / LTE, pour desservir certaines zones rurales. Une portion du spectre est même toujours à disposition des collectivités via le guichet THD radio, uniquement en 2019, pour offrir une solution d'attente à l'arrivée de la fibre. Les autorisations des collectivités (Sem@for77, région Bourgogne-Franche-Comté, Vendée numérique, Garonne numérique) – comme celles d'acteurs comme Bolloré qui a acheté des fréquences sans les utiliser – courent jusqu'à 2026, date à laquelle le spectre devrait être réorganisé. En attendant cette échéance, il y a le risque que cette cohabitation se traduisent par des brouillages. Aussi, après avoir consulté les acteurs, l'Arcep a mis en consultation une décision le 10 mai visant à organiser la coexistence des deux services. L'autorité a fait le choix de privilégier une technique dite de "synchronisation" où tous les émetteurs fonctionnent "au même moment, à la milliseconde près". Cette technique, préférée à la création de bandes tampon entre les usages, "permet d'avoir plus de spectre dès le début de la 5G (en 2020), mais avec une latence plus grande que prévue". On notera au passage que si cette bande va offrir des performances meilleures que la 4G, elle a moins d'aptitude à couvrir le territoire ou l'intérieur des bâtiments.

26 Ghz, ultrahaut débit mais faible couverture

Les usages les plus disruptifs de la 5G passeront cependant par les fréquences dites "millimétriques", au-delà des 24 GHz. C'est dans ces bandes que les services du type usine 4.0, santé connectée, smart city ou véhicules autonomes devraient voir le jour. La communauté internationale s'est mise d'accord sur la bande des 26 Ghz (1) pour commencer à déployer des applications pilotes, l'Arcep étant missionnée pour organiser à court terme des expérimentations. Mais là encore, cette bande est occupée, en l'occurrence par des satellites d’observation de la Terre collectant des données servant notamment à l'analyse des changements climatiques. Comme pour la bande des 3,5 Ghz, il a été décidé de concilier les deux usages, en faisant notamment en sorte que les antennes 5G ne pointent pas vers le ciel pour limiter les risques de brouillages. Si ces fréquences sont celles où l'on attend les innovations de rupture – grâce à des débits comparables à ceux de la fibre et au temps de latence ultra réduit - elles sont également celles qui ont les moins bonnes capacités à se propager dans l'espace.
Autrement dit, quand on parle de "couverture 5G", il convient de bien préciser la bande fréquence à laquelle on se réfère.

(1) Lire le communiqué de la Commission européenne du 14 mai.

5G : le défi des mesures d'exposition

Pour l'ANFR, la 5G va entraîner une modification des protocoles de mesure de l'exposition du public aux ondes électromagnétiques. Les réseaux mobiles actuels utilisent en effet des équipements radio qui diffusent les signaux de manière constante, dans une direction donnée (faisceau). Avec la 5G une nouvelle génération d'antennes (dites Mimo) va émerger. Leur particularité ? Orienter automatiquement le signal vers l'appareil qui en a besoin, entraînant de fortes variation de l'exposition aux ondes pour un endroit donné. Ce qui devrait amener l'ANFR à développer les mesures mobiles. Par ailleurs, si les basses fréquences sont exploitées depuis des années (pour la TV et le mobile), on ne connait pas bien les effets des hautes fréquences. Ce qui ne manque pas d'alimenter craintes et rumeurs.

 

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